
- 1 - Quel est le lien entre allergies alimentaires et âge ?
- 2 - Quels sont les médicaments les plus risqués pour favoriser des allergies chez les seniors ?
- 3 - La polypharmacie est-elle un facteur aggravant chez les seniors ?
- 4 - Quels sont les allergènes les plus fréquents chez les seniors ?
- 5 - Comment prévenir les allergies chez les seniors sans compromettre les traitements ?
Les allergies alimentaires ne sont pas réservées aux enfants. Elles touchent aussi, et de plus en plus, les adultes — y compris les seniors. Un phénomène encore sous-estimé, alors même que les traitements médicamenteux, indispensables à cet âge, peuvent en amplifier les risques. Pour y voir plus clair, nous avons interrogé la Dre C. Quéquet, allergologue et autrice de “Des nouvelles allergies” (Éditions du Rocher).
Quel est le lien entre allergies alimentaires et âge ?
On imagine souvent que les allergies alimentaires débutent dans l’enfance et s’atténuent avec le temps. C’est parfois vrai, mais pas toujours. « Certaines allergies comme celle à l’œuf disparaissent spontanément vers 5 ou 6 ans, et dans 70 % des cas à l’âge de 16 ans », explique la Dre Quéquet. « L’allergie aux protéines de lait de vache régresse même dans 80 % des cas à l’âge de 5 ans. Mais lorsqu’elles persistent à l’âge adulte, elles ont tendance à être plus sévères. »
Et les seniors ne sont pas épargnés. Bien au contraire. Une étude américaine de 2019 évalue la prévalence des allergies alimentaires à 8,8 % chez les plus de 60 ans. En Pologne, une enquête menée auprès de centenaires révélait même que 13,6 % souffraient d’allergies, dont un tiers étaient d’origine alimentaire.
« Ces allergies peuvent persister toute la vie, comme celles aux fruits à coque ou à l’arachide, mais elles peuvent aussi survenir après 60 ans », souligne la spécialiste. L’anaphylaxie alimentaire chez les seniors reste rare mais non négligeable, avec un âge moyen de déclaration autour de 67 ans, selon les données du réseau Allergo Vigilance (RAV).
Quels sont les médicaments les plus risqués pour favoriser des allergies chez les seniors ?
Chez les personnes âgées, les traitements chroniques ne sont pas anodins dans le déclenchement ou l’aggravation d’allergies. « Certains médicaments comme les bêtabloquants, les inhibiteurs de l’enzyme de conversion, les anti-inflammatoires non stéroïdiens ou les inhibiteurs de la pompe à protons peuvent accentuer le risque ou la gravité d’une réaction allergique », précise la Dre Quéquet.
Ajoutez à cela des pathologies respiratoires comme l’asthme ou la BPCO, et vous obtenez un terrain propice aux réactions anaphylactiques sévères. « Il est crucial de prendre en compte la présence de maladies comme l’hypertension, les cardiopathies ou l’insuffisance respiratoire », insiste la Dre Quéquet. Car ces facteurs aggravent le tableau clinique en cas d’exposition à un allergène, avec des symptômes cardiaques et respiratoires pouvant constituer une urgence vitale.
La polymédication, fréquente chez les seniors, n’est pas sans conséquences. Prendre plusieurs médicaments simultanément augmente mécaniquement le risque de réactions croisées ou de sensibilisation.
La polypharmacie est-elle un facteur aggravant chez les seniors ?
La polymédication, fréquente chez les seniors, n’est pas sans conséquences. Prendre plusieurs médicaments simultanément augmente mécaniquement le risque de réactions croisées ou de sensibilisation. « Il faut absolument évaluer les interactions entre médicaments et allergènes potentiels, mais aussi tenir compte de facteurs comme l’effort ou l’alcool, qui peuvent précipiter une réaction allergique », ajoute-t-elle.
Quels sont les allergènes les plus fréquents chez les seniors ?
Outre les classiques fruits à coque, arachides ou crustacés, certains allergènes peuvent surprendre. Le céleri, le blé (à distinguer de la maladie cœliaque), ou encore la viande via l’allergène alpha-gal, transmis par les tiques ou certains médicaments anticancéreux comme le cetuximab, sont à surveiller de près. « Beaucoup de retraités s’adonnent au jardinage ou à la cueillette, ce qui augmente leur exposition aux tiques et donc au risque d’allergie à la viande. »
Comment prévenir les allergies chez les seniors sans compromettre les traitements ?
Face à ce cocktail potentiellement explosif, existe-t-il un moyen de réduire les risques sans compromettre les traitements essentiels aux seniors ? Pour la Dre Quéquet, l’individualisation du traitement est la clé : « Il est indispensable d’adapter les prescriptions, de surveiller les premiers signes d’allergie et de réévaluer régulièrement les besoins en médicaments. »
Elle insiste aussi sur le rôle de l’alimentation : « Les produits ultra-transformés altèrent le microbiote intestinal, ce qui augmente la vulnérabilité aux allergies. » Autrement dit, revenir à une alimentation plus naturelle pourrait aussi être un bon moyen de prévention.
Enfin, il faut rester à l’écoute de nouvelles formes d’allergies non-IgE dépendantes, comme l’œsophagite à éosinophiles ou le SEIPA (syndrome d’entérocolite induite par les protéines alimentaires), encore peu connues mais présentes à tout âge.
Interview réalisée avec la Dre Catherine Quéquet, autrice de “Des nouvelles allergies” (Éditions du Rocher) - 19,90 € https://www.editionsdurocher.fr/product/126510/les-nouvelles-allergies/
https://jamanetwork.com/journals/jamanetworkopen/fullarticle/2720064
https://www.cerin.org/breves-scientifiques/allergies-alimentaires-chez-les-seniors/