Cancer du poumon : un nouveau traitement contre les métastases cérébrales, bientôt disponible

Publié par Elodie Vaz
le 13/09/2025
Cancer du poumon
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Et si l’on parvenait enfin à mieux contrôler les métastases cérébrales dans le cancer du poumon ? C’est l’espoir suscité par l’adagrasib, une molécule qui vient de démontrer son efficacité dans un essai international publié dans la revue scientifique The Lancet.
 

Le cancer du poumon non à petites cellules (CPNPC) représente l’immense majorité des cancers pulmonaires. Le diagnostic de la maladie est souvent tardif : 70 à 80 % des cancers du poumon sont découverts à un stade avancé, en raison de plusieurs facteurs : symptômes peu spécifiques, inégalités géographiques et sociales… « Le dépistage représente une formidable avancée pour offrir à chacun une chance réelle face à la maladie. C’est une opportunité unique de réduire les inégalités de santé », explique le Pr Sébastien Couraud, Chef de service pneumologie de l’hôpital Lyon Sud Hospices Civils de Lyon, coordonnateur du programme pilote national IMPULSION et membre du Collectif Ensemble Nous Poumons. 

« J’ai eu beaucoup de chance. Mes symptômes ont vite été pris au sérieux. Grâce à un scanner, une opération a été déclenchée en décembre 2020, ce qui a permis de poser le diagnostic de cancer du poumon. Une prise en charge rapide qui m’a évité des traitements plus lourds comme la chimiothérapie. Cinq ans après, tout va très bien. C’est très important pour moi de soutenir le lancement du dépistage du cancer du poumon en France à l’occasion de la journée mondiale du poumon ce 25 septembre. Mon histoire témoigne de l’importance d’aller vite, de chercher plutôt que de fermer les yeux. », témoigne Catherine Matausch, journaliste et ancienne patiente atteinte d’un cancer du poumon.

Mais le diagnostic précoce ne suffit pas à lui seul. Chez environ 14 % des patients, la maladie est liée à une mutation spécifique du gène au nom barbare : le KRASG12C. Longtemps, cette anomalie génétique a résisté à tous les traitements, au point d’être qualifiée de « mutation inciblable ». Résultat : la prise en charge devient limitée, surtout quand la maladie progresse après les traitements de première intention comme la chimiothérapie et l’immunothérapie.

L’essai KRYSTAL-12 : une étude mondiale

Ces dernières années, la médecine a bouleversé l’oncologie, avec des thérapies capables de bloquer des anomalies génétiques bien précises. C’est dans ce contexte qu’a été lancé KRYSTAL-12, un essai de phase III mené dans 230 centres à travers 22 pays. Plus de 450 patients porteurs de la mutation KRASG12C et en rechute après un premier traitement y ont participé. Deux groupes ont été constitués : l’un a reçu l’adagrasib (par voie orale), l’autre le traitement de référence, le docétaxel, une chimiothérapie bien connue.

Des résultats significatifs

Les conclusions publiées le 9 août 2025 dans la revue scientifique The Lancet sont claires : l’adagrasib fait mieux que le traitement standard. La survie sans progression atteint 5,5 mois avec l’adagrasib, contre 3,8 mois avec le docétaxel, soit une réduction de 42 % du risque de progression ou de décès. Autre indicateur fort : le taux de réponse (réduction de la taille de la tumeur) grimpe à 32 % sous adagrasib, contre seulement 9 % avec le docétaxel. Dans trois cas, la tumeur a même complètement disparu. 

Un bénéfice inédit sur les métastases cérébrales

Au-delà de ces chiffres, un point suscite particulièrement l’enthousiasme des spécialistes : l’efficacité observée sur les métastases cérébrales, l’une des localisations les plus fréquentes. Avec l’adagrasib, le taux de réponse cérébrale est de 24 %, contre 11 % avec le docétaxel. Le contrôle de la maladie dans le cerveau atteint 82 % contre 56 %. 

« C’est la première fois qu’un inhibiteur de KRASG12C montre une activité aussi prometteuse dans le cancer du poumon non à petites cellules. Ces résultats ouvrent des perspectives majeures, car ils indiquent qu’il est possible non seulement de contrôler la maladie systémique, mais aussi d’agir efficacement sur les métastases cérébrales », souligne dans un communiqué de l’Institut Gustave Roussy, le Pr Fabrice Barlesi, directeur général du centre de cancérologie et premier auteur de l’étude.

Une nouvelle étape pour la prise en charge

L’adagrasib n’arrive pas de nulle part. Déjà évalué dans l’essai KRYSTAL-1, il avait montré des signaux encourageants, ce qui lui a valu une autorisation de mise sur le marché accélérée aux États-Unis, en Europe et au Royaume-Uni. Les résultats de KRYSTAL-12 confirment et renforcent sa place dans l’arsenal thérapeutique. « L’adagrasib offre une réponse plus durable que le docétaxel, y compris au niveau cérébral, et retarde significativement la progression de la maladie », conclut le Pr Barlesi.

Et après ?

De nouveaux essais sont déjà en cours, notamment à Gustave Roussy, pour tester l’adagrasib plus tôt dans la prise en charge, en association avec la chimiothérapie et l’immunothérapie. L’objectif : offrir dès la première ligne de traitement une stratégie plus efficace contre ces cancers du poumon difficiles à traiter.

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