Réduire la taille et les colorer en rose : quand les chaussures de course ne sont pas adaptées aux femmes
Encore une étude où les femmes n’ont pas été conviées. Depuis des décennies, les chaussures de course pour femmes reposent sur un paradigme largement critiqué. On prend un modèle « masculin », on le réduit en taille, on lui ajoute parfois une teinte rose. Et le tour est joué. C’est ce que les chercheurs qualifient de « shrink it and pink it ». Une nouvelle recherche menée au sein de Simon Fraser University (Canada) et publiée le 14 octobre 2025 dans la revue BMJ Open Sport & Exercise Medicine relève que ce procédé ne suffit évidemment pas. Les besoins des coureuses évoluent avec l’âge, l’expérience, la grossesse, et ne sont pas correctement pris en compte.
Des chaussures conçues à l’image « masculine »
En clair, la morphologie féminine, cou-de-pied, largeur de l’avant-pied, talon, n’a jamais été intégrée comme point de départ. « Nos conclusions mettent en évidence une lacune importante dans la conception des chaussures de course, qui s'est traditionnellement appuyée sur l'anatomie et la biomécanique masculines », déclarent les auteurs de l’étude.
Ce que veulent vraiment les coureuses
Pour parvenir à leurs résultats, les chercheurs ont interrogé 21 femmes âgées de 20 à 70 ans, avec entre 6 et 58 ans d’expérience de course, dont 9 avaient couru pendant ou après une grossesse. Trois grands thèmes se dégagent de leurs besoins et préférences.
Le premier : le confort et le ressenti : « En général, je choisis les chaussures qui me semblent les plus confortables, celles qui me vont comme un gant », précisent les participantes. Beaucoup recherchent une chaussure bien ajustée et un amorti adapté. Le second : la prévention des blessures : « Je pense simplement que les chaussures de course sont l'un des éléments les plus importants pour prévenir les blessures chez les coureurs », ajoutent-elles. Les coureuses ont insisté sur le fait qu’elles font confiance à des vendeurs spécialisés. Et pour finir, des chaussures adaptées au contexte : entraînement, compétition, récupération, grossesse/post-partum.
Les scientifiques notent également que les besoins évoluent avec l’âge ou certaines étapes de la vie. Le passage de « style » à « confort » : « Avant c'était plus une question de style que de confort ou d'utilité. Et puis... j'ai cherché une meilleure chaussure, une qui me convenait mieux. » Pendant ou après la grossesse : « J'ai constaté qu'après avoir eu mes enfants, mes pieds avaient beaucoup changé et que l'amorti à l'avant-pied était devenu très important. » Et en vieillissant ou avec davantage d’expérience : « ... Je préfère avoir du soutien. »
Le constat et l’appel à l’action
Le constat est clair : les chaussures actuellement proposées aux femmes ne correspondent pas pleinement à leurs besoins. « Nous recommandons fortement que l’industrie de la chaussure passe au-delà de la simple mise à l’échelle des chaussures pour hommes pour s’adapter aux pieds des femmes. Au lieu de cela, il y a un besoin de conceptions spécifiques au sexe et au genre qui s’adaptent à la morphologie distincte des pieds des femmes et à leurs constructions et préférences sociales, qui évoluent toutes tout au long de la vie », concluent les chercheurs.