Douleur : la science démonte un vieux mythe comme quoi la femme serait plus résistante

Publié par Elodie Vaz
le 01/10/2025
Douleur
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Selon une étude canadienne, le cerveau des femmes ne réagit pas de la même manière que les hommes à la douleur. Et grande surprise : le sexe masculin serait plus résistant qu’il ne parait.
 

L’idée que les femmes supporteraient mieux la douleur que les hommes a la vie dure. Pourtant, une récente étude scientifique publiée en août 2025 sur le site de la National Library of Medicine, renverse cette croyance : les femmes seraient moins résistantes à la douleur que les hommes. 

Jeffrey Mogil, professeur d’études sur la douleur à l’Université McGill et coauteur de la recherche, ne cache pas sa conviction. « Pour moi, la question de qui est le plus sensible à la douleur a déjà obtenu une réponse claire. (…) C’est quelque chose qui a été étudié des centaines et des centaines de fois ». Il qualifie même la croyance inverse de « sorte de zombie qui refuse de mourir », explique-t-il à nos confrères du Washington post. 

Pour étayer ce constat, l’équipe du professeur McGill a soumis 18 jeunes adultes, hommes et femmes âgés de 20 à 33 ans à un test d’immersion de la main dans l’eau glacée pendant six minutes. L’objectif : comprendre comment le corps réagit lorsqu’il subit une douleur prolongée.

Observer le système nerveux en action

Le compte rendu de l’étude précise que la douleur chronique, celle qui dure plus de trois mois, est alimentée par le système nerveux sympathique, responsable de la réaction de « combat ou fuite ». « L’activité de ce système est mesurée par l’activité musculaire sympathique (AMS), soit des impulsions nerveuses qui agissent sur les vaisseaux sanguins », détaillent les chercheurs, qui ont examiné la relation entre les évaluations de la douleur et l’AMS. Pendant l’expérience, chaque participant notait sa douleur de 0 à 10, tandis que sa fréquence cardiaque, sa tension artérielle et son AMS étaient enregistrées.

Des réponses corporelles contrastées

Les résultats sont sans appel : Les chercheurs observent une augmentation de la douleur, de la fréquence cardiaque et de la tension artérielle au cours des 30 premières secondes chez les participants des deux sexes. Concernant l'AMS, ils indiquent qu’elle s'intensifie davantage chez les femmes que chez les hommes. « Nous avons observé une forte corrélation entre la douleur et la fréquence cardiaque chez les hommes, tandis que chez les femmes, une forte corrélation entre la douleur et les variables de l’AMS était observée », précisent-t-ils.

Du cerveau aux hormones, un écart qui se creuse

Pour le Dr Jeffrey Mogil, « tout semble différencier les hommes et les femmes », des circuits cérébraux jusqu’aux cellules immunitaires impliquées dans le traitement de la douleur. Un constat que confirme, Karen Davis, scientifique principale au Krembil Brain Institute du University Health Network. « Quelle que soit la façon dont nous observons le système cérébral lié à la douleur, que ce soit en termes d’activité, de connexion à d’autres zones du cerveau ou d’oscillations, cette zone du cerveau apparaît sans cesse comme étant différente chez les hommes et les femmes », ajoute-t-elle au média américain.

Cette spécialiste étudie depuis plus d’une décennie le cortex cingulaire antérieur sous-génital (sgACC), région clé du soulagement naturel de la douleur. Son équipe a découvert que les femmes atteintes de spondylarthrite ankylosante présentent une meilleure connectivité entre ce cortex et les zones sensorielles, ce qui pourrait expliquer un handicap plus important et une réponse moins efficace aux traitements que les hommes.

Vers une prise en charge plus personnalisée

Ces résultats ont des implications directes pour la médecine. Comme le résume Sean Mackey, chef du service de médecine de la douleur à l’Université de Stanford. « Ces études nous envoient un message clair : les différences entre les sexes ne sont pas seulement plus fortes ou plus faibles, il s’agit souvent de schémas de câblage totalement différents. Et nous devons tenir compte de ces différences entre hommes et femmes lors de leur prise en charge. »

 

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