
Certains la nomment le second printemps d’une femme. Mais la ménopause n’est pas toujours synonyme de floraison. Bien au contraire. « Elles sont nombreuses à passer la porte de mon cabinet pour retrouver une libido », constate la Dre Anne De Kervasdoué, médecin gynécologue et autrice du livre La vie intime des femmes, paru aux éditions Odile Jacob en juin 2021. Un ouvrage qui accompagne la femme dans cette étape cruciale de la vie. Pour cette spécialiste, la ménopause ne doit pas être vécue comme une fatalité. « Il existe de nombreux moyens pour retrouver du plaisir », explique-t-elle.
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Cancer du sein : symptômes, dépistage, causes, traitementsLe Larousse définit la ménopause comme la « cessation de l'activité des ovaires chez la femme, vers 50 ans, caractérisée notamment par l'arrêt définitif de la menstruation ». Un arrêt de production qui génère de nombreux symptômes, dont la baisse de la libido. « Cette baisse est due à l'arrêt de fonctionnement des ovaires et à la chute du taux des œstrogènes et des hormones mâles fabriquées par l’ovaire », explique la médecin gynécologue.
La faute aux oestrogènes
L'œstrogène est l'hormone responsable de la libido, au même titre que la testostérone, que les ovaires libèrent également. Lorsque ces niveaux d'hormones commencent à baisser, les femmes voient leur désir sexuel se modifier.
Perte ou baisse de libido et sécheresse vaginale chez la femme
La diminution ou la perte de la libido n’est pas le seul frein à une sexualité épanouie. La sécheresse des muqueuses et la douleur qu’elle peut provoquer pendant le rapport sont des facteurs à prendre en compte. « L'orifice vaginal se rétrécit, les muqueuses s’amincissent et s’assèchent. Résultat : la pénétration devient plus laborieuse », souligne la Dre De Kervasdoué.
S’ajoutent à ce tableau d'autres manifestations telles que la fatigue, troubles du sommeil, bouffées de chaleur, sueurs nocturnes, manque de disponibilité pour le sexe, baisse de moral, sautes d'humeur, et douleurs articulaires… bref, un tableau assez sombre pour des femmes modernes.
Et il est bien là le problème. Une femme de 50 ans aujourd’hui reste jeune. Elle travaille, elle élève ses enfants, certains encore en bas âge. Bref, l’idée d’une absence de vie sexuelle peut faire peur.
Ménopause et sexualité épanouie
Selon la Dre Anne De Kervasdoué, tous ces défis liés à la ménopause ont des solutions, et il existe de nombreuses sources médicamenteuses et non médicales pour aider les femmes à continuer à avoir une vie sexuelle active, trouver plus de plaisir, conserver une confiance en soi et rétablir un état émotionnel stable.
La première information à connaître : la fréquence de l’activité sexuelle permet de conserver l’envie. « La seule façon d’éviter ce tableau sinistre, c’est de continuer à avoir des rapports sexuels, de stimuler le désir et de continuer à solliciter le vagin. Il y aura moins de problèmes si on a des rapports réguliers », précise-t-elle.
Pour raviver la flamme et le désir, la Dre Anne De Kervasdoué conseille de laisser travailler son imagination. « Pour relancer la libido, il faut retrouver du plaisir, et à ce moment-là l'envie peut revenir. Pour y parvenir, tout est possible : la lecture, visualiser des scènes qui vous excitent. Le compagnon a d’ailleurs un rôle très important à jouer à ce moment-là », précise la spécialiste de la santé féminine.
Elle insiste également sur les préliminaires et l’exploration du plaisir sans pénétration. « Il faut continuer à exciter une femme pour l’aider à libérer ses propres lubrifiants. Dans ce cas, les préliminaires peuvent être intéressants », explique-t-elle. Mais attention cependant en cas de sécheresse vaginale. « L’activité purement génitale devient pénible lorsque la muqueuse est sensible. Je suggère l'approche des zones érogènes dans le reste du corps et ensuite, tout doucement, le partenaire peut stimuler la vulve. »
Les traitements naturels disponibles
Si la sécheresse vaginale affecte la vie sexuelle, la gynécologue suggère l’introduction d'un traitement local. « Il existe aujourd’hui une grande panoplie de crèmes et d’ovules. Il y a des lubrifiants, des hydratants, l'acide hyaluronique, des huiles essentielles et des crèmes à base d’hormones. Si on alterne régulièrement ces produits, les muqueuses restent en bon état et la pénétration n'est plus douloureuse. C’est un travail quotidien. »
Traitement hormonal de la ménopause et perte de libido
Mais pour la Dre Anne De Kervasdoué, le traitement hormonal substitutif reste une alternative essentielle pour réduire les symptômes de la ménopause chez les femmes qui en souffrent. En France, il se présente sous forme de gel à base d’œstrogène naturel à appliquer sur la peau, en association avec un comprimé de progestérone naturelle. « C’est le seul traitement qui permet de retrouver des muqueuses en bon état en moins d’un mois », insiste la gynécologue.
Cependant, depuis quelques années, ce traitement n’a pas bonne réputation. Selon l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), 87 % des femmes présentent au moins un symptôme de la ménopause en plus de l’arrêt des règles, et 20 à 25 % souffrent de troubles sévères qui affectent leur qualité de vie. Pourtant, seules 10 % prennent un traitement de la ménopause.
La faute à une étude américaine de 2002. Elle faisait le lien entre traitement hormonal et augmentation du cancer du sein et des pathologies cardiovasculaires, ce qui avait entraîné une défiance généralisée des médecins et des femmes envers les hormones. « Cette étude était basée sur le traitement hormonal américain (synthétique), alors que la France a fait le choix des hormones dites “naturelles”, plus sûres et administrées par voie cutanée », explique la Dre Anne De Kervasdoué.
« Le traitement hormonal de la ménopause est actuellement l’option thérapeutique la plus efficace contre les troubles liés à la ménopause », soutient dans un article de Libération Florence Trémollières, professeure à la tête du Centre ménopause de Toulouse et qui a participé à la formulation des 25 recommandations du rapport parlementaire pour faire face à la ménopause, présenté le 9 avril 2025 par la députée macroniste Stéphanie Rist.
Selon les spécialistes, ce traitement substitutif serait même plutôt protecteur. « Il protège de l’ostéoporose et donc diminue le risque de fracture, il protège le cerveau, il diminue le risque de diabète de type 2 et du cancer du côlon », précise Anne De Kervasdoué.
Sur le risque cardiovasculaire, « plusieurs études mettent en évidence que, lorsque le traitement hormonal de la ménopause est débuté moins de dix ans après l’arrivée des symptômes, il existe une diminution de 30 % à 50 % du risque de mourir d’une maladie coronarienne, ainsi qu’une diminution significative de la mortalité toutes causes confondues », indique dans un article du Monde Geneviève Plu-Bureau, professeure de gynécologie médicale et docteure en biomathématiques. Des chiffres non-négligeables quand on sait que l’infarctus du myocarde est la première cause de décès chez la femme.
Interview avec la Dre Anne De Kervasdoué, médecin gynécologue et autrice de "La vie intime des femmes, paru aux éditions Odile Jacob.