
Le climat change. Les scientifiques le martèlent depuis des années. Vagues de chaleur, inondations, incendies… manifestement, il n’est pas prévu que les choses s’améliorent. Résultat : « Notre société actuelle ne pourra pas fonctionner de la même manière en 2050 », avertit Alexandre Florentin, conseiller de Paris délégué à la résilience et aux enjeux climatiques, lors d’une conférence de presse sur le thème de « Paris à 50 degrés et l’impact sur la santé ». L’hôpital ne déroge pas à la règle : de nombreux changements sont nécessaires pour continuer à bien soigner les patients.
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Cancer du sein : symptômes, dépistage, causes, traitementsPour répondre à ces préoccupations, le second volet du congrès « La santé en 2050 » s’est tenu samedi 28 juin à Lyon avec les Shifters, une association de bénévoles qui œuvre à la décarbonation de l’hôpital. Au programme : s’adapter aux pathologies de demain, repenser le système de santé, soigner autrement, mettre en place une éco-conception des soins… Tant de thématiques prises à bras-le-corps par ces personnes engagées. « Ce sont des citoyens qui comprennent les problématiques. Ils sont bénévoles mais prêts à s’informer davantage et à passer à l’action pour rendre le système de santé plus durable », explique la Dre Jane Muret, cheffe de service Anesthésie-Réanimation-Douleur à l’Institut Curie et membre du comité de développement durable de l’ESAIC.
Les pathologies de demain sont un vrai défi. La population vieillit ; en 2050, l’OMS estime que le nombre de personnes âgées de 60 ans et plus dans le monde aura doublé pour atteindre 2,1 milliards de personnes. Les patients seront donc, par définition, plus nombreux à se rendre à l’hôpital. Selon le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), 35 millions de nouveaux cas de cancers en 2050 sont attendus, soit 77 % de plus qu’actuellement. « En plus des tumeurs, ce sont toutes les maladies chroniques (cardiovasculaires, obésité, respiratoires) qui vont augmenter et auxquelles les soignants devront faire face », souligne la Dre Jane Muret.
La prévention et le juste soin au coeur de l'hôpital de demain
D’après les conclusions du Shift Project, un véritable changement culturel est nécessaire pour passer d’un modèle centré sur le soin à une approche davantage axée sur la prévention. Au-delà de l’indispensable décarbonation du secteur de la santé, il s’agit donc de renforcer la prévention et de promouvoir le juste soin. « Il ne faut plus se limiter à un système focalisé uniquement sur le traitement, mais construire une organisation de santé tournée vers l’anticipation des maladies. Au cours de ma carrière, j’ai travaillé dans la transplantation rénale. Si on avait consacré autant d’énergie à prévenir ces maladies qu’à les soigner, on aurait équilibré le système de santé », indique en 2024 sur Medscape le Pr Yvon Lebranchu, membre de l’Académie nationale de médecine.
L'hypnose pour réduire les infections urinaires
Pour soigner autrement, les thérapies non interventionnelles arrivent en première ligne. « Elles font partie des alternatives au tout médicamenteux qui sont aujourd’hui prises au sérieux dans différents congrès, et c’est une bonne chose », se réjouit la Dre Jane Muret. « En 2050, il ne sera plus possible de faire de la médecine comme celle pratiquée aujourd’hui. Ces différentes thérapies feront partie des possibilités que nous aurons pour soigner les gens », ajoute la spécialiste. Art-thérapie, hypnose : autant de solutions pour la médecine de demain. Exemple : pour la Dre Bérénice Schell, biologiste médicale et membre de l’association The Shifters, demain, l’hypnose pourrait aider à réduire les infections urinaires.
L’IA s’invite elle aussi parmi les pistes pour améliorer la prise en charge des patients. Qu’elle inquiète ou non, l’intelligence artificielle transformera en profondeur les métiers du soin dans les prochaines années, notamment pour le diagnostic et l’analyse des images médicales. « Il ne faut pas considérer cette technologie comme un substitut aux médecins, mais plutôt comme un soutien rapide pour renforcer nos capacités d’analyse », précise la Dre Jane Muret.
L'éco-conception des soins : faire autant avec moins
De leur côté, les Shifters et la communauté médicale défendent l’idée de l’éco-conception des soins : faire autant, mais en consommant moins. « L’hôpital doit rester résilient, quelles que soient les crises qu’elles soient climatiques, sociales, économiques ou géopolitiques car il doit continuer à fonctionner. La pandémie de Covid a bien montré la vulnérabilité du système », souligne Véronique Molières, directrice stratégie, développement et communication du Comité pour le développement durable en santé (C2DS). Bonne nouvelle : les soignants regorgent d’idées pour y parvenir : réduction des déchets, maîtrise de la consommation d’eau et de savon, limitation des gaz polluants… Ils se tiennent prêts à affronter cette nouvelle façon de soigner.
Conférence de presse The Shifters et la mairie de Paris et de Lyon, Congrès Santé en 2050