
Arrêter de fumer est un choix de santé majeur, avec des bénéfices rapides et durables. Mais pour beaucoup de fumeurs, une inquiétude persiste : celle de prendre du poids. Cette crainte, bien réelle, peut freiner ou faire reculer une tentative de sevrage. Alors, est-il inévitable de grossir après avoir arrêté de fumer ? Pourquoi cela se produit-il ? Combien de temps cela dure-t-il ? Et surtout, comment peut-on l’éviter ?
Pourquoi prend-on du poids après avoir arrêté de fumer ?
Selon l’Institut national du cancer (INCa), environ 70 % des fumeurs qui arrêtent prennent du poids dans l’année qui suit. Cette prise de poids est en moyenne de 4 à 5 kg, mais peut aller jusqu’à 10 kg chez certains ex-fumeurs.
Les raisons de ce phénomène sont multiples et bien documentées :
Un métabolisme ralenti
La nicotine stimule le système nerveux sympathique, ce qui augmente légèrement le métabolisme basal. En arrêtant de fumer, on brûle environ 100 à 200 kilocalories de moins par jour, ce qui peut se traduire en quelques mois par une prise de poids si l'alimentation reste identique.
Une augmentation de l’appétit
La nicotine agit également comme coupe-faim. Son absence entraîne souvent un regain de la sensation de faim, notamment dans les premières semaines. Cette augmentation de l’appétit est souvent dirigée vers des aliments gras ou sucrés, qui procurent un réconfort immédiat.
La recherche de compensation orale
Fumer est aussi un geste. Quand on cesse de porter une cigarette à sa bouche, on a souvent besoin de remplacer ce geste par autre chose. Manger devient une compensation facile, surtout lors des moments habituellement associés à la cigarette (pause, stress, après les repas...).
Le retour du goût et de l’odorat
Une semaine après l’arrêt du tabac, les papilles gustatives et les récepteurs olfactifs commencent à se régénérer. Le goût des aliments s’intensifie, ce qui peut accroître le plaisir de manger et, par conséquent, les quantités absorbées.
Pendant combien de temps grossit-on après l’arrêt du tabac ?
La prise de poids, lorsqu’elle a lieu, se produit surtout dans les trois à six mois suivant l’arrêt. Au-delà d’un an, la majorité des ex-fumeurs stabilisent leur poids, voire en perdent.
Selon une méta-analyse publiée dans le BMJ en 2012, réalisée sur plus de 60 000 participants, la prise de poids moyenne est de 4,67 kg un an après l’arrêt du tabac. Toutefois, environ 16 % des anciens fumeurs prennent plus de 10 kg, tandis que 13 % ne prennent aucun poids, et que 10 % en perdent.
Peut-on éviter de grossir en arrêtant de fumer ?
La bonne nouvelle, c’est que prendre du poids n’est pas une fatalité. Avec une stratégie adaptée, il est tout à fait possible de maîtriser, voire d’éviter cette prise de poids.
Anticiper son sevrage
Préparer son arrêt du tabac implique aussi d’anticiper les effets secondaires possibles, dont la prise de poids. Il est recommandé de consulter un professionnel de santé (médecin généraliste, tabacologue, diététicien) pour mettre en place un double accompagnement : sevrage tabagique et prévention de la prise de poids.
Adapter son alimentation
Une alimentation équilibrée et rassasiante peut faire une grande différence. Il est conseillé de :
- Manger à heures régulières pour éviter les grignotages.
- Privilégier les fibres (fruits, légumes, légumineuses) qui prolongent la satiété.
- Augmenter les protéines, qui réduisent la sensation de faim.
- Limiter les produits transformés et les sucres rapides.
Bouger pour mieux compenser
L’activité physique est l’un des meilleurs moyens de réguler son poids et d’améliorer l’humeur. Pas besoin de programme intensif : 30 minutes de marche rapide par jour suffisent à améliorer le métabolisme et réduire les fringales.
Trouver d'autres substituts
Remplacer la cigarette par une autre gestuelle peut réduire les risques de compensation alimentaire. Certaines solutions simples fonctionnent : bâtonnets de légumes, chewing-gums sans sucre, cure-dents, objets à manipuler, respiration profonde, etc.
Utiliser les traitements nicotiniques de substitution
Les patchs, gommes, pastilles ou sprays à la nicotine permettent d’atténuer la sensation de manque et de réduire les troubles de l’appétit. Une étude publiée dans la revue Addiction (2014) montre que les substituts nicotiniques peuvent limiter la prise de poids post-sevrage, surtout s’ils sont utilisés pendant plusieurs semaines.
Témoignages : ils ont arrêté sans grossir
Stéphanie, 42 ans, ancienne fumeuse depuis 18 mois :
« Je redoutais de prendre du poids, surtout en ayant déjà fait le yoyo avec mon poids. J’ai fait appel à une diététicienne dès la première semaine d’arrêt. Elle m’a aidée à anticiper mes fringales et à construire mes repas. Résultat : je n’ai pris qu’un kilo. »
Marc, 67 ans, ex-fumeur depuis deux ans :
« Je me suis mis à la marche nordique. Chaque matin, une heure dehors. J’avais l’impression de "détoxifier" mon corps. Le sport m’a permis de ne pas grossir, mais surtout de ne pas replonger. »
Mounir, 51 ans, ancien gros fumeur :
« Les premières semaines, j’ai mâché des bâtons de réglisse, ça m’évitait de grignoter. Ensuite, j’ai commencé à cuisiner davantage. Ça m’occupait, et c’était meilleur que les snacks industriels. »
Et la cigarette électronique sans nicotine ?
Certains ex-fumeurs choisissent de vapoter sans nicotine pour ne pas grossir. En réalité, la cigarette électronique sans nicotine n’a pas d’effet sur le métabolisme ou sur l’appétit, contrairement à la nicotine. Elle peut toutefois permettre de maintenir le geste et donc de limiter les compensations alimentaires dans un premier temps.
Mais attention : elle prolonge la dépendance gestuelle, ce qui peut freiner l’arrêt total. Elle n’est pas recommandée comme stratégie de contrôle du poids en tant que telle, surtout si elle n’est pas encadrée médicalement.
Arrêter de fumer peut donc s’accompagner d’une légère prise de poids. Mais cette prise est généralement modérée, temporaire et, surtout, largement compensée par les bénéfices pour la santé : baisse du risque cardiovasculaire, amélioration de la fonction respiratoire, diminution du risque de cancers, amélioration de la peau et de la qualité de vie. Et comme le rappelle l’Assurance Maladie, un ex-fumeur sur deux retrouve son poids initial dans les 2 ans suivant l’arrêt. Mieux vaut quelques kilos en trop que des années de tabac !