Définition : qu’est-ce que la colique du nourrisson ?

La colique du nourrisson se caractérise par des épisodes de pleurs excessifs et récurrents. Ces crises sont circonscrites dans le temps par « la règle des 3 » de Wessel (formulée en 1950 reprise récemment dans le ROME IV) selon laquelle les pleurs durent :

  • plus de 3 heures par jour ;
  • plus de 3 fois par semaine ;
  • pendant plus de 3 semaines ;

Toutefois, ces critères ne sont pas à prendre au pied de la lettre : « des crises de pleurs intenses et récurrentes accompagnées d’agitations surtout le soir suffisent généralement au médecin à constituer le diagnostic de colique du nourrisson », selon le docteur Fatia Cherfioui, pédiatre. Nous considérons que seulement 35% des bébés consultants pour des coliques, remplissent ces trois critères (1).

« Ces coliques peuvent démarrer dès les premières semaines (généralement à partir de la troisième semaine) avec un pic aux alentours de la sixième semaine. Elles s’estompent naturellement vers le troisième mois », ajoute le pédiatre.

La colique du nourrisson est à distinguer de pleurs aigus et inhabituels qui imposent de consulter en urgence.

« Les coliques du nourrisson touchent l’enfant en bonne santé et n’ont pas de caractère pathologique. Le développement du bébé est normal ». À cet égard, l’existence même des coliques du nourrisson est médicalement controversée. Selon certains, ce concept n’a vocation qu’à rassurer les parents sur la nature bénigne d’un trouble passager (1). Les causes de ce dernier restent d’ailleurs mystérieuses. La plupart des théories attribuent ces pleurs à des troubles gastriques ou psychologiques, mais aucune d’entre elles n’est validée scientifiquement.

Quelle est la fréquence de ces épisodes de pleurs ?

La colique du nourrisson est un trouble fréquent qui touche 20 à 25% des enfants : « pour ma part, j’en rencontre énormément en consultation. Dans ma patientèle, cela concerne la majorité des nourrissons ». Les garçons sont autant affectés que les filles.

Quels sont les symptômes de la colique du nourrisson ?

Les coliques du nourrisson sont des crises de pleurs récurrentes avec une gestuelle souvent semblable.  Les épisodes peuvent durer de quelques minutes à plusieurs heures et sont plus fréquents le soir.  Ils se traduisent par :

  • des pleurs intenses ;
  • une agitation: bébé se tortille ;
  • un visage rouge et crispé ;
  • des poings serrés ;
  • un ventre dur et plein d’air ;
  • des flatulences et des rots ;
  • l’émission de selles peut ponctuer la crise ;
  • une inquiétude, voire un désemparement des parents: « cette angoisse des parents est souvent présente et a été identifiée comme un facteur de risque potentiel des coliques. Si cette hypothèse peut vous aiguiller, elle reste incertaine sur le plan scientifique », indique la spécialiste.

Pleurs : comment identifier des coliques ?

Dès la seconde semaine, un bébé pleure en moyenne deux heures par jour, sans pour autant que nous puissions parler de crises de coliques. « Nous parlons de coliques lorsque les pleurs sont systématiquement quotidiens, de longue durée et le plus souvent en fin de journée », pour la praticienne. Les cris et pleurs font partie de l’éveil de bébé : ils sont « un passage obligé » lors de l’adaptation du nourrisson à son environnement extérieur. 

Toutefois, « des cris et/ou des pleurs inhabituels qui s’accompagnent de symptômes physiques et/ou d’une absence de prise de poids doivent vous pousser à consulter. Il en va de même si les pleurs sont inconsolables malgré l’allaitement ou le biberon ».

Quelles sont les causes des cris du bébé ?             

La cause des coliques du nourrisson reste à ce jour mystérieuse. Un grand nombre d’hypothèses peuvent toutefois vous aiguiller.

Des causes intestinales

  • des ballonnements et des douleurs abdominales expliqués par l’immaturité intestinale de bébé : « il s’agit d’une altération du microbiote intestinal (ou dysbiose) qui fait partie du processus de développement du bébé », selon la spécialiste ;
  • une aérophagie liée à une ingestion d’air lors de l’allaitement ou du biberon. 

