Les hommes préfèrent rester coincés dans les embouteillages plutôt que de parler de leur prostate !
Les questions qui peuvent toucher à leur santé mentale et celles qui concernent ce qu’il considèrent comme étant leur intimité (leur prostate par exemple) sont des sujets qui restent tabous pour un grande majorité des hommes.
Une nouvelle enquête de l’hôpital universitaire d’Orlando en Floride au Etats-Unis révèle que plus d'un tiers des hommes (38 %) préféreraient subir des situations stressantes, comme la défaite de leur équipe lors d'un match important ou les embouteillages, plutôt que de parler de leur santé prostatique ! Ce sondage a été conduit en septembre dernier par Ipsos sur un échantillon de 1010 hommes américains de 18 ans et plus et montre à quel point, encore aujourd’hui, certaines questions de santé sont éludées lors des consultations.
Et pourtant, 60 % des hommes de 60 ans et jusqu’à 80 % des hommes de 80 ans souffrent d’hypertrophie bénigne de la prostate, une affection particulièrement handicapante au quotidien qui se traduit par des envies fréquentes et urgentes d'uriner ou des difficultés à uriner, jour et nuit. Ceci est d’autant plus dommage que, typiquement, l’hypertrophie bénigne de la prostate se soigne bien et que l’on peut récupérer un confort urinaire fort appréciable. Pour d’autres pathologies pouvant toucher la prostate ou d’autres organes génitaux ou urinaires, le retard de diagnostic peut coûter encore plus cher. “Alors qu'ils représentent 52% des cancers diagnostiqués chaque année, les hommes sont moins nombreux que les femmes à participer aux campagnes de dépistage et plus globalement à prendre soin d'eux” indique La Ligue contre le Cancer.
Santé mentale : pourquoi les hommes sont-ils si frileux à l’idée de se confier ?
“Toutes tranches d'âges confondues, le taux de suicide des hommes est constamment supérieur à celui des femmes, trois fois supérieur en moyenne. Pourtant, seuls 30% des Français qui consultent un psy sont des hommes” rappelle France Info qui a mené une enquête sur la santé mentale des hommes.
Pourquoi les hommes ont-ils plus de difficulté à prendre soin de leur santé mentale ? “L’adhésion aux normes masculines traditionnelles ou aux représentations sociales de la masculinité (contrôle émotionnel, autosuffisance, stoïcisme, prise de risque) est corrélée avec une plus faible intention de demander de l’aide, avec plus d’auto-stigmatisation et à une remise à plus tard de la consultation”, explique Boris Charpentier, psychologue, que nous avons interrogé.
Ces conduites de déni et de minimisation des besoins de soin entretiennent le retard de l’accès aux soins, tout comme la peur d'être perçu comme faible qui constitue un frein majeur.
Concernant stricto sensu leur santé mentale, les “hommes identifient moins bien les troubles, privilégient des termes somatiques (« fatigue », « douleurs », « stress ») et consultent plus tardivement, ce qui retarde l’orientation vers le bon soin”, poursuit le psychologue. “Les hommes ont une préférence marquée pour les solutions concrètes et orientées problèmes et plus de difficulté à nommer les affects.”
Santé mentale des hommes : comment lever les freins ?
“Le langage et les rituels de la consultation peuvent être perçus comme peu adaptés, indique encore Boris Charpentier. Les hommes sont plus à l’aise avec des objectifs, des tâches et des indicateurs de progression explicites.” C’est donc toute une approche qu’il faut revoir pour convaincre les hommes à consulter, et ce quel que soit leur âge, les plus jeunes n’étant pas nécessairement beaucoup plus à l’aise sur ces questions que leurs aînés. “Rendre explicites les objectifs, établir des plans de séances et les bénéfices qui peuvent être attendus, utiliser des approches actives (TCC, ACT, EMDR)” sont des solutions qui pourraient faciliter l’adhésion des hommes, d’après Boris Charpentier. Parallèlement, l’évolution des mentalités, encore timide mais qui devrait s’améliorer à la faveur des campagnes de sensibilisation, permettra de libérer un peu plus la parole.
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Communiqué de presse Hôpital Orlando
Interview Boris Charpentier