Chlorothalonil : ce pesticide interdit détecté dans les eaux EvianIstock
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L’eau Evian ne serait pas aussi pure qu’on nous le fait croire. Des scientifiques de l’Eawag, l’Institut fédéral suisse des Sciences et technologies de l’eau, ont détecté des résidus de chlorothalonil dans les bouteilles de la marque. Il s’agit d’un pesticide interdit en Europe et en Suisse depuis le début de l’année 2020.

Si la concentration ne semble pas nuisible pour la santé, cette découverte n’est pas à prendre à la légère, selon les experts. L’eau d’Evian qui provient directement du cœur des Alpes est considérées comme "si pure que les scientifiques l’utilisent pour calibrer leurs instruments de mesure", rapporte le SonntagsZeitung.

Boire de l’eau en bouteille ne serait pas meilleur pour la santé

Le fait que même les sources d’Evian dans les Alpes française, qui sont peu influencées par l’homme, contiennent des résidus de pesticides est alarmant et montre que ces substances sont manipulées de façon trop négligente", a fait part Roman Wiget, président de l’Association internationale de l’eau potable à la presse allemande.

Cette révélation n’est pas passée inaperçue. Certains écologistes n’ont pas traîné pour réagir. C’est le cas d’Alberto Mocchi, président des Verts vaudois, mouvement écologiste de Lausanne, interrogé par la chaîne de TV suisse RTS.

"Ça montre que boire de l'eau en bouteille en pensant que ça sera meilleur pour sa santé est un leurre", a clamé l'écologiste avant de préciser que cette eau est transportée par camion sur des centaines voire des milliers de kilomètres dans des contenants en plastique.

Comment Evian explique la présence de chlorothalonil dans ses bouteilles

Suite à ces révélation, Evian a tenu à réagir. "L’étude indique de façon étonnante une présence infime dans l’eau minérale naturelle evian de 6 nanogrammes / L (=0,000006 milligrammes / L), équivalent à quelques grains de sucre dans une piscine olympique) de métabolite, dérivée de la molécule chlorothalonil pour un seuil réglementaire de 100 nanogrammes/l (près de 20 fois inférieur au seuil réglementaire), communique la marque directement à Medisite. Sur l’ensemble des eaux souterraines analysées, près de 70 au total, 52% d’entre elles présentent plus de 100ng/l, au-delà du seuil de potabilité. L’eau minérale naturelle Evian a donc l’un des résultats de loin le plus faible, à peine au-dessus des seuils limites de détection".

"Cette valeur extrêmement faible (6ng/l) ne peut donc remettre en cause la pureté́ originelle de notre eau minérale naturelle evian, sa conformité́ réglementaire et son impact sur la santé. L’eau minérale naturelle d’evian peut continuer à être bu sans risque pour la santé". Evian

Evian assure que cette infime présence de chlorothalonil pourrait s’expliquer par le fait que ce sont des molécules particulièrement rémanentes et mobiles dans le sous-sol, qui peuvent atteindre dans le long terme même les aquifères les mieux protégés géologiquement, avant d'ajouter que la qualité de leur eau minérale est très régulièrement contrôlée par les autorités régionales de santé.

Des pollutions qui touchent aussi l’eau courante…

Les résidus de polluants ne touchent pas uniquement l’eau Evian mais aussi l’eau courante. Or, les autorités suisses semblent prendre le problème au sérieux. La ville de Lausanne a annoncé une demande de crédit de 700 000 francs suisses pour procéder à la décontamination de ses sources polluées.

Également municipal à Daillens (commune suisse), Alberto Mocchi, estime que "c'est aux pouvoirs publics d'essayer de prendre toutes les mesures nécessaires" pour lutter contre ces pollutions.

Qu’est-ce que le chlorothalonil ?

Le chlorothalonil s’avère être une substance chimique active et utilisée depuis les années 70 dans les produits phytosanitaires en tant que fongicide. Il a été introduit principalement dans la culture des céréales, des légumes ou au sein de vignes.

Il appartient à la famille chimique des organochlorés dérivés du benzène, est un biocide pesticide utilisé comme substance active de produit phytosanitaire (ou produit phytopharmaceutique) et a également des propriétés fongicides.

En 2017, 45 tonnes de cette substance ont été épandues en Suisse pour lutter contre l’apparition de champignons dans de nombreuses cultures.

L’office fédéral de l’agriculture (OFAG) suisse avait annoncé dans un communiqué le 12 décembre l’interdiction du chlorothalonil. Ce fongicide est donc interdit à la vente et son utilisation bannie depuis le 1er janvier 2020.

Pesticides : quelles sont les vrais risques ?

Pesticides : quelles sont les vrais risques ?© Istock

Les pesticides regroupent plus de 1 000 substances très hétérogènes. Il s’agit de produits utilisés en agriculture pour lutter contre les adventices ("mauvaises herbes") ou protéger les cultures des nuisibles comme les insectes ravageurs ou les organismes responsables de maladies tels que les champignons.

"Les pesticides regroupent ainsi les produits phytopharmaceutiques (pour la protection des plantes), les produits biocides (pour l’élimination d’organismes nuisibles comme les insectes ou les rongeurs ou pour la production du bois) ainsi que les produits antiparasitaires utilisés chez l’animal, comme les antipuces", décrit le Ministère de la Santé.

Pesticides : des liens avec l’apparition de certaines maladies ?

"Les inquiétudes de la population face à l’exposition aux pesticides se manifestent de façon récurrente ces dernières années", ajoute le Ministère. Et pour cause, les liens de présomption entre l’exposition aux pesticides et certaines pathologies comme maladie de Parkinson, les lymphomes, les cancers de l’enfant, ou encore les malformations congénitales, mais aussi avec leurs effets perturbateurs endocriniens peuvent susciter des doutes sur les conséquences pour la santé.

Ce n’est donc pas pour rien que les pouvoirs publics se mobilisent pour réduire et contrôler l'utilisation des pesticides.

Pesticides : 70% des fruits et légumes en contiennent encore avoir été lavés

Pesticides : 70% des fruits et légumes en contiennent encore avoir été lavés© Istock

En 2019, l'organisation environnementale américaine Environmental Working Group avait dévoilé sa liste annuelle des fruits et légumes les plus contaminés par les pesticides, et avait dressé un constat plus qu'inquiétant : au final, 70% de ces produits sont porteurs de résidus de pesticides mêmes après avoir été lavés.

Pesticides : quels sont les aliments les plus contaminés ?

Grâce aux résultats de ces tests, ils ont pu établir un classement des fruits et légumes les plus contaminés. Les fraises, les épinards et le chou frisé sont arrivés en première position, ce dernier faisant son apparition dans la liste pour la première fois depuis presque dix ans.

En effet, des résidus de pesticides ont été retrouvés dans 92% des échantillons de chou frisé. Et au total, ils contenaient 18 types de pesticides. Quant aux fraises, 99% d'entre elles avait des résidus d'au moins un pesticide.

Sources

SonntagsZeitung

Pesticides, Ministère de la Santé

mots-clés : pesticides, eau
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