Vers la fin des cancers incurables ? Les médecins sont confiantsIstock

Partager :

Que de bonnes nouvelles dans la lutte contre le cancer ! Longtemps considérés comme une fatalité, les cancers de mauvais pronostic, résistants aux traitements ou détectés trop tard, pourraient bientôt être vaincus. La recherche avance à pas de géant, multipliant les diagnostics précoces et les traitements innovants. Les 19è rencontres sur le cancer, qui se sont tenues le 13 mai à Paris, ont réuni des experts sur le sujet. Au cœur des échanges, une même ambition : faire reculer les limites de l’incurabilité.

Des chiffres porteurs d’espoir

Encourageante, l’évolution des chiffres de la guérison du cancer est spectaculaire. “Dans les années 1990, nous pouvions guérir environ un cancer sur deux. Aujourd'hui, avec 450 000 diagnostics pour 150 000 décès, nous guérissons environ les deux tiers des cancers”, affirme le Pr Fabrice Barlesi, directeur général de Gustave Roussy.

L’objectif, selon lui, est désormais de “g uérir 80 % des cancers d'ici à 2040”, un cap qui devient atteignable grâce à une combinaison de progrès scientifiques, technologiques et organisationnels. Ce bond en avant repose notamment sur l’amélioration des capacités de dépistage, la réduction des délais diagnostiques, et des traitements de plus en plus personnalisés.

Prévenir et détecter plus tôt, la clé vers la fin des cancer

Mais comment atteindre cet objectif ? Premièrement, prévenir, plutôt que guérir. Le rôle de la prévention et du dépistage précoce est désormais central, pour ralentir la mortalité liée aux cancers, mais aussi pour éviter aux patients beaucoup de souffrance.

Nicolas Scotté, directeur général de l’Institut national du cancer, rappelle que “30 % des cancers représentent 50 % des décès”. Il plaide pour une détection plus précoce, en particulier des cancers à mauvais pronostic comme celui du poumon. Un programme pilote, lancé en 2025, prévoit de dépister 20 000 patients fumeurs grâce à un scanner à faible dose, avec une promesse claire : “réduire la mortalité de 25 %”, affirme l’expert.

Outre le cancer du poumon, des autres pistes émergent ! C’est le cas pour le dépistage des cancers de la prostate, de l’estomac ou du sein, à l’aide de l’IA ou de techniques génétiques avancées. “Des outils d’imagerie utilisant l’intelligence artificielle nous aideront à faire du repérage précoce”, explique Nicolas Scotté. De même, le séquençage de l’ADN, complexe et autrefois innovant, s’impose désormais de plus en plus comme une routine pour les cancers MSI (microsatellite instable), souvent d’origine héréditaire.

La vaccination joue également un rôle croissant. Le Pr Ludovic Deriano, directeur de recherche à l’Institut Pasteur, évoque les vaccins contre les cancers d’origine infectieuse, comme le papillomavirus. Mais il souligne aussi les défis de la vaccination thérapeutique contre les cancers non infectieux, plus complexes à cibler. L’entreprise biopharmaceutique GSK, par la voix de sa directrice médicale Mouna Champain, annonce ainsi un partenariat avec l’université d’Oxford pour développer des vaccins à la fois curatifs et préventifs. “J’ai bon espoir que ce projet puisse ensuite être exporté en France”, précise-t-elle.

Des traitements de plus en plus ciblés et efficaces

Outre les actions préventives, les thérapies ont également évolué en profondeur. C’est le cas de l’immunothérapie notamment, qui transforme la prise en charge de certains cancers. “Les tumeurs MSI représentent un exemple de maladies incurables devenues curables”, déclare le Pr Thierry André. Ces tumeurs, liées à des défauts de l’ADN, répondent particulièrement bien à l’immunothérapie.

L’approche personnalisée s’impose : les experts souhaitent comprendre la tumeur de chaque patient pour adapter le traitement. “Il faut faire une médecine de précision à travers une recherche de biomarqueurs”, insiste Mouna Champain. Cette stratégie permet non seulement de mieux soigner, mais aussi de limiter les effets secondaires, rendant la vie des patients moins pénible.

Ce virage vers une médecine individualisée doit s’accompagner d’un changement dans la réglementation des essais cliniques pour développer des médicaments. “Nous prônons une approche agnostique (nldr : qui vient de l’expérience concrète), développant les solutions thérapeutiques là où la biologie le permet”, déclare le Pr Barlesi.

Un avenir à construire ensemble

Si l’espoir est là, des freins persistent. Les délais d’accès aux essais cliniques restent plus longs en France que chez certains voisins européens. Aussi, les territoires ultramarins peinent à être inclus dans les protocoles de recherche. Le Pr Barlesi souligne également l’enjeu industriel : la France, bien qu’innovante, reste dépendante de laboratoires étrangers pour la commercialisation de ses découvertes. Le Paris-Saclay Cancer Cluster vise à combler ce fossé entre la recherche et l’industrialisation.

La volonté de recherche en France reste tout de même bien présente. “Je suis optimiste, parce qu’on pose les problèmes”, conclut Michel Lauzzana, député du Lot-et-Garonne et président du groupe d’études “Cancer”. Face aux défis sanitaires, technologiques et éthiques, la fin des cancers incurables ne relève donc désormais plus de la science-fiction ?

Sources

Évènement : 19è rencontres sur le cancer, Maison de la Chimie (Paris VIIème)