Alzheimer : la carence en ce métal pourrait être à l’origine de la maladie selon une étude
Une molécule discrète pourrait bien changer la prise en charge de la maladie d’Alzheimer. Son nom : le lithium. Des chercheurs de la Harvard Medical School (HMS) ont découvert que ce métal, naturellement présent dans le cerveau, joue un rôle essentiel dans la préservation des fonctions cognitives. L’étude, publiée le 6 août 2025 dans la revue scientifique Nature, révèle que les patients atteints de troubles cognitifs légers, souvent précurseurs de cette maladie neurodégénérative, présentent un déficit significatif en lithium.
"Nous montrons que le lithium endogène contribue à la préservation des fonctions cognitives pendant le vieillissement", expliquent les auteurs dans l’étude. Ce constat est inédit. "C’est la première fois que quelqu’un démontre que le lithium existe à un niveau naturel biologiquement significatif sans être administré sous forme de médicament", précise Bruce Yankner, auteur principal et professeur de génétique et de neurologie à la HMS, dans un article de l’université.
Deux hypothèses avancées par les scientifiques
L’étude avance deux hypothèses. La première : le déficit en lithium serait lié à sa séquestration par les plaques amyloïdes, ces amas de protéines caractéristiques de la maladie. "L’originalité de cette étude est que les auteurs suggèrent qu’il y a un déficit de lithium dans le cerveau des patients atteints de maladie d’Alzheimer, qui serait séquestré par les plaques amyloïdes", souligne dans un article de France Info, Luc Buée, directeur du centre de recherche en neurosciences et cognition de Lille. Les chercheurs ont observé ce phénomène à la fois chez l’homme et chez la souris.
La deuxième concerne l’orotate de lithium, un sel minéral étudié comme alternative au carbonate de lithium, couramment utilisé en clinique. Selon l’étude, l’orotate "a une meilleure capacité à lier le lithium que le carbonate, lui évitant de se faire piéger par les plaques d’amyloïdes". Cette propriété pourrait permettre au lithium de jouer pleinement son rôle protecteur dans le cerveau.
Le lithium moins cher et facilement accessible en pharmacie
Face à l’absence de traitement curatif auquel sont confrontés les cliniciens, cette découverte attire l’attention. Le Leqembi, récemment autorisé par la Commission européenne, reste limité à quelques patients en raison de son coût très élevé et de ses effets secondaires. L’orotate de lithium, en revanche, est plus accessible et disponible en pharmacie sans ordonnance, ce qui pourrait représenter une option accessible.
Des essais cliniques en attente
Pour autant, prudence : "Il est inutile de se ruer en pharmacie pour aller chercher du lithium en pensant prévenir la démence", avertit à France Info, Philippe Amouyel, directeur général de la Fondation Alzheimer. Cette découverte nécessite des essais cliniques pour confirmer sa fiabilité. "Ces tests n’ont pas encore commencé, faute d’incitation commerciale. "Aucune compagnie pharmaceutique ne va faire de profit sur le lithium", souligne dans l’étude, Tomas Hajek, psychiatre à l’université Dalhousie.
Malgré ces obstacles, Philippe Amouyel estime auprès de Radio France, un délai de "cinq à sept ans pour que des essais cliniques soient concluants", et souligne que la connaissance préalable de la molécule pourrait accélérer le processus. Le lithium, discret mais prometteur, pourrait donc prochainement devenir un allié inattendu dans la lutte contre la maladie d’Alzheimer, offrant un nouvel espoir à des centaines de milliers de patients et à leurs familles.