Alzheimer : diagnostic, traitements, préventions : les trois choses à savoir sur la maladie
Troubles de la mémoire, du langage ou de la capacité de raisonnement, près de 900 000 Français sont concernés par la maladie d’Alzheimer, rapporte la Fondation pour la recherche médicale. Depuis plusieurs décennies, la lutte contre cette pathologie neurodégénérative, mise en lumière chaque 21 septembre lors de la Journée mondiale, se poursuit, portée par un espoir scientifique toujours intact.
« Les progrès sont gigantesques sur le plan diagnostic et thérapeutique, avec une recherche scientifique en pleine ébullition. L’arrivée des nouvelles immunothérapies annonce un changement de paradigme : ces maladies évolutives sont très probablement accessