
- 1 - J’ai fait des recherches sur mes symptômes, mais je n’ai rien trouvé
- 2 - Après l’opération, je ne pouvais pas m’asseoir ni marcher normalement pendant des semaines
- 3 - Au total, j’ai connu plus d’une dizaine de récidives
- 4 - Ce n’était pas simple à aborder dans mon entourage, surtout avec des partenaires intimes
Un vendredi, il y a quatre ans, je sens une petite boule inhabituelle au niveau de la lèvre gauche de ma vulve. C’est gonflé, mais surtout ça me fait mal. J’ai attendu la fin du week-end pour voir si ça passait, mais non ! Au contraire, ça a empiré : la boule a grossi jusqu’à atteindre la taille d’une balle de ping-pong, je ne pouvais plus m’asseoir ni marcher normalement. La douleur était insupportable, ça m’empêchait de dormir !
J’ai fait des recherches sur mes symptômes, mais je n’ai rien trouvé
Moi qui suis à moitié hypocondriaque, je me suis dit “ça y est, j’ai un cancer”, forcément… J’ai fait des recherches, mais je n’ai rien trouvé. Le lundi, j’ai appelé ma gynécologue, paniquée, pour un rendez-vous d’urgence. Après une auscultation, elle a tout de suite diagnostiqué une bartholinite. Comme quoi, ce problème n’est pas méconnu du corps médical ! Elle m’a expliqué que les glandes de Bartholin sont de toutes petites boules situées de chaque côté du vagin, qui servent à fabriquer le liquide de lubrification, donc la cyprine. Ce liquide est ensuite évacué vers le vagin lors de l'excitation sexuelle.
Sauf que parfois… Ça se bouche ! C’est ce que l’on appelle une inflammation du kyste de Bartholin, ou bartholinite. Je me suis d’abord sentie coupable et ai demandé à ma gynéco à quoi était due cette inflammation : elle m’a expliqué qu’il s’agissait parfois d’une bactérie, mais que c’était surtout, comme dans mon cas, “pas de chance”. Moi, je n’en avais jamais entendu parler, et dans mon entourage, je n’ai trouvé personne qui connaissait. Pourtant, la bartholinite touche 2 % des femmes.
Ma gynécologue m’a prescrit des antibiotiques, et m’a dit que si les choses ne s’arrangeaient pas dans les 48h, il faudrait aller aux urgences gynécologiques. Elle m’a aussi prescrit des “bains de siège”. J’ai donc dû acheter une bassine exprès pour y verser de l’eau chaude et de la Bétadine dans le but d’y poser mon derrière pendant 20 minutes, posée au milieu de ma salle de bain. Un grand moment.
Après l’opération, je ne pouvais pas m’asseoir ni marcher normalement pendant des semaines
Devinez quoi ? Au bout de 48h, rien ne s’était arrangé. Me voilà donc le jeudi matin en route pour les urgences, debout dans la rame de métro vide car je ne pouvais pas m’asseoir, et encore moins prendre mon habituel vélo. Sur place, je me suis faite auscultée par une vingtaine de soignants au total... J’avoue que ce n’est pas le souvenir le plus glorieux de ma vie. L’opération en elle-même n’a duré que dix ou quinze minutes, sous anesthésie générale. Le chirurgien a ouvert la lèvre et a percé le kyste pour le vider, avant de tout recoudre.
Je suis rentrée le soir et me suis reposée les trois jours qui ont suivi. Je ne pouvais toujours pas m’asseoir, je marchais lentement et c’était compliqué aux toilettes et à la douche. Des infirmiers sont venus nettoyer les fil s tous les jours pendant deux semaines. La zone de la plaie, puis de la cicatrice, a été douloureuse pendant plusieurs semaines, voire mois.
Au total, j’ai connu plus d’une dizaine de récidives
Mais surtout, ça ne s’est pas arrêté là ! Dans 10 à 15 % des cas, après un premier épisode, la bartholinite récidive. Évidemment, j’étais dedans : au total, j’ai connu près d’une dizaine de récidives. Heureusement, à chaque fois, les antibiotiques ont fait effet, et le kyste s’est vidé tout seul. Le problème, c’est qu’à chaque récidive, je ne savais pas si j’allais devoir me faire opérer.
J’étais en contact avec une chirurgienne, qui était prête à m’opérer rapidement si besoin. Ce n’était pas la même opération : cette fois, elle voulait créer un nouveau canal entre la glande et le vagin, vu que celui-ci continue à se boucher. C’est un peu plus lourd, il faut une bonne semaine d'arrêt. Je suis allée deux fois à l’hôpital dans ce but, mais à chaque fois, l’opération n’a pas eu lieu car le kyste n’était pas assez gros pour être opéré.
Mon problème (en plus de la douleur, parfois insupportable malgré la codéine), c’était ce dilemme. À chaque fois, je me disais : “Soit je prends les antibiotiques, il y a de grandes chances que ça passe et que ça n’impacte pas ma vie dans les prochains jours, semaines. Mais ça reviendra. Soit je ne les prends pas, j’attends que ça gonfle assez pour me faire opérer, au moins ça sera fait, mais ça va être problématique pendant un long moment.”
Ce n’était pas simple à aborder dans mon entourage, surtout avec des partenaires intimes
Psychologiquement, c’était compliqué à expliquer, car ça touche quand même le très intime. Mes proches, ça va, mais expliquer les absences et le fait d’être assise bizarrement au travail, c’était un peu compliqué. Avec les potentiels partenaires intimes, ce n’est pas simple à aborder non plus. Même si finalement, personne ne m’a jamais jugée. Comme quoi, il faut libérer la parole sur les troubles gynécos.
En fait, ce qui est dommage, c’est que comme beaucoup d’autres femmes, je ne connaissais pas du tout la bartholinite. Pourtant, une femme sur 50 touchée, c’est beaucoup ! Délier les langues permettrait déjà de se sentir moins seule et honteuse, car il n’y pas de honte à avoir. Le mécanisme des glandes de Bartholin est naturel, et la bartholinite n’a rien à voir avec un manque d'hygiène. Ça pourrait peut-être aussi aider à faire avancer la recherche médicale, pour comprendre les mécanismes qui la provoquent et éviter les récidives !
Depuis un peu plus d’un an, je n’ai pas eu de récidive, je ne saurais dire pourquoi. C’est quand même revenu pendant près de trois ans, je sais que ça peut reprendre à tout moment. Il existe aussi une autre opération : le retrait total de la glande. Mais elle est beaucoup plus lourde et ne garantit pas que le problème ne revienne de l’autre côté.
Témoignage de Morgane, 31 ans