Cancer du sein : l’éclairage nocturne augmenterait le risque chez les femmes ménopauséesIstock
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L’éclairage nocturne pourrait être un facteur de risque du cancer du sein, d'après une étude publiée le 2 juin 2020 dans l'International Journal of Cancer.

L’éclairage nocturne : un facteur de risque du cancer du sein chez les femmes ménopausées

Bien que cette nouvelle paraisse étonnante, l’éclairage nocturne pourrait bel et bien être nocif pour les femmes.

Dans cette étude, les chercheurs ont analysé, de nuit, la lumière extérieure de plusieurs résidences, estimée à partir de données satellites. Ils ont ensuite observé les effets de cet éclairage auprès de 186 981 femmes ménopausées. Le suivi a duré 16 ans.

Or, d'après leurs résultats, le taux maximal d'exposition à cette lumière entraînait chez les femmes ménopausées 10% de risques en plus de développer un cancer du sein (pendant le suivi).

Mais pourquoi la lumière nocturne entraînerait-elle davantage de cancers du sein ?

Cet effet pourrait être lié à une perturbation du rythme circadien, horloge biologique de l’organisme, elle-même guidée par les variations lumineuses au cours d’une période de 24h. Ce rythme agit sur de nombreuses activités physiologiques dont la prise alimentaire, les sécrétions hormonales et l’alternance de la veille et du sommeil.

En outre, d'après les scientifiques, "l'association semble être plus forte pour le cancer du sein positif aux récepteurs aux œstrogènes que pour le cancer ER-négatif".

Toutefois, malgré ces pistes, l'auteur principal de l'étude, Rena Jones, PhD, MS, du National Cancer Institute, a déclaré "qu'il sera important pour les études futures de mesurer avec précision l'exposition à la lumière la nuit (...) à l'aide d'une combinaison de mesures objectives, de questionnaires soigneusement conçus et d'appareils de mesure personnels".

Par ailleurs, "la relation entre l'éclairage et le risque de cancer du sein peut différer selon les caractéristiques individuelles, telles que le tabagisme, la consommation d'alcool, la durée du sommeil et l'IMC, et l'environnement du quartier", ajoutent les chercheurs.

Cancer du sein : une dérégulation de la mélatonine en cause

En 2007, le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) classait le travail de nuit comme "cancérogène probable". En effet, d'après l'organisme, il pourrait être lié à une perturbation du rythme circadien, qui favoriserait l’augmentation de la synthèse d’œstrogènes.

Dans un autre rapport, cette fois-ci publié en juin 2016, l’Anses évoquait plusieurs études allant dans le sens d’un risque accru de cancer du sein chez les travailleuses de nuit, en particulier les infirmières, mais avec des éléments de preuves encore limités. D’autres travaux suggèrent aussi un sur-risque d’autres cancers, dont celui de la prostate, hormonodépendant comme le cancer du sein.

Certaines études, menées chez l’animal, vont encore plus loin : elles évoquent l’hypothèse d’une dérégulation de la mélatonine, synthétisée par la glande pinéale - à la base du cerveau.

La production de cette hormone fluctue au cours de la journée, avec un pic au cours de la nuit. Or la mélatonine, qui agit sur certains récepteurs hormonaux, pourrait être impliquée dans l’apparition de cancers hormonodépendants.

Lumière bleue : elle peut augmenter vos risques d'avoir un cancer du sein ou de la prostate

Lumière bleue : elle peut augmenter vos risques d'avoir un cancer du sein ou de la prostate© Istock

L'augmentation de la lumière artificielle la nuit dans les villes a modifié les niveaux de lumière naturelle dans l'environnement nocturne et étendu les activités humaines jusqu'aux heures plus sombres. Or, ce changement n'est pas sans conséquences.

Selon une étude espagnole publiée le 23 avril 2018 dans la revue Environmental Health Perspectives (EHP), l’éclairage nocturne, en particulier les longueurs d’onde bleues, pourrait être lié au risque de cancers hormonodépendants tels que ceux du sein et de la prostate.

Pour en arriver à cette conclusion, l’équipe de Manolis Kogevinas, de l’Institut de santé globale de Barcelone, a analysé 1219 femmes atteintes d’un cancer du sein et 623 hommes atteints d’un cancer de la prostate (comparés à 2264 personnes placebo), vivant à Madrid et à Barcelone.

Pour chacun d’entre eux, ils ont analysé l’exposition à l’éclairage nocturne, qu’il soit extérieur (dans la rue, selon des photographies prises par la Station spatiale internationale, ISS), ou intérieur (dans la chambre, déclaré par la personne).

La lumière bleue perturbe la production de mélatonine

L’effet le plus marquant était observé avec l’exposition à la lumière bleue, celle qui perturbe le plus la production de mélatonine –et qui est notamment émise par les LED.

Chez les personnes les plus exposées, le risque de cancer de la prostate est accru de 105% chez les hommes, celui de cancer du sein de 47% chez les femmes.

Les chercheurs ont par ailleurs trouvé un risque accru de cancer de la prostate (risque accru de 179%) chez les hommes dormant dans des chambres très illuminées, mais rien de tel pour le cancer du sein chez les femmes.

Les autres effets du travail de nuit

Les autres effets du travail de nuit© Istock

Les horaires atypiques, et tout particulièrement le travail de nuit, peuvent constituer un facteur de risque pour les travailleurs.

En effet, comme expliqué précédemment, l’organisme est soumis à un rythme dit circadien, programmé par une horloge interne, et qui agit sur de nombreuses activités physiologiques.

L’existence de ce rythme traduit la nécessité pour certaines activités physiologiques de se produire à un moment précis de la journée et pas à d’autres.

La période du rythme circadien est proche de 24 heures, mais sa phase peut se décaler. En effet, il est influencé par des facteurs extérieurs comme la lumière, l’exercice, les contacts sociaux, les prises alimentaires qui peuvent provoquer des états de désynchronisation.

Cette perturbation des rythmes biologiques peut se manifester par l’apparition d’effets sur la santé, comme des troubles mentaux, du diabète, un AVC...

En 2016, l’ANSES a produit un rapport d’expertise collective qui fait état des connaissances scientifiques actuelles sur ces effets. Ils y sont catégorisés selon leur risque en 3 groupes : avérés, probables et possibles.

  • Les risques avérés : ils correspondent aux troubles du sommeil, et aux troubles métaboliques. Le travail posté et/ou de nuit est souvent associé à une diminution de la durée du sommeil ce qui aboutit à un déficit chronique de sommeil (réduction de 1 à 2 heures de sommeil par jour.)
  • Les risques probables : ils sont représentés par les effets sur la santé psychique, sur les performances cognitives, sur l’obésité et la prise de poids, ainsi que le diabète de type 2 et les maladies coronariennes (ischémie coronaire et infarctus du myocarde). Les troubles de l’humeur, l’augmentation de la dépression, de l’anxiété, de l’irritabilité, ainsi que des troubles de la personnalité sont fréquemment rapportés par les travailleurs.
  • Les risques possibles : les dyslipidémies, l’hypertension artérielle et les accidents vasculaires cérébraux représentent des effets possibles sur la santé liés au travail de nuit. En effet, il existe de nombreuses imprécisions concernant les études scientifiques à leur sujet et qui ne permettent donc pas de conclure de façon "affirmative" quant à l’existence d’un lien avec le travail de nuit.
Sources

Association between outdoor light at night & breast cancer risk among postmenopausal women, EurekAlert!, 3 juin 2020.

Outdoor light at night and postmenopausal breast cancer risk in the NIH‐AARP diet and health study, International Journal of Cancer, 2 juin 2020.

Evaluating the Association between Artificial Light-at-Night Exposure and Breast and Prostate Cancer Risk in Spain (MCC-Spain Study), EHP, 23 april 2018.

Effets sur la santé et accidents, INRS.

mots-clés : nuit, lumiere bleue, femmes
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