Des causes psychologiques

  • une anxiété de la mère : selon le psychanalyste Donal Woods Winnicott : le bébé se développe parce qu’il est regardé. Il a besoin d’être « contenu » pour se sentir en sécurité. Ainsi lorsque la mère (et parfois les deux parents) se montrent paniqués et démunis face aux pleurs du bébé, cette angoisse se transmet à l’enfant. Il en résulte un cercle vicieux nuisible (2) ;
  • une angoisse du soir ;
  • un excès de stimulations sensorielles : l’interaction avec le milieu extérieur peut être vécue très intensément. Les crises sont d’autant plus sévères que les journées sont mouvementées ;
  • un besoin d’évacuer les émotions. 

Coliques du bébé allaité  

L’allaitement au sein est un facteur de risque hypothétique de coliques du nourrisson. Les raisons pointées du doigt sont une indigestion  et/ ou un inconfort pendant la tétée. Voici quelques conseils pour faciliter l’allaitement :

  • la tétée doit se faire sur un seul sein: au fil de la tétée, le lait est de plus en concentré en matières grasses (et donc de plus en plus nourrissant). Si vous changez de sein au cours d’une seule tétée, l’enfant risque se sentir moins nourri par le lait du second sein. Il consommera ainsi une plus grande quantité de lait qu’il risquerait de mal digérer. Vous pouvez utiliser la technique de compression du sein en fin de tétée pour faciliter le flux de lait. Toutefois, si en fin de tétée, l’enfant a encore faim, vous pouvez lui donner l’autre sein ;
  • un réflexe d’éjection de lait puissant peut créer un inconfort pour le nourrisson.                                                                                               

Quels sont les facteurs de risques de la colique du nourrisson ?

Les facteurs de risque de la colique du nourrisson sont :

  • des troubles intestinaux ;
  • des parents stressés ;
  • un excès d’émotion peut provoquer ou aggraver les crises ;
  • le tabagisme de la mère  pendant ou après la grossesse (3) ;
  • une mère dont l’âge se situe entre 30 et 34 ans (4) ;
  • le fait qu’il s’agisse du premier enfant (4);
  • un jet de lait puissant pendant l’allaitement
  • le fait de changer de sein au cours d'une même tétée. 

Quelles sont les personnes à risques de coliques du nourrisson ?

La colique du nourrisson affecte les bébés de moins de 4 mois. Elle touche autant les filles que les garçons. Les bébés plus exposés sont :

  • les enfants dont l’un des parents est angoissé ;
  • les bébés présentant des troubles intestinaux ;
  • les enfants dont la mère fume ou a fumé pendant la grossesse ;
  • les enfants uniques.

Quelle est la durée de la colique du nourrisson ?

Les coliques du nourrisson peuvent débuter dès la naissance et peuvent s’étaler jusqu’au troisième mois. Les crises durent de quelques minutes à quelques heures récidivant au cours de la journée. 

La colique du nourrisson est-elle contagieuse ?

La colique du nourrisson n’est pas contagieuse : « En outre, il n’existe pas de risque qu’un enfant déclenche des coliques après avoir entendu un autre enfant en crise : comme s’il prenait le mauvais exemple. Les coliques sont propres à chacun ».

Colique du nourrisson : qui, quand consulter ?

En cas de pleurs récurrents, il est nécessaire de consulter son pédiatre afin d’écarter tout autre diagnostic. En cas de cris et/ou de pleurs inhabituels accompagnés ou non d’autres symptômes, il est recommandé de consulter en urgence.

Quelles sont les complications ?

La colique du nourrisson n’est pas pathologique, elle n’entraîne pas de complication. Le bébé est en bonne santé et se développe normalement. 

Quels sont les examens et analyses à réaliser ?

Le pédiatre effectue le diagnostic par un examen clinique qui comprend :

  • un examen physique ;
  • un interrogatoire des parents sur le déroulement, la fréquence et la durée des crises.

S’il le pense nécessaire, ce dernier peut prescrire d’autres analyses afin d’écarter tout autre diagnostic. 

Quels sont les traitements de la colique du nourrisson ?  

  • Aucun médicament

Malheureusement, il n’existe aucune pilule miracle pour calmer bébé. Aucun remède n’a prouvé son efficacité. En outre, il est déconseillé de s’en remettre aux médicaments (tels que la dicyclomine, la siméthicone, le gaviscon®, les antispasmotdiques, les antalgiques, les IPP…) en raison de leurs effets secondaires.

