
« Je ne supporte plus ses remarques ! », « Il ne m’écoute jamais », « Elle m’agace pour un rien »…
Qui n’a jamais prononcé ces phrases, un soir où les nerfs lâchent après une journée trop pleine ? Passé 40 ans, avec la charge mentale, les agendas surchargés et les liens qui se densifient ou s’effilochent, les occasions de s’énerver ne manquent pas. Parfois, ça part pour un détail, une tasse oubliée, un ton un peu sec, et c’est l’explosion.
Mais si ces disputes n’étaient pas un naufrage et plutôt un signal à entendre, une chance de repartir du bon pied ?
Et si la dispute était un souffle vital ?
C’est la conviction de Nicole et Bernard Prieur. Dans leur livre Disputez-vous bien !, ils nous invitent à changer de regard : la dispute n’est pas l’ennemie de la relation, elle en est un souffle, une respiration, un indicateur précieux. Elle nous alerte : quelque chose ne va plus, un besoin n’est plus entendu, un équilibre s’est perdu. Bref, elle nous pousse à bouger.
Le vrai danger, ce n’est pas d’hausser la voix un soir de fatigue. C’est d’accumuler les non-dits, les rancunes larvées qui minent le lien jour après jour.
Se disputer, c’est dire : « J’y crois encore »
Une dispute n’est pas toujours un drame, loin de là. Pour les Prieur, c’est souvent le signe qu’on espère encore quelque chose de l’autre. Un cri du cœur, une façon maladroite mais sincère de dire : « Regarde-moi. Entends-moi. Je veux qu’on avance ensemble. »
Le vrai danger, ce n’est pas d’hausser la voix un soir de fatigue. C’est d’accumuler les non-dits, les rancunes larvées qui minent le lien jour après jour. Ce sont les disputes en boucle qui ne mènent nulle part. Ce sont les explosions radicales qui laissent derrière elles un champ de ruines, des mots qu’on regrette, des liens brisés.
La dispute saine : un tremplin et non un piège
Mais alors, à quoi ressemble une bonne dispute ? À une dispute qui ne cherche pas à écraser l’autre. Qui ne vise pas à « gagner », mais à se retrouver. C’est celle qui permet de dire stop à ce qui fait mal, de poser ses limites, d’exprimer ce qui compte.
Dans une bonne dispute, on apprend à écouter la colère, au lieu de s’y noyer. Parce qu’au fond, ce n’est pas « tu ne fais jamais la vaisselle » qui est dit. C’est « je me sens seul(e), j’ai besoin de ton aide ». Derrière chaque reproche, il y a souvent une blessure qu’il faut oser regarder.
Parce qu’à cet âge, les relations se sont installées, les compromis d’hier peuvent devenir des fardeaux, et les tensions non réglées prennent racine. Mais surtout, parce qu’il est encore temps. Temps de désamorcer les rancunes, de redonner de l’air à une relation, de rouvrir un dialogue qu’on croyait perdu.
Ce qui compte, ce n’est pas de vivre sans conflits. C’est d’apprendre à les traverser ensemble, avec lucidité, bienveillance, et parfois un peu d’humour.
Alors oui, la dispute fait partie de la vie. « Le sismogramme d’un lien ne peut pas être plat », rappellent les auteurs. Ce qui compte, ce n’est pas de vivre sans conflits. C’est d’apprendre à les traverser ensemble, avec lucidité, bienveillance, et parfois un peu d’humour. Car se disputer, au fond, c’est encore aimer fort.
Mais alors, comment se disputer de manière saine et constructive ?
Nicole et Bernard Prieur livrent dans leur ouvrage plusieurs pistes précieuses. D’abord, ils invitent à reconnaître le temps d’incubation : ce moment où s’accumulent les petites contrariétés, souvent ignorées, jusqu’à la goutte de trop. Mieux les repérer permet d’agir avant que tout explose.
Ensuite, il est essentiel de nommer ce que l’on ressent vraiment : derrière un reproche se cache souvent un besoin, une peur, une fatigue. Mettre des mots clairs sur ses émotions aide à désamorcer les malentendus. Autre astuce : éviter de généraliser : « tu fais toujours… », « tu ne fais jamais… », car ces formules ferment la discussion. Enfin, la dispute ne doit pas être une joute, mais un moment de vérité respectueuse, où chacun reste à l’écoute, accepte de se remettre en question, et vise un terrain d’entente. Parfois, une pause est salutaire : prendre du recul pour éviter que l’émotion déborde. Comme le soulignent les auteurs, une bonne dispute n’a pas besoin d’être bruyante pour être efficace, elle a besoin d’être vraie.
Alors la prochaine fois que la moutarde vous monte au nez, et si vous respiriez un bon coup afin de transformer ce moment en occasion de grandir à deux ?
Nicole Prieur et Bernard Prieur, Disputez-vous bien ! Pour mieux vous entendre avec vos proches, Robert Laffont, 2025. 19,00 €