La curiosité n’a pas d’âge : sept manières de la cultiver selon un philosophe
Et si la curiosité était le secret d’une vie plus ouverte, plus riche et plus humaine ? Pour le philosophe Jean-Pierre Martin, auteur de La curiosité, une raison de vivre (éd. Les Grands mots), c’est bien plus qu’une qualité : c’est une manière d’être au monde. « Être curieux, c’est s’intéresser profondément aux autres, à leurs vies multiples », explique-t-il dans l’émission Grand bien vous fasse en octobre 2025. Cette curiosité-là, qu’il qualifie d’« existentielle », est un remède à l’indifférence. Elle ouvre à l’empathie, à la compréhension et empêche de se refermer sur ses certitudes.
Qu’est-ce que la curiosité, au juste ?
La curiosité n’est pas qu’un trait de caractère ou une simple envie d’en savoir plus. C’est une attitude intérieure, un moteur qui pousse à interroger le monde, les autres et soi-même. Elle naît du désir de comprendre et d’une forme d’étonnement face à ce que l’on ignore. Être curieux, c’est accepter de ne pas tout savoir et de se laisser surprendre, sans chercher immédiatement des réponses toutes faites.
C’est aussi une ouverture à la nouveauté : découvrir un lieu, une idée, un visage ou une histoire. Contrairement à la consommation rapide d’informations, la curiosité suppose de la patience, de la disponibilité et parfois même du courage. Car s’intéresser vraiment, c’est accepter d’être bousculé. En ce sens, la curiosité n’est pas seulement intellectuelle : elle est émotionnelle, relationnelle et profondément humaine.
Pour Jean-Pierre Martin, la curiosité agit tout simplement comme un antidote au vieillissement intérieur. « Avec la curiosité, on a le même âge et parfois des vieux sont plus jeunes que des jeunes », affirme-t-il sur Radio France. Être curieux, c’est rester vivant, garder ce lien vibrant avec le monde qui nous entoure.
Voici un diaporama des sept manières de cultiver sa curiosité.
S’intéresser sincèrement aux autres
La première clé de la curiosité, selon Jean-Pierre Martin, c’est de regarder autour de soi. La curiosité, dit-il, « empêche l’enfermement dans le dogmatisme ou les certitudes faciles ». En s’intéressant aux autres, à leurs parcours, à leurs points de vue, on apprend à sortir de sa bulle.
Regarder autrement
Être curieux, ce n’est pas seulement accumuler des connaissances. C’est aussi une façon de voir le monde. Le journaliste et vulgarisateur Jamy Gourmaud le résume ainsi : la curiosité « n’est pas là que pour emmagasiner des savoirs », mais pour « planter des graines dans notre cerveau » qui, en germant, nous mènent vers d’autres découvertes inattendues.
Relier les savoirs
Pour Jamy, tout est lié : « Derrière un savoir, il y a toujours un homme ou une femme, et c’est en s’intéressant aux autres que notre curiosité prend du relief et nous épanouit. » Autrement dit, la curiosité ne se nourrit pas de données ou de faits isolés, mais de liens : entre les gens, les idées et les disciplines.
Se méfier des réseaux sociaux
À l’heure d’Internet et des réseaux sociaux, la curiosité se trouve souvent détournée. Jean-Pierre Martin dénonce ces plateformes devenues des « machines à briser la curiosité ». Au lieu de pousser à découvrir, elles renforcent les opinions déjà acquises. Résultat : la curiosité devient un miroir de soi.
Le philosophe Ollivier Pourriol parle d’ailleurs de « deux curiosités incompatibles » : l’une, ouverte, tournée vers la rencontre, l’autre, plus intrusive, parfois violente.
Cultiver la lenteur et l’émerveillement
Pour Jamy Gourmaud, la vraie curiosité se cultive dans la lenteur et l’attention. Il regrette qu’à l’ère des flux continus d’informations, on confonde trop souvent curiosité et voyeurisme : « Là, on n’est plus dans la curiosité, mais dans le voyeurisme. » La véritable curiosité, selon lui, exige de prendre le temps de comprendre et de s’émerveiller, loin du zapping permanent.
Garder l’esprit d’enfance
« La curiosité n’a pas d’âge, à condition qu’on ait gardé l’esprit d’enfance, une certaine virginité et une faculté d’étonnement face à la myriade des savoirs, des expériences et des événements », souligne Jean-Pierre Martin. L’enfant s’émerveille de tout, pose mille questions sans craindre d’ignorer. C’est ce regard-là qu’il faut préserver.
Oser dire “je ne sais pas”
À l’âge adulte, la curiosité se heurte souvent à la peur du ridicule. « L’adulte est allé à l’école, il a vécu, il est censé savoir… alors il a du mal à reposer la question et à dire ‘je ne sais pas’ », note Jamy Gourmaud. Or, c’est justement ce “je ne sais pas” qui ouvre la porte à l’exploration et à la découverte.