Don d’organes : “une belle étoile brille et a donné ses organes”

En octobre 2018 la fille de Florence Bouté, Alice, est victime d’un accident de cheval qui provoque un traumatisme crânien irréversible. Très vite la famille d’Alice décide de donner ses organes : “c’était important que nous prenions cette décision à 5, ses deux frères, sa petite sœur, mon mari et moi. Il fallait que tout soit clair et le cacher aurait ajouté du drame au drame” nous confie Florence. “Nous avons réussi à prendre du recul entre le fait qu’Alice était décédée et le fait de donner ses organes. Ce don ne changeait rien au fait que nous avions perdu Alice” ajoute Florence.

Don d’organes : permettre à d’autres d’être vivant

C’était trop difficile d’envisager la mort d’Alice, on s’est projeté dans la vie des autres” nous avoue la maman de la jeune fille. Elle ajoute d’ailleurs que “le don d'organes rend la mort moins absurde, mais Alice n’est pas morte pour donner ses organes mais son décès a permis ce don”. Quelques heures plus tard, Alice est emmené au bloc opératoire avec ses doudous. L’infirmier coordinateur du don d’organes veille sur elle. Six organes seront prélevés : le cœur, le foie, les poumons, les reins et le pancréas. “Si les organes sont prélevés, c’est qu’il y a un receveur au bout de la chaîne” précise Florence Bouté.

Six jours plus tard, lors de la levée du corps d’Alice, les médecins annoncent à Florence et son mari que les six greffes se sont bien passées. “Contrairement à ce qu’on pourrait penser, c’était le meilleur moment pour nous le dire. Cela nous a réconforté de savoir que les organes d’Alice avaient pu sauver six vies au moment où nous devions enterrer notre fille.”

“Les médecins nous ont remercié pour ce don”

“Une fois le prélèvement effectué, nous avons demandé à l’équipe médicale quels organes avaient pu être prélevés. Tous les médecins nous ont remercié. C’est à cet instant que nous avons pris conscience de l’importance de ce que nous venions de faire.” Grâce à cet acte altruiste, la famille d’Alice a pu s’accrocher à quelque chose de concret et prendre des nouvelles des personnes greffées (sous couvert d’anonymat). “Au début, je demandais tous les mois comment allaient les personnes ayant reçu les organes d’Alice. Avec le temps, on s'accroche moins à savoir comment vont les gens au bout de cette chaîne.” Une chose est sûre pour Florence : “ce don a permis à d’autres d’être vivants. Ce sont tous des enfants de quelqu’un peu importe leur âge. Quelque part, une maman n’a pas perdu son enfant et il ne faut pas passer à côté de cette opportunité de rendre la vie plus belle. Nous l’avons fait car c’était possible, je n’attends rien de ce geste et j’ai fait tout ce qui était possible de faire à mon niveau” explique Florence avec beaucoup d’humilité.

Don d’organes : “j’aimerais donner une clé pour réfléchir autrement”

A la suite de ce don, de nombreuses personnes ont réagi : “les gens nous demandaient comment nous avions réussi à faire ça, ils étaient admiratifs. Quand je leur ai expliqué qu’Alice nous l’avions perdu de toute façon et que ça n’ajoute rien au deuil ni à la souffrance que nous ressentons, c’était comme si il faisait jour dans leur tête. Je n’ai pas été plus malheureuse après le prélèvement des organes de ma fille.”

Un an après le décès de son enfant, Florence Bouté sort un livre “Le don d’Alice”, un véritable manifeste pour changer les mentalités sur le don d’organes. “Je ne juge personne, j’aimerais simplement que les personnes hésitantes soient en mesure de prendre du recul et de faire la différence entre le décès du proche qui est dramatique et le fait de donner ses organes. J’aimerais amener les gens à réfléchir. Mon expérience peut aider à se poser les bonnes questions”. Florence ajoute avec beaucoup de philosophie : “qui nous dit qu’on n’aura pas besoin un jour d’un organe ?”

Se battre contre les idées reçues sur le don d’organes

“La mort c’est tabou et le don d’organes également” déplore Florence qui a pu voir l’immense respect et la disponibilité des équipes médicales au moment de leur décision. “Il existe des outils pédagogiques, nous sommes très bien accompagnés à chaque étape du don. Il y a une réunion de coordination du don d'organes où sont présents les infirmiers qui s'occupent de la victime, les aides soignants, un psychologue et tout le staff médical. On peut poser toutes les questions qu’on veut avant, pendant et après le don d’organes.” De même, contrairement aux idées reçues, l’intégrité du corps du défunt est respectée : “l’équipe médicale a veillé sur notre fille à chaque instant. Elle n’était jamais seule. Quand l’opération a été terminée, elle était habillée, propre, coiffée, le volume de son corps n’avait pas changé, rien ne se voyait.” A partir de ce moment, la famille d’Alice a pu commencer son deuil en toute intimité.

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