
Depuis toute petite, et jusqu’à mes 29 ans, je souffrais de constipation chronique. On nous dit “jusqu’à trois jours sans aller à la selle, c’est normal”. Sauf que moi, c’était plutôt quatre, cinq jours, parfois plus, et avec de fausses diarrhées quand le corps saturait… Sauf que je ne m’inquiétais pas de cette constipation. Dès mes sept ans, j’ai commencé à prendre des laxatifs tous les jours, et je considérais juste que ça faisait partie de moi.
Mon ventre était en souffrance, mais pas que.
Le problème, c’est que ce trouble était en fait le signe d’un syndrome de l’intestin irritable de type C (à prédominance constipée). Pendant plus de vingt ans, j’ai vécu un véritable calvaire. Mon ventre était en souffrance, mais pas que. Je vivais avec des douleurs chroniques au dos et lors de mes règles, des tendinites, des allergies alimentaire s en pagaille… Je prenais des antibios auxquels je réagissais mal, et j'ai aussi subi une acné inflammatoire qui m’a pourri la vie à 26 ans.
J’ai aussi commencé à développer une grosse fatigue chronique, alors que j’étais jeune ! J’arrivais très en retard au travail, et c’était compliqué de me justifier. J’ai passé tous les examens, de la prise de sang à la coloscopie, en passant par les radios. Mais rien n’en est ressorti, et personne ne faisait le lien avec mon alimentation.
À force d’errance médicale, j’ai fini par insister auprès de ma généraliste pour voir un gastro-entérologue. Ce rendez-vous a changé ma vie. Il m’a auscultée sérieusement et m’a dit, très simplement : “Votre problème est alimentaire. Vous arrêtez tous les FODMAPs”. Ce mot m’était alors inconnu : il désigne en fait tous les aliments qui contiennent des glucides difficiles à digérer. Et la liste est longue ! Avec toutes mes allergies, je me suis dit que ça ne serait pas vivable. Mais j’étais à bout, alors j’ai tenté.
En deux semaines seulement, tous mes symptômes ont commencé à disparaître !
Et en deux semaines seulement, tous mes symptômes ont commencé à disparaître ! La constipation chronique ? Finie. Les douleurs de dos ? Disparues. La fatigue ? Envolée. Même mes allergies se sont atténuées ! C’était comme si mon corps s’éveillait après des années d’inflammation silencieuse. J’ai suivi un protocole strict : élimination des FODMAPs pendant un an, puis réintégration progressive. Normalement, la phase d'élimination ne doit durer qu'un mois, mais j'ai été mal informée... J’ai aussi éliminé les additifs et les aliments ultra-transformés. J’ai appris à tout cuisiner moi-même, à lire les étiquettes, à écouter mon corps.
J’ai compris que mon intestin, enflammé depuis des années, m’envoyait de fausses informations. Et comme 80 % du système immunitaire se trouve justement dans l’intestin, ça explique mes autres problèmes. Mon système nerveux, affaibli, s’est reconstruit. J’ai même pu arrêter la pilule, tomber enceinte et vivre une grossesse sereine. Moi, qu’on pensait atteinte d’endométriose…
J’ai commencé un vrai travail de fond, aussi bien physiologique que psychologique
Mais l'alimentation n’a pas tout fait. J’ai commencé un vrai travail de fond, aussi bien physiologique que psychologique. J’ai pratiqué l’hypnose et l’EMDR, et j’ai pris des compléments ciblés. J’ai découvert que je portais un polymorphisme génétique (FUT2) qui explique certaines carences et réactions immunitaires. J’ai pris un complément à base d’oligosaccharides du lait maternel humain, pour pallier ce problème.
J’ai aussi compris qu’on ne peut pas réparer un intestin sans apaiser son système nerveux. J’ai exploré mon histoire : je me suis vue sur des photos, à 7 ans avec de grosses cernes noires. Je voyais, à côté, ma petite sœur en surpoids. C’était en 1997, et j’ai demandé à ma mère ce qui s’était passé cette année-là. Quand elle m’a simplement répondu “c’était mon accident de voiture !”, tout m’est revenu. Je l’a senti physiquement, j’avais franchi une nouvelle étape. Je me suis souvenu qu’à cette époque, je n’avais pas le droit de parler pour protéger ma petite sœur. J’ai donc “tout gardé en moi”. Peut-être qu’il y a autre chose, mais ça a été un bon point de départ à analyser. Il faut accepter de regarder là où ça fait mal.
J'aimerais que les choses changent, car il existe des solutions !
Aujourd’hui, je mange normalement. Certains aliments ont été plus compliqués que d’autres à réintégrer, mais je suis têtue ! Je cuisine, je fais du sport, je dors bien. Je n’ai plus de douleurs, plus d’allergies, plus de trouble digestif. Je ne peux pas dire que je suis guérie, parce que le SII est une maladie chronique. Mais je suis rétablie ! Quand je vais chez le médecin, nous n’abordons même plus ce sujet, c’est dire…
J’ai même créé un blog, puis le podcast Les Digérables, dédié au SII. Le concept, c’est un épisode, une solution : on parle de nutrition, d’hypnose, de musicothérapie… J’ai mis au point un protocole allégé FODMAP, inspiré de celui utilisé chez les enfants et les personnes souffrant de troubles du comportement alimentaire. Pourquoi ce protocole n’est-il pas proposé plus largement ? Il est pourtant simple et extrêmement efficace.
J'aimerais que les choses changent, car il existe des solutions ! Même les intolérances alimentaires ne sont pas une fatalité. Ce qu’il faut, c’est une vraie stratégie : phase d’élimination des aliments à risque, réparation de la muqueuse intestinale, rééquilibrage du microbiote, réintégration desdits aliments. Et un accompagnement global, qui inclut l’émotionnel, le psychisme, le vécu. Je suis la preuve vivante que c’est possible !
Témoignage de Jennifer Verrecchia