Carences : quand vos ongles et votre langue signalent une urgence médicale
Contrairement à un coup de fatigue passager, les signes d'une carence installée ne disparaissent pas avec une bonne nuit de sommeil. Ils témoignent de l’épuisement progressif des réserves de l'organisme, notamment en fer, en vitamine B12 ou en folates (vitamine B9). Ces micronutriments sont indispensables au renouvellement constant de nos cellules, qu’il s’agisse des globules rouges transportant l'oxygène, de la peau ou des muqueuses. Lorsque ces réserves sont vides, des manifestations physiques apparaissent, indiquant que le problème n'est plus localisé mais systémique. Il ne s'agit plus de fatigue, mais d'un signal d'alarme de votre corps.
Des modifications précises sur vos ongles ou dans votre bouche peuvent révéler une carence avancée. Il est crucial de savoir les identifier.
La koïlonychie ou « ongles en cuillère »
Ce phénomène se caractérise par des ongles qui deviennent fins, fragiles et concaves, au point de pouvoir retenir une goutte d'eau. Historiquement, c'était un signe clinique recherché pour le diagnostic. Ces ongles en cuillère sont typiques d'une carence en fer sévère.
La pâleur de l'intérieur des paupières
Un geste simple permet de suspecter une anémie : tirer délicatement la paupière inférieure vers le bas. Si la muqueuse interne, appelée conjonctive, est très pâle au lieu d'être rouge-rosé, cela indique une faible concentration en hémoglobine dans le sang. C'est un symptôme direct de l'anémie, qu'elle soit due à un manque de fer, de vitamine B9 ou de B12.
La glossite ou « langue en miroir »
Votre langue peut aussi trahir une carence. Une langue lisse et pâle, voire rouge vif, qui a perdu ses papilles et devient douloureuse (glossodynie), est un indicateur à ne pas négliger. Cet aspect de « langue en miroir » peut être le symptôme d'une carence en vitamine B12 ou en fer. La langue est l'un des premiers tissus à réagir du fait du renouvellement rapide de ses cellules. Ces signes buccaux peuvent donc apparaître avant même que l'anémie ne soit détectable par une prise de sang.
La chéilite angulaire ou « perlèche »
Des fissures et des lésions inflammatoires aux commissures des lèvres, connues sous le nom de perlèche, ne sont pas toujours anodines. Les causes carentielles de la chéilite angulaire sont fréquentes et pointent souvent vers un déficit en fer ou en vitamines du groupe B, notamment B2, B9 et B12.
Quand le cœur et les nerfs sont en danger
Lorsque des symptômes plus généraux s'ajoutent à ces signes physiques, la situation devient critique. Une fatigue persistante, un essoufflement à l'effort et des palpitations sont des signaux qui méritent toute votre attention. Ces symptômes sont des signes d'anémie qui constituent une urgence médicale. En l'absence de traitement, les risques sont majeurs. La carence martiale est considérée comme l'une des comorbidités les plus fréquentes dans le cadre d'une insuffisance cardiaque. Par ailleurs, une carence prolongée en vitamine B12 peut causer des lésions neurologiques irréversibles, comme des fourmillements dans les membres (paresthésies) ou des troubles de l'équilibre.
Face à ces symptômes, l'automédication est insuffisante et potentiellement dangereuse. Seule une consultation médicale permettra de poser un diagnostic fiable via un bilan sanguin complet. Ce dernier mesurera notamment le taux de ferritine, de vitamine B12 et de folates.
Le traitement ne se limite pas à une simple supplémentation. Il est impératif d'identifier et de traiter la cause de la carence, qu'il s'agisse d'un régime alimentaire inadapté, d'un trouble de l'absorption (maladie cœliaque), d'une maladie auto-immune (maladie de Biermer) ou de saignements chroniques. Un suivi médical est ensuite indispensable pour ajuster le traitement et éviter toute récidive.
Afficher les sources de cet article
https://www.bmj.com/content/383/bmj-2022-071725
https://www.nhsinform.scot/illnesses-and-conditions/nutritional/iron-deficiency-anaemia/
https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC11254220/
https://www.researchgate.net/publication/270776481_Carence_en_vitamine_B12_1_re_partie_mise_au_point