ASCO 2025 : l’immunothérapie et la biopsie liquide au cœur des avancées contre le cancerImage d'illustration Istock
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Un peu plus de 40 000 spécialistes de la cancérologie du monde entier se sont réunis dans un hall géant de la célèbre ville de Chicago avec pour seul objectif : mettre en avant les avancées thérapeutiques et scientifiques. Cet événement qui s’est tenu entre le 30 mai et le 3 juin 2025 porte un nom : le congrès mondial sur la recherche contre le cancer (l'ASCO). Cette année, les projecteurs se sont essentiellement dirigés vers l’immunothérapie, un traitement qui vise à aider le système immunitaire à combattre lui-même les cellules cancéreuses.

Cette session encore, l’événement est un temps fort pour de nombreuses équipes françaises. « Biomarqueurs circulants, vaccins thérapeutiques, nouvelles molécules antitumorales… l’édition 2025 de l’ASCO est particulièrement riche pour l’Institut Curie, avec des présentations couvrant de nombreux types de cancers. Cette forte mobilisation illustre l’investissement des médecins et chercheurs de l’Institut, qui travaillent en synergie à travers des projets innovants », se réjouit le professeur Steven Le Gouill, directeur de l’Ensemble hospitalier de l’Institut Curie, à l'ouverture du congrès.

L’immunothérapie bouscule les standards

Dimanche 1er juin, cinq études ont été présentées, dont trois ont mis en lumière l’importance et l’efficacité de l’immunothérapie pour prévenir les rechutes dans trois types de cancers non métastasés, localisés dans la tête et le cou, l’estomac et le côlon.

La bonne nouvelle est que ces annonces concernent des cancers pour lesquels il n'y a pas d'avancée significative depuis plusieurs années, avec des chances de guérison faibles. « Les immunothérapies vont arriver de plus en plus tôt dans la prise en charge de cancers non métastatiques », souligne, au Monde, Frédérique Penault-Llorca, vice-présidente d’Unicancer, la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer en France.

Dans le cadre du cancer de la tête et du cou, une grande étude a recruté 666 patients atteints de lésions du pharynx, de la bouche et du larynx, dont des Français. Divisés en trois groupes, et après la chirurgie, l'un recevait le traitement standard actuellement disponible, le second obtenait une radiochimiothérapie, et le troisième une immunothérapie de la famille des anti-PD1, associée au traitement standard.

Résultat : les chances de survie sans récidive étaient 24 % plus élevées chez ceux ayant reçu l'immunothérapie. « C’est une avancée majeure qui va changer les pratiques d’ici à quelques années », se réjouit sur France Info le Dr Yungan Tao, de l'Institut de cancérologie Gustave-Roussy de Villejuif.

Une simple prise de sang pour diagnostiquer les rechutes

L’autre tournant de ce congrès concerne le suivi des cancers du sein. Dans près de 40 % des cancers du sein hormonodépendants métastatiques, une résistance aux traitements survient suite à l’apparition d’une mutation du récepteur aux œstrogènes. Bonne nouvelle : cette mutation est détectable dans le sang.

La biopsie liquide permet de cibler des traces biologiques de cancer plusieurs mois avant que les mutations génétiques ne provoquent une nouvelle progression. Cette technologie, portant le nom d’ADN tumoral circulant, permettrait de changer d’hormonothérapie ou de la combiner à un médicament inhibant le cycle cellulaire, afin de réduire le risque d’évolution de la tumeur.

L’étude Serena-6, menée par l’Institut Curie, a regroupé 3 000 patientes suivies par prise de sang tous les deux à trois mois, dont 315 ont développé une mutation dans le sang, sans réévolution du cancer. Elles ont été réparties en deux groupes : un premier standard, qui a continué son traitement, et un second expérimental, qui a reçu le camizestrant d’AstraZeneca et un inhibiteur du cycle cellulaire.

Les patientes recevant ce nouveau médicament ont vu « leur risque d’évolution du cancer diminuer de 56 %, repoussant d’environ six mois en moyenne le temps jusqu’à une première réévolution. Le taux de survie sans progression était de 60,7 % à 12 mois pour les patientes ayant reçu du camizestrant, contre 33,4 % chez les autres. La survie sans progression à 24 mois fleurait les 29,7 % contre 5,4 % », détaille l’Institut Curie dans un communiqué. « C’est une première dans le cancer du sein, [et] peut s’extrapoler au-delà de ce cancer », a estimé devant la presse François-Clément Bidard, spécialiste de la biopsie liquide.

Le vaccin thérapeutique, une nouvelle ère dans le traitement des cancers ORL

Une autre innovation présentée par le professeur Christophe Le Tourneau, oncologue médical, chef du Département des essais cliniques précoces de l’Institut Curie et responsable de l’oncologie ORL, apporte de l’espoir aux patients atteints de cancer de la tête et du cou : le vaccin thérapeutique.

Lors d’un essai de phase 1, 33 patients atteints d’un carcinome épidermoïde localement avancé mais opérable ont été tirés au sort pour recevoir, soit des doses hebdomadaires de ce vaccin, soit aucun vaccin. Tous avaient préalablement obtenu une rémission complète de leur tumeur après le triptyque chirurgie, radiothérapie et chimiothérapie.

Résultat : aucun des patients ayant reçu le vaccin n’a rechuté. Ce qui n'est pas le cas du 2ème groupe. Pour ces derniers, les scientifiques observent près de 20 % de récidives. « Ces résultats suggèrent que le vaccin thérapeutique TG4050 pourrait fortement réduire le risque de rechute chez des patients opérés de cancers ORL, et des essais plus vastes sont en cours pour confirmer ces résultats », se réjouit, dans un communiqué de l'Institut Curie, le Pr Christophe Le Tourneau. « L’évolution du paysage clinique dans les cancers ORL est très dynamique. La vaccination thérapeutique individualisée est un vrai espoir pour ces patients atteints de ces cancers, et nous avons hâte d’aller plus avant dans le développement de ce vaccin personnalisé et extrêmement novateur. »