Romain : “J’ai découvert mon épilepsie à 40 ans à cause du stress”Crédit photo : Romain Huynh

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Alors en pleine reconversion professionnelle, chaque seconde compte pour ce quadragénaire passionné. Journaliste fraîchement diplômé, en stage à la rédaction du quotidien régional Paris-Normandie, Romain sillonne du matin au soir sa région natale à l'affût des sujets les plus croustillants. Un soir d'automne 2024, après un mois à mettre en lumière les histoires normandes, Romain s’effondre sur un trottoir du Havre. Transféré à l’hôpital par les pompiers, le diagnostic tombe : la maladie d'épilepsie.

"C’est arrivé d’un coup, de manière inexplicable. Je n’ai rien senti venir. Ce jour-là, ma voiture était garée loin de la rédaction. Je devais marcher quelques mètres pour la retrouver. J'ai quelques souvenirs de mon trajet, mais après, plus rien : le noir complet", se remémore ce père de famille de deux enfants. Dans la rue, tout s’agite, les passants appellent les pompiers. En attendant, pour Romain, plus de son ni d’image.

Le jour où tout bascule

"D'après les témoins, je me serais rattrapé à un lampadaire avant de tomber. Une chute qui m’a provoqué une éraflure sur le front, mais rien de plus", se réjouit-il. Après plusieurs minutes d’inconscience, il se réveille dans le camion des pompiers. Un retour à la réalité brutal, qu’il ne comprend pas sur le moment. "Les pompiers m’ont annoncé que j’avais convulsé et qu’ils me transféraient à l’hôpital du Havre", se souvient-il.

L’arrivée aux urgences est alors jalonnée d’examens divers et variés : scanner, électroencéphalogramme (EEG), prise de sang… chaque recoin de son anatomie est scruté par les médecins. "Après une nuit d’hospitalisation, le neurologue m’a confié que j’avais bien fait une crise convulsive et que les examens, notamment l’EEG, confirmaient le diagnostic d’épilepsie", livre-t-il.

Pour les médecins, le stress de son nouvel emploi et de sa séparation avec son ex-compagne serait l’élément déclencheur. "À ce moment de ma vie, j'étais dans une période de stress intense. Sans doute que j’étais épileptique depuis toujours et que cette situation, cumulée à la fatigue, a déclenché la maladie", raconte-t-il.

1 % de la population française touchée par la maladie

Comme Romain, en France, un peu plus de 700 000 personnes sont concernées par cette pathologie, ce qui correspond à 1 % de la population. Aujourd’hui, les scientifiques estiment qu’il existe environ une cinquantaine de maladies épileptiques différentes, qui sont définies en fonction de leur âge d’apparition, de leur cause et de la présentation clinique des crises.

Une crise survient lorsque les neurones commencent à envoyer des signaux électriques de manière anormale. Ces décharges électriques entraînent des symptômes variés, allant de pertes de conscience à des mouvements convulsifs. "La crise convulsive est l’image la plus connue de l’épilepsie, mais en réalité, la plupart des crises sont des absences, où le patient perd conscience sans se rendre compte de ce qui se passe", précise le professeur William Szurhaj, neurologue en service de Neurophysiologie au CHU d'Amiens.

Selon l’Inserm, il n’est pas toujours facile d’identifier l’origine des épilepsies. La plupart du temps, leur origine est considérée comme multifactorielle : facteurs génétiques, environnementaux ou métaboliques. "Mon frère a fait une fois une crise convulsive isolée, mais contrairement à moi, il n’est pas épileptique", précise Romain.

Vivre avec l’épilepsie, malgré tout

À la suite de cette annonce, le quotidien de Romain se complexifie. Son emploi lui impose de vagabonder aux quatre coins de la région normande. Pour son médecin, c’est inenvisageable. "Il m’a dit que tant que la maladie n’est pas stabilisée par les traitements, il y a des règles contraignantes à respecter, dont l’interdiction de conduire pendant six mois."

Les spécialistes expliquent cette contrainte par le risque de surmortalité lié aux accidents de la route. Seul un médecin agréé peut autoriser les patients à reprendre leur voiture au bout de six mois sans crise. "À cette époque, je cherchais un travail en tant que pigiste, j’avais besoin d’être mobile", souligne Romain. Heureusement pour ce jeune journaliste, le recruteur de Paris-Normandie lui propose un poste en rédaction web, sans besoin de se déplacer, dans les locaux de Rouen. "Je faisais des allers-retours en train, ce qui était faisable."

Aujourd’hui, avec un comprimé à prendre tous les soirs, Romain continue d’apprendre à vivre avec cette pathologie. "Je vois mon neurologue tous les trois mois. Je n’ai pas refait de crise et j’ai repris ma voiture." Cette maladie invisible et handicapante lui laisse du répit. Ce qui n’est pas le cas des 700 000 Français touchés par la maladie.