
On a longtemps estimé que la courbe du bonheur formait une sorte de “U”: il atteignait alors son plus haut niveau pendant la vingtaine, puis déclinait progressivement jusqu'aux environs de 40 ans (la fameuse crise des quadras) et remontait jusqu’à la soixantaine, âge le plus heureux. Mais aujourd’hui, fini les montagnes russes : de nouvelles études montrent que le bonheur et la satisfaction augmentent avec l’âge, remplaçant l’ancien modèle. Dès lors, une nouvelle période de la vie est considérée comme étant la plus malheureuse.
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Mais où est donc le bonheur ? Dans le pré ? Dans le malheur des autres ? Dans l’argent ? Peu importe où il se cache, il semblerait que de plus en plus de jeunes peinent à le trouver. On parle souvent de nos cadets comme d’une “génération sacrifiée”, et il semblerait que cela se vérifie. Un document commandé par l’Organisation des nations unies (ONU) et publié par le National Bureau of Economic Research souligne une “crise du bien-être chez les jeunes”.
En effet, l’étude montre une baisse marquée de la satisfaction de vie et du bonheur chez les jeunes adultes (18-24 ans) dans six pays anglophones : États-Unis, Royaume-Uni, Canada, Australie, Nouvelle-Zélande et Irlande. Cette tendance contraste avec une stabilité, voire une légère amélioration, du bien-être chez les plus âgés. Pour réaliser ce document, les chercheurs se sont basés sur 11 études anglophones, qui se basent sur des échelles de mesure standardisées pour évaluer le bonheur des participants. Les sondés ont ainsi été conviés à des tests, comme par exemple répondre à la question “Dans l’ensemble, à quel point êtes-vous satisfait de votre vie ?”, 1 étant très insatisfait et 10 très satisfait.
Une consommation accrue d’antidépresseurs
Les données de consommation d’antidépresseurs confirment cette tendance : les prescriptions augmentent rapidement. Au détour d’un rapport publié en juillet 2024, l’Assurance maladie a mis en lumière une augmentation “ préoccupante ” de la consommation de psychotropes chez les jeunes. Entre 2019 et 2023, elle a bondi de plus de 60 % chez les 12-25 ans. Chiffres confirmés par la Haute autorité de santé, qui partage : “Les recours aux soins d’urgence pour troubles de l’humeur, idées et gestes suicidaires ont fortement augmenté en 2021 puis 2022, pour rester depuis à un niveau élevé. Chez les jeunes de 18-24 ans, la hausse s’est même poursuivie de façon marquée en 2023. Aussi, les 18-24 ans étaient 20,8 % à être concernés par la dépression en 2021, contre 11,7 % en 2017”.
Une baisse du bonheur causée par les smartphones ?
Qui peut-on blâmer pour ce mal-être ? La pandémie de Covid-19 a, bien sûr, laissé de lourdes séquelles. Comme Emmanuel Macron le déclarait à l’époque : “C’est dur d’avoir 20 ans en 2020.” Toutefois, le virus n’est pas la seule cause à épingler. D’après l’étude anglophone, le déclin du bien-être des jeunes commence vers 2012, bien avant la pandémie. Cette dégradation coïncide avec l’explosion de l’usage des smartphones et des réseaux sociaux, qui aurait remplacé les interactions sociales réelles, d’après les chercheurs. “Nous ne pouvons que spéculer sur les causes possibles de ces diminutions du bien-être psychologique”, nuancent-ils toutefois. Une autre piste à creuser peut être celle de la précarité. En France, un jeune sur quatre vit aujourd’hui en dessous du seuil de pauvreté, selon une étude de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) de février 2023.
Une crise du bonheur, notamment chez les jeunes femmes
Les jeunes femmes sont particulièrement touchées par cette détérioration. Dans l’étude, elles signalent davantage de symptômes d’anxiété, de dépression et de solitude que les jeunes hommes. Cette réalité s’expliquerait, pour les chercheurs, par une myriade de facteurs, notamment les réseaux sociaux, où la comparaison et permanente, et qui sont aussi le théâtre du harcèlement en ligne. Or, les femmes sont soumises à des violences sexistes aggravant leur insécurité psychologique et physique.
La santé mentale, grande cause 2025
En 2025, la santé mentale est la “Grande cause nationale” française. Avec pour objectif de déstigmatiser les troubles psychiques et mentaux, développer la prévention et le repérage précoce des troubles, mais aussi d’accompagner au mieux les personnes concernées. En exemple, le gouvernement a mis en place la possibilité de consulter gratuitement un psychologue une fois par mois, sans avoir besoin d’une prescription médicale viable, à compter du 1er janvier 2025. Reste à voir si ces efforts suffiront à faire remonter la courbe du bonheur chez nos jeunes.