Laits infantiles et dérivés de pétroles : les autorités françaises sonnent l’alerteIstock
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En octobre dernier, l’organisme Foodwatch avait confirmé la présence d’huiles minérales dans des laits en poudre pour bébés vendus par Nestlé et Danone. Depuis, les autorités prennent ce sujet très au sérieux. Vendredi dernier, la Commission européenne a même réunit les États membres afin de parler de ce sujet épineux.

"Huiles minérales" : des dérivés de pétrole que l’on retrouve dans l’alimentation

Les huiles minérales toxiques, aussi appelées MOAH, ont été reconnues potentiellement cancérogènes, mutagènes et perturbateurs endocriniens. Pourtant, on en retrouve dans bon nombre de produits, tels que dans les laits en poudre pour bébés.

Les autorités françaises ont donc décidé de mener des tests. Ils ont confirmé la contamination de laits infantiles par des MOAH, mais les produits visés - du lait en poudre Danone et Nestlé - sont malheureusement toujours sur le marché.

En Allemagne, les mêmes tests ont été effectués. 9 laits en boîte en métal sur 12 étaient contaminés, fin 2019, par les dérivés d’hydrocarbures les plus dangereux.

Au Luxembourg, les autorités ont indiqué à Foodwatch que 2 produits sur 19 testés sont également contaminés.

En Belgique, un rapport montre que 12 % de produits testés (pas uniquement du lait en poudre) sont contaminés par des MOAH.

Vendredi dernier, la réunion des États membres à Bruxelles a permis aux différents pays de se pencher sérieusement sur ce problème de santé publique.

Danone et Nestlé refusent de rappeler les laits contaminés

Les deux multinationales ne semblent pas concernées par l'affaire des laits contaminés, ni par la santé de leurs consommateurs.

En effet, malgré la preuve évidente de la nocivité des hydrocarbures aromatiques d’huile minérale (MOAH), Danone et Nestlé ont assuré en octobre dernier aux parents “qu’il n’y avait aucun risque” et qu’ils refusaient de rappeler les deux produits incriminés : “Nidal Lait en poudre 1er âge”, de 0 à 6 mois pour Nestlé et “Gallia, Galliagest Croissance sans lactose”, de 12 mois à 3 ans pour Danone.

Depuis, les deux groupes ne s'exprimeraient plus sur ce sujet.

Pour faire pression, une pétition a été lancée pour leur demander de rappeler les lots concernés. 55.000 personnes l'ont signé.

L’agence française de sécurité des aliments (Anses) estime qu'il est urgent "de réduire la contamination des denrées alimentaires par ces composés en priorité et de prendre des mesures adaptées”.

MOAH : quels risques pour la santé ?

Des huiles minérales contaminent actuellement le riz, les pâtes, les lentilles, le couscous, les corn flakes ou encore le cacao en poudre… Or, ces mélanges d'hydrocarbures contiennent "des milliers de composés chimiques" qui proviennent principalement du pétrole, du charbon, du gaz naturel et de la biomasse, explique l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) qui considère comme "préoccupante" l’exposition à ces produits.

En effet, les hydrocarbures d’huiles minérales dits "aromatiques" - comme ceux retrouvés dans le lait en poudre - peuvent agir comme des "cancérigènes génotoxiques (en endommageant l’ADN, le matériel génétique des cellules, et également provoquer le cancer)", souligne l’EFSA dans un avis rendu en 2012.

Des risques réels pour la santé, que dénonce Camille Dorioz, responsable des campagnes de Foodwatch, dans un communiqué : “Ces hydrocarbures aromatiques d’huiles minérales, les MOAH, n’ont rien à faire dans nos aliments, et encore moins dans les produits destinés aux tout-petits", met-elle en garde.

Dérivés du pétrole : comment se retrouvent-ils dans nos aliments ?

Dérivés du pétrole : comment se retrouvent-ils dans nos aliments ?© Istock

D’après des tests effectués par l’UFC-Que Choisir, les substances chimiques présentes dans les emballages de certains produits alimentaires vendus en France “migrent” du carton à la nourriture. Ces huiles auraient en effet une capacité surprenante à se déplacer et à pénétrer l’alimentation.

Ainsi, “sur 20 produits testés, 14 contiennent, à des niveaux préoccupants, des huiles minérales provenant des encres des emballages en carton.”

Sur son site, l’association précise que deux de ces produits (le couscous graine Tipiak et la chapelure Leader Price) “contiennent respectivement 50 fois et 10 fois la dose [d’huile minérale saturée] maximale recommandée” par l’Organisation mondiale de la santé et par l’Organisation des Nations Unies pour l’agriculture et l’alimentation.

D’après Foodwatch, ces substances cancérigènes peuvent aussi contaminer notre nourriture via d’autres sources, avant même d’être emballés, car l’industrie agroalimentaire y a recours pour de multiples usages. Par exemple, comme lubrifiants ou anti-poussière pour les machines qui servent à la production ou à la récolte.

Sources

Communiqué Foodwatch "Dérivés de pétrole dans l'alimentation, Foodwatch France, 20 février 2020.

Laits pour bébés Nestlé et Danone contaminés par des huiles minérales toxiques : foodwatch exige le rappel immédiat, Foodwatch, 24 octobre 2019.

L’Anses émet des recommandations pour réduire la contamination des denrées alimentaires par les huiles minérales, l'Anses, 9 mai 2017.

mots-clés : lait, alimentation