female chemist looking at white pill, new medication testing in laboratoryImage d'illustrationIstock

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Les beaux jours sont de retour et, avec eux, les balades en forêt. Cependant, le soleil n’est pas le seul à réapparaître. Les tiques aussi. Et certaines portent en elles la bactérie responsable de la maladie de Lyme. Une pathologie infectieuse qui sous sa forme chronique handicape fortement les personnes atteintes.

Mais bonne nouvelle : une récente étude a mis en lumière un traitement prometteur. Son nom : la pipéracilline. Dans le travail de recherche publié dans la revue Science Translational Medicine, les chercheurs ont démontré que cet antibiotique bloque la production de protéines vitales pour les bactéries sans atteinte sur le microbiote intestinal.

La doxycycline moins efficace

Actuellement, le traitement standard consiste à prendre une forte dose de doxycycline (un autre antibiotique), deux fois par jour pendant trois semaines maximum. « Mais cela perturbe bien plus le microbiome intestinal normal », explique au média NewScientist, le professeur Brandon Jutras de l'Université Northwestern, dans l'Illinois aux États-Unis et auteur de l'étude.

Pour parvenir à leurs résultats, le professeur Jutras et son équipe ont examiné plus de 450 antibiotiques approuvés par l’autorité sanitaire du médicament américain (la FDA). Ils ont testé ces molécules contre la bactérie à l’origine de la majorité des cas de maladie de Lyme : la Borrelia burgdorferi.

Ils ont ensuite étudié comment ces antibiotiques affectaient les bactéries intestinales bénéfiques, comme certaines souches d’Escherichia coli, chez les souris et les humains. Résultat : la pipéracilline, un antibiotique de la famille de la pénicilline utilisé pour traiter la pneumonie, semblait plus sélective envers la bactérie Borrelia burgdorferi.

Les chercheurs ont alors infecté 46 souris, qu’ils ont, trois semaines après, traitées avec de la doxycycline ou de la pipéracilline, deux fois par jour pendant une semaine. Les souris ayant reçu une dose élevée de doxycycline ou une dose 100 fois plus faible de pipéracilline n’ont montré aucun signe d’infection.

Un microbiote intestinal préservé

L’analyse des selles avant et après traitement a révélé un effet quasi nul de la pipéracilline sur le reste du microbiote, contrairement à la doxycycline, qui a entraîné des changements notables. Cette différence tiendrait à la spécificité de la pipéracilline et à la faible dose requise. « Avec la pipéracilline, nous avons découvert qu'elle cible une protéine particulière, essentielle à la survie de B. burgdorferi, mais pas à celle des autres bactéries. Elle est donc remarquablement efficace pour tuer cet agent de la maladie de Lyme à faibles concentrations », explique le professeur Jutras. Ce ciblage pourrait préserver un microbiome sain, facteur important d’une meilleure santé sur le long terme.

Mais les souris ne sont pas des humains, rappelle au média NewScientist le professeur John Aucott, de l’université Johns Hopkins, dans le Maryland, aux États-Unis. Elles métabolisent souvent les médicaments plus rapidement, ce qui peut fausser les résultats.

Prochaine étape : l’équipe du professeur Jutras prévoit de tester la pipéracilline chez l’humain dans le cadre d’essais cliniques dans les prochaines années.

L'académie de médecine toujours inquiète

Il faut savoir qu’encore aujourd’hui, les traitements actuels contre la maladie font débat dans la communauté scientifique et médicale. L’Académie de médecine s’inquiète notamment de l'impact d'une prise de traitements antibiotiques sur le long terme. Sur une longue durée, ces molécules ne sont pas sans danger.

« Pas moins de cinq études ont montré qu’un traitement prolongé par antibiotiques n’améliore pas le pronostic de ces patients souffrant d’une "maladie de Lyme chronique" », explique le Dr Marc Gozlan, médecin et journaliste scientifique, dans un article publié dans Le Monde en 2017. De tels traitements ont été associés à un risque d’effets indésirables graves, dont certains mortels.