Cette maladie augmente les risques d’accidents au volant (et personne ne le sait)

Publié par Sandrine Coucke-Haddad
le 05/09/2025
senior au volant
Istock
INTERVIEW. Certaines maladies rendent incompatibles la conduite. D’autres sont plus sournoises, car on n’identifie pas les dangers. C’est le cas des maladies respiratoires par exemple, et notamment une en particulier. On fait le point avec une spécialiste. 

 

La Dre Elise Antone, pneumologue, spécialiste en médecine du sommeil et membre de l'Association respiratoire France alerte sur les risques insoupçonnés des maladies respiratoires sur la conduite. Rencontre. 

Medisite : Comment expliquer que certaines pathologies respiratoires puissent affecter la conduite ? 

Dre Elise Antone : N’importe quelle maladie respiratoire, que l’on parle d’asthme, de bronchite ou d’insuffisance respiratoire chronique ou de BPCO, quand elle est mal contrôlée peut altérer le sommeil et donc la conduite. Certains traitements pris dans le cadre de ces pathologies peuvent aussi impacter la conduite. Mais c’est surtout de l’apnée du sommeil dont il faut se méfier, car elle peut générer rapidement de la fatigue et des somnolences diurnes dangereuses si on prend la route. N'oublions pas qu’il y a entre 1 et 2 millions de personnes de plus de 60 ans qui sont atteintes d’apnée du sommeil, dont beaucoup sans traitement. On estime que sur l’ensemble de la population, 5 % des adultes sont concernés. Ces chiffres sont à rapprocher avec ceux des accidents de la route : la somnolence au volant est responsable de 10 à 20 % des accidents sur autoroute, dont une partie est à imputer à l’apnée du sommeil. Les patients qui ont de l’apnée ont deux fois plus de risque d’avoir un accident de la route que les autres, mais ce risque revient aux valeurs de la population générale si on est correctement traité. 

Comment cela se manifeste sur la route ? 

Par de la fatigue et de la somnolence. Il faut bien distinguer les deux car les réponses à apporter sont différentes. La fatigue se manifeste par des raideurs au niveau de la nuque, des douleurs dorsales, le regard qui se fixe, elle induit une perte de concentration. Il faut s'arrêter pour faire une pause, prendre l’air et marcher un peu. La somnolence se manifeste par des difficultés à rester éveiller, des bâillements, des paupières lourdes, des micro endormissements qui peuvent passer inaperçus (c’est le danger). Quand on se dit “je vais m’arrêter car je m’endors”, c’est que l’on a souvent déjà eu des micro endormissements de 3 à 4 secondes “invisibles”. Le risque accident de la route dans les 30 minutes qui suivent est alors démultiplié. 

La somnolence s’améliore par le sommeil uniquement, il faut impérativement faire une petite sieste. Dès que l’on dort mal (à cause d’une maladie respiratoire), et globalement si l’on dort moins de six heures par nuit, on est à risque de somnolence sur la route. 

Pourquoi les seniors doivent-ils être plus particulièrement vigilants ? 

Parce que l’apnée du sommeil par exemple, même si elle peut arriver à tout âge, touche plus encore les seniors, alors même qu’ils ont déjà un sommeil dégradé, à cause du vieillissement mais aussi à cause de certains médicaments (somnifères, antidouleurs, anxiolytiques, largement consommés après 65 ans) ou certaines pathologies courantes comme le syndrome des jambes sans repos, qui hachent les nuits. A cela s’ajoutent des problématiques connexes qui peuvent aussi affecter la conduite, certains troubles cognitifs par exemple. Sans compter les maladies métaboliques comme le diabète qui aggravent l’apnée du sommeil.

Que faire alors ?

Il ne faut jamais minimiser les troubles du sommeil ni l’impact de la maladie respiratoire sur les mauvaises nuits. Consulter un spécialiste est impératif car une maladie respiratoire peut toujours évoluer, il faut donc des contrôles réguliers et toujours bien suivre les traitements mis en place. 

Parallèlement, et plus encore peut-être que pour les autres publics, il faut veiller à adopter de bons gestes avant de prendre le volant : pas d’alcool ni de repas trop lourds, éviter les trajets longs surtout tôt le matin ou en fin de journée, s’arrêter pour des pauses… 

En cas de somnolence, il faut un suivi strict, car le risque d’accident sur la route est bien réel. 

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Interview du 3 septembre 2025. 

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