

L’hépatite B est une maladie infectieuse chronique provoquée par le virus du même nom (VHB). Elle se transmet par le sang et les sécrétions humaines et est 50 à 100 fois plus contagieuse que le VIH. La maladie peut rester asymptomatique durant des années. « Non diagnostiquée, elle peut évoluer et exposer les personnes contaminées à un risque élevé de cirrhose, puis de cancer du foie », explique l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) dans un communiqué.
Seulement, un problème se pose : son évolution. « S’il est possible d’anticiper la survenue de cette complication, encore faut-il pouvoir identifier les patients les plus à risque », ajoute l’institut.
Plus de 250 millions de personnes sont touchées par la maladie à travers le monde, dont la grande majorité dans les pays à faible revenu. Un autre chiffre affolant : le taux de mortalité. Tous les ans, environ un million de personnes perdent la vie à la suite d’une infection par le VHB. En France, on estime que 280 000 à 300 000 Français sont atteints.
À ce jour, pour prédire la probabilité de développer un cancer hépatique, les médecins utilisent des outils appelés « scores prédictifs ». « Il existe plus d’une trentaine de scores, mais la majorité d’entre eux repose sur des données biologiques qui nécessitent des analyses complexes, comme la recherche d’une mutation génétique ou le dosage d’un marqueur sanguin spécifique », explique Clémence Ramier, doctorante en santé publique au Sesstim à Marseille. Résultat : peu de professionnels de santé utilisent ces scores.
Pour faciliter le travail des soignants, les scientifiques de l’Inserm ont cherché à concevoir un score plus accessible, avec pour objectif : proposer une prise en charge adaptée et des recommandations d’hygiène de vie comme l’arrêt du tabac, de l’alcool et des produits sucrés.
Pour y parvenir, ils ont utilisé les données françaises de plus de 20 000 personnes atteintes d’hépatite B et/ou C chronique. Seules 4 370 d’entre elles, dont 56 ont développé un cancer du foie au cours des huit années de suivi. « Nous avons commencé par tester tous les facteurs disponibles afin d’identifier ceux qui étaient associés au risque de carcinome hépatocellulaire. Nous les avons ensuite intégrés dans un même modèle statistique : chacun d’entre eux s’est vu attribuer un poids relatif en fonction de son importance, permettant de construire un score global. Nous avons pu déterminer un seuil de risque le plus fiable possible pour identifier avec précision les personnes les plus à risque », explique, dans un communiqué, Camelia Protopopescu, ingénieure de recherche en charge des aspects méthodologiques de l’étude.
Résultat : deux scores en sont sortis : Adaptt et Sadaptt. La note du premier se situe entre 0 et 14, et entre 0 et 13 pour le deuxième. « Une évaluation supérieur ou égal à 3 indique un risque accru de carcinome hépatocellulaire, avec de bonnes performances en matière de prédiction », précise le communiqué.
Voici un diaporama des sept facteurs évalués dans les scores :
A pour l’âge du patient

L'âge avancé est un facteur de risque de cancer de foie.
D pour la surinfection par le virus de l’hépatite Delta (VHD)

« La transmission de ce virus ne peut se produire que simultanément ou ultérieurement à une infection par le VHB, car le VHD a besoin du matériel génétique de ce dernier pour se répliquer. Or, la présence du VHD est associée à une progression plus rapide vers des formes sévères de la maladie hépatique, ce qui impose son dépistage chez tous les patients infectés par le VHB », précise Camelia Protopopescu.
A pour une consommation d’alcool à risque pour la santé

Le rôle de l’alcool est bien connu du grand public pour favoriser l’évolution vers un cancer du foie.
P pour un faible taux de plaquettes

Un taux inférieur à 200 × 10⁹/L sur le bilan sanguin est un facteur de risque.
T pour le tabagisme (20 paquets par année ou plus)

Le rôle du tabac reste quant à lui souvent sous-estimé, alors qu’il contribue également au risque de cancer.
T pour le traitement anti-VHB

Ce paramètre est un reflet indirect du niveau de l’atteinte hépatique : en effet, aucun traitement actuel ne permet de guérir cette maladie, qui disparaît rarement spontanément. Les médicaments antiviraux sont donc prescrits lorsque le virus est trop actif ou que le foie est trop sévèrement atteint, afin de ralentir la progression de la maladie.
S pour la consommation quotidienne de sodas

Cette consommation est connue pour favoriser la stéatose hépatique (maladie du foie gras), une affection qui peut évoluer vers la fibrose du foie, puis la cirrhose et enfin le cancer hépatique. « Bien qu’elle soit faile à recueillir, cette consommation est une donnée rarement disponible dans les études de cohorte. Ainsi, pour faciliter l’utilisation de notre score dans un grand nombre de contextes, nous avons choisi d’en proposer deux versions : l’une avec, et l’autre sans la consommation de sodas », souligne Clémence Ramier.