Yeux secs : comment savoir qu’ils cachent une maladie grave ?
La sensation de sable dans les yeux, les picotements incessants ou une rougeur persistante sont des désagréments très courants et que beaucoup imputent à la fatigue ou au temps passé devant les écrans. Le syndrome des yeux secs représente environ 25 % des motifs de consultation en ophtalmologie et concernerait près d'un tiers de la population adulte en France. Caractérisée par une production insuffisante ou une mauvaise qualité des larmes, cette condition peut, si elle n'est pas prise en charge, entraîner des lésions de la cornée comme une kératite, et affecter durablement la vision. Ce n’est donc pas aussi anodin qu’il y paraît.
Yeux secs : environnement, écrans et médicaments sont souvent impliqués
Si l'environnement joue un rôle indéniable, avec des coupables bien identifiés comme l'air climatisé, la pollution ou la fumée de cigarette, notre mode de vie moderne accentue le phénomène. Le travail prolongé sur écran, par exemple, réduit la fréquence de clignement de 30 à 50 %, ce qui accélère l'évaporation du film lacrymal protecteur. Moins connu, l'impact de certains médicaments est significatif. De nombreuses classes thérapeutiques peuvent en effet diminuer la sécrétion de larmes. Un lien a notamment été établi entre des yeux secs et la prise de certains médicaments, comme certains antidépresseurs, des antihistaminiques de première génération, ou encore des traitements contre l'hypertension tels que les bêta-bloquants.
Quelle maladie peut se cacher derrière des yeux secs ?
Lorsque la sécheresse oculaire devient chronique et résiste aux traitements symptomatiques, elle peut être le premier signe d'une maladie auto-immune. La plus fréquente est le syndrome de Gougerot-Sjögren, une affection systémique qui s'attaque principalement aux glandes lacrymales et salivaires. Cette pathologie touche majoritairement les femmes, avec 90 % des cas diagnostiqués, souvent autour de la cinquantaine. Les symptômes oculaires du syndrome de Gougerot-Sjögren s'accompagnent généralement de trois signes caractéristiques : une sécheresse buccale, une fatigue intense et des douleurs articulaires. Il s'agit d'une maladie sérieuse qui peut évoluer dans sa forme la plus sévère (qui concerne 15 % des patients selon la Société national française de médecine interne, SNFMI) vers des atteintes pulmonaires, rénales ou neurologiques et qui augmente le risque de développer un lymphome.
Yeux secs : d'autres pathologies auto-immunes en cause
Le syndrome de Gougerot-Sjögren n'est pas la seule maladie à surveiller. L'ophtalmopathie thyroïdienne, souvent associée à la maladie de Basedow, provoque une inflammation des tissus autour de l'œil. Ce processus peut entraîner une exophtalmie, c'est-à-dire des yeux exorbités, qui empêche les paupières de se fermer complètement et de répartir correctement les larmes sur la surface oculaire. D'autres affections comme le lupus érythémateux, la polyarthrite rhumatoïde ou encore la maladie de Crohn peuvent également être des causes sous-jacentes d'une irritation des yeux chronique et sévère.
Diagnostic et prise en charge : une démarche essentielle
Vous l’aurez compris, devant une sécheresse oculaire persistante, une consultation ophtalmologique approfondie s'impose. Le spécialiste peut réaliser des tests fonctionnels, comme le test de Schirmer qui mesure la quantité de larmes. En cas de suspicion d'une origine auto-immune, une recherche d'anticorps spécifiques dans le sang est indispensable pour confirmer ou infirmer la présence d'un syndrome de Gougerot-Sjögren. Le traitement des yeux secs dans le cadre du syndrome de Sjögren est double : il vise d'une part à soulager les symptômes avec des larmes artificielles ou des bouchons lacrymaux, et d'autre part à contrôler la maladie de fond. Cette prise en charge, pilotée le plus souvent par une équipe pluridisciplinaire, peut nécessiter des traitements immunosuppresseurs pour moduler l'activité du système immunitaire.