Allergies : un facteur de risque augmenté et encore méconnu après la chirurgie

Démangeaisons, crises respiratoires, éternuements… Quand on pense aux allergies, on imagine spontanément l’eczéma, l’asthme ou le rhume des foins comme des troubles gênants du quotidien. Rarement comme un facteur de risque chirurgical. Pourtant, deux nouvelles études présentées lors de la réunion scientifique annuelle 2025 de l’American College of Allergy, Asthma and Immunology (ACAAI) lèvent le voile sur une réalité encore peu connue : les personnes souffrant d’affections allergiques auraient davantage de complications après une intervention chirurgicale.

Les chercheurs avancent une explication : l’inflammation chronique et les modifications du système immunitaire associées aux allergies pourraient perturber le processus de guérison. Un corps déjà en état d’alerte immunitaire aurait plus de difficultés à cicatriser et à repousser les infections après une opération.

Reconstruction mammaire : un risque accru de complications

La première étude s’est penchée sur plus de 20 000 femmes ayant subi une reconstruction mammaire après un cancer du sein. Les résultats sont clairs : celles qui souffraient d’eczéma, de dermatite ou d’autres affections cutanées allergiques présentaient plus souvent des complications liées à leurs implants telles que des infections, ou une formation excessive de tissu cicatriciel (appelée contracture capsulaire), voire une rupture de l’implant. Dans les trois années suivant l’intervention, elles étaient aussi plus nombreuses à devoir subir une ablation de l’implant ou de nouvelles opérations de correction.

Comme le résume Philong Nguyen, BS, auteur principal de l’étude dans un communiqué publié le 6 novembre 2025, « les personnes souffrant d'eczéma ou d'affections cutanées similaires ont déjà une peau plus sensible et un niveau d'inflammation plus élevé. Cela semble rendre la cicatrisation chirurgicale plus difficile et augmente le risque d'infection. »

Greffes osseuses : des infections plus fréquentes chez les patients allergiques

La deuxième étude, réalisée sur plus de 38 000 adultes ayant subi une greffe osseuse, confirme et élargit ces observations. Cette fois, les patients souffrant d’eczéma, d’asthme ou de rhume des foins présentaient plus fréquemment des infections, des inflammations de l’os (ostéomyélite) et la nécessité d’une intervention supplémentaire pour retirer ou remplacer un implant. Là encore, le risque ne s’éteint pas avec le temps.

« Même deux ans après leur première intervention chirurgicale, les personnes souffrant d'affections atopiques étaient toujours plus susceptibles de présenter des problèmes tels que des infections ou un descellement des implants », souligne le Pr Joshua Wang, MS, co-auteur principal de l’étude. « Ces résultats suggèrent que les affections allergiques peuvent affecter la capacité du corps à guérir après une intervention chirurgicale, non seulement au niveau de la peau, mais aussi au niveau des os », ajoute-t-il. 

Un enjeu majeur pour mieux préparer et surveiller les patients

Ces travaux ne cherchent pas à inquiéter les patients allergiques, mais plutôt à alerter les professionnels de santé. Les auteurs des deux études rappellent qu’une meilleure prise de conscience de ce risque pourrait aider à adapter les conseils avant l’opération et à renforcer la surveillance après l’intervention. Une information simple — demander systématiquement si le patient est allergique — pourrait, à terme, limiter des complications évitables.

Dans un contexte où les allergies concernent de plus en plus de personnes, cette découverte pourrait marquer une étape importante vers une chirurgie plus personnalisée et plus sûre.