Et si le syndrome du côlon irritable se soignait… chez votre psy ?
Et si, pour soulager vos maux de ventre, il fallait… s’allonger sur un divan plutôt que sur la table d’un gastro-entérologue ? C’est la piste sérieuse explorée par une étude publiée le 9 octobre 2025 dans la revue scientifique The Lancet Gastroenterology & Hepatology. Ses auteurs affirment que certaines thérapies comportementales, habituellement pratiquées par des psychologues, pourraient soulager les symptômes du syndrome du côlon irritable (SCI), un trouble digestif qui empoisonne la vie de près d’un adulte sur dix.
Cette maladie handicapante provoque des douleurs abdominales, ballonnements, diarrhées ou constipation alternées… Ces symptômes reviennent souvent sans qu’aucune lésion ne soit visible à l’examen. Ce qui explique pourquoi il n’existe pas à ce jour de traitement efficace pour la soigner. “Les conseils diététiques et les médicaments comme les laxatifs peuvent aider, mais parfois, les symptômes persistent, ce qui a conduit les chercheurs à explorer de nouvelles pistes, comme la transplantation fécale”, précise New Scientist.
Pendant longtemps, on a accusé l’alimentation, la flore intestinale ou le stress. Mais de plus en plus d’études montrent que le SCI serait un trouble du dialogue entre le cerveau et l’intestin, ce qu’on appelle l’axe “cerveau-intestin”. Autrement dit, nos émotions et notre système digestif seraient bien plus liés qu’on ne le croyait.
Des thérapies efficaces
Pour tester cette idée, des chercheurs ont passé en revue 67 essais cliniques rassemblant au total 7 441 participants. Tous portent sur les thérapies comportementales appliquées au SCI : thérapie cognitivo-comportementale (TCC), hypnothérapie, gestion du stress, relaxation… Leur conclusion : ces approches dirigées vers l’intestin améliorent significativement les symptômes chez de nombreux patients, parfois autant que certains traitements médicamenteux.
Les participants traités par ce type de thérapie déclaraient moins de douleurs, une meilleure qualité de vie, et une réduction notable de l’anxiété liée à leurs troubles digestifs. Un signe clair, selon les auteurs, que le cerveau peut aider à calmer les intestins.
Ce n’est pas dans la tête, mais le cerveau compte
Les chercheurs insistent, le syndrome du côlon irritable n’est pas “psychologique”. Les douleurs sont bien réelles. Mais la manière dont le cerveau interprète et amplifie ces signaux joue un rôle crucial. « Travailler sur le stress, la peur d’avoir mal ou les pensées catastrophiques permet souvent de briser le cercle vicieux », résument les auteurs.
C’est ce qu’expliquent les thérapeutes. Beaucoup de patients vivent dans la crainte permanente d’une crise, évitent certains aliments ou situations sociales, et finissent par aggraver leurs symptômes. Les thérapies comportementales aident à désamorcer cette spirale en modifiant la perception de la douleur et en restaurant la confiance dans le corps.
Une nouvelle voie de traitement
Dans les hôpitaux, de plus en plus d’équipes “pluridisciplinaires” s’organisent : gastro-entérologue, nutritionniste et psychologue travaillent ensemble pour accompagner les patients. Car le traitement du SCI reste souvent un casse-tête. Les régimes (sans FODMAPs, sans gluten...) soulagent certains, mais pas tous. Les médicaments agissent sur les symptômes, pas sur la cause. Les thérapies comportementales, elles, proposent une approche globale, qui s’attaque à la fois au mental et au ventre.
Et les résultats sont suffisamment solides pour que le Lancet parle d’une “option thérapeutique à part entière”, surtout pour les personnes qui n’ont pas trouvé de soulagement avec les traitements classiques.
“Mais il faudra de nouvelles études comparant les thérapies numériques à celles en présentiel avant de pouvoir mettre à jour les recommandations”, nuance dans New Scientist Alexander Ford, qui a piloté ces travaux. Il pense que cela pourrait prendre encore cinq ans.