Les riverains proches de vignes sont plus exposés que les autres à ces pesticides
Peu surprenants mais inédits, les résultats de l’enquête nationale PestiRiv viennent d’être publiés par l’Anses et Santé publique France. L’objectif : mesurer l’exposition aux pesticides des habitants vivant près des zones viticoles. Et le message est clair. « Notre recommandation la plus importante : réduire au strict nécessaire le recours aux produits phytopharmaceutiques », insiste lors de la conférence de presse qui s’est tenue le 15 septembre, Benoît Vallet, directeur général de l’Anses.
Lancée fin 2021 dans six grandes régions viticoles d’Occitanie, de Nouvelle-Aquitaine, de Provence-Alpes-Côte d’Azur, d’Auvergne-Rhône-Alpes, de Bourgogne-Franche-Comté et du Grand Est, l’étude a mobilisé près de 2 700 participants, dont 742 enfants. Deux groupes ont été suivis : des foyers vivant à moins de 500 mètres de vignes et d’autres installés à plus d’un kilomètre de toute culture.
Pour mesurer l’imprégnation, les chercheurs ont recherché 56 substances dans une impressionnante série d’échantillons : 3 484 urines, 1 980 cheveux, 1 557 d’air ambiant, 333 d’air intérieur, 790 de poussière domestique, mais aussi des aliments du jardin. Deux périodes ont été scrutées : l’hiver, quand les traitements sont rares, et le printemps-été, lorsque les pulvérisations battent leur plein. « Elle est l’une des cultures qui recourent le plus aux produits phytopharmaceutiques, tant en fréquence de traitement qu’en quantité », rappelle Clémence Fillol de Santé publique France.
Des contaminations logiquement plus fortes près des vignes
Les résultats sont parlants : « Dans tous les types d’échantillons étudiés, l’exposition aux pesticides est globalement plus importante pour les personnes vivant à proximité des vignes », précisent les auteurs. Dans l’air ambiant, les niveaux de contamination sont jusqu’à 12 fois plus élevés qu’en zone éloignée. Dans les poussières, ils atteignent parfois 11 fois plus. Les analyses d’urine révèlent entre 15 % et 45 % de contamination supplémentaire.
Les enfants de 3 à 6 ans sont les plus touchés. « Ils peuvent avoir des comportements qui les exposent davantage, en ayant par exemple davantage de contacts avec le sol. Leur organisme élimine aussi moins bien les polluants », explique Clémentine Dereumeaux de Santé publique France. Chez eux, la période de traitement entraîne une augmentation d’imprégnation pouvant atteindre 60 %.
Pas d’alerte sanitaire immédiate
Pour autant, l’Anses se veut rassurante. « Pour chaque produit détecté, nous sommes dans les marges prévues par l’autorisation de mise sur le marché », souligne Benoît Vallet. Charlotte Grastilleur, directrice générale déléguée à l’Anses, confirme : « La culture a une influence sur la charge corporelle », mais « les seuils constatés ne relèvent pas de l’alerte sanitaire ». Les agences rappellent que PestiRiv « ne livre pas d’enseignements spécifiques sur les risques associés aux expositions observées ». Une étude de santé suivra.
Des limites mais un signal clair
L’étude ne permet pas de relier directement l’exposition mesurée à des effets sanitaires et n’offre pas de comparaison fine entre régions ou entre viticulture conventionnelle et biologique. « Faute de données, il n’est pas possible d’associer les niveaux d’imprégnation que nous avons relevés à des événements de santé », reconnaît Benoît Vallet.
Des gestes simples et une stratégie nationale
Malgré ces limites, le message est net : « Les produits phytosanitaires sont toxiques pour le vivant », rappellent l’Anses et Santé publique France. Elles appellent à « une mise en œuvre ambitieuse » de la stratégie nationale Ecophyto 2030, afin de réduire « au strict nécessaire » l’usage des pesticides.
En attendant, elles recommandent d’informer les riverains avant chaque traitement « par exemple en fermant les fenêtres ou en rentrant le linge » et de multiplier les précautions : se déchausser en entrant, nettoyer les sols avec une serpillière, passer l’aspirateur chaque semaine, éplucher fruits et légumes du jardin, limiter la consommation d’œufs de poulaillers domestiques en zones agricoles ou encore installer une ventilation mécanique contrôlée.
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Conférence de presse Santé Publique France et l'Anses le 15 septembre 2025