  • La phytothérapie

Certains parents s’en remettent parfois aux plantes en utilisant notamment le fenouil, tilleul ou la fleur d’orange. « Concernant le fenouil, pour ma part je n’ai pas obtenu de résultats en consultation bien qu’une étude de 2006 atteste d’une efficacité de la phytothérapie sans que cette étude soit concluante », selon le docteur Cherfioui.

  • Le changement de lait

Parfois les coliques peuvent cesser en arrêtant d’allaiter ou en changeant de lait.

Coliques et probiotiques 

Certaines études démontrent que les probiotiques sont efficaces contre les coliques du bébé. C’est notamment le cas de la bactérie lactobacillus reuteri. Toutefois, ces travaux précisent que les résultats sont insignifiants chez les bébés nourris au biberon et que les probiotiques ne sont efficaces que chez les bébés allaités.

« Je prescris des probiotiques aux enfants qui font des coliques sur la base de travaux scientifiques ont démontré leur efficacité », atteste la spécialiste. 

Coliques et ostéopathie

Certains médecins recommandent parfois l’ostéopathie pour soulager les coliques du bébé. L’ostéopathe va alors pratiquer des manipulations abdominales. « Cependant, aucune preuve scientifique n’atteste de son efficacité. Il est cependant possible que l’ostéopathe parvienne à apaiser l’enfant s’il se montre particulièrement prévenant », affirme l’experte.

Un biberon anti-coliques

Le biberon anti-colique est équipé d’une valve anti-colique brevetée qui permet un flux de lait lent et régulier, le tout sans risque d’ingestion d’air. Ces biberons faciliteraient la digestion et éviteraient l’aérophagie, mais : « malheureusement les résultats sur mes patients sont assez décevants », témoigne la pédiatre.

Comment soulager les coliques de bébé ?  

Vous l’avez compris, ni les médicaments, ni les médecines naturelles n’ont fait leurs preuves contre les coliques du bébé. Moralité ?  Il faut savoir prendre son mal en patience face à ce comportement naturel. Toutefois, lors d’une crise, le comportement des parents peut soulager les pleurs du nourrisson. Voici quelques conseils :

  • restez calme et rassurez l’enfant : « vous pouvez le serrer contre vous et le faire écouter votre cœur » ;
  • proposez-lui éventuellement une tétine : "la succion apaise les tensions" ;
  • prenez-le dans les bras pour qu’il se sente en sécurité ;
  • massez-le sur ventre ;
  • emmaillotez-le dans un drap ou une couverture ;
  • écoutez et regardez-le pleurer pour lui montrer votre présence ;
  • bercez-le ;
  • sortez-le dans une poussette ou un porte-bébé afin qu’il s’endorme ;
  • évitez l’agitation et laissez-le au calme ;
  • faites-vous aider par un tiers (nourrice, sage-femme…) car les pleurs peuvent être éprouvants pour les parents et leur stress aggrave souvent les coliques de bébé.

Colique du nourrisson : faut-il craindre une allergie ?

Réponse du Dr. Cherfioui, pédiatre :

« Les coliques du nourrisson ne sont pas le signe avant-coureur d’une allergie alimentaire. Il n’est pas nécessaire pour la mère qui allaite de cesser la consommation d’aliments potentiellement allergènes. »

Sites d’informations et associations

Parole de maman

Association française de massage pour bébé

Association mamanblues

Sources

Entretien avec le Docteur Fatia Cherfioui, pédiatre.

(1) Les pleurs du nourrisson de 0 à 3 mois : Effet du mode d’alimentation, et prise en charge du Médecin Généraliste, Dr. Camille Vidrequin et Chouraqui J-P. Les coliques du nourrisson. JTA (Journées de Technique Avancées en gynécologie obstétrique, périnatalogie et pédiatrie). Grenoble 1994.

(2) Le pédiatre qui danse avec les bébés, Marc Bellaïche, propos recueillis par Frédérique Odasso, dans L'école des parents 2014/5 (n° 610), pages 26 à 27

(3) Smoking during pregnancy and infantile colic. Søndergaard C, Henriksen TB, Obel C, Wisborg K. Pediatrics. 2001 Aug;108(2):342-6

(4) Quels traitements pour les coliques du nourrisson? V. Bruyas-Bertholon, A. Lachaux et al, La Presse Médicale, tome 41, N°7-8, juillet-août 2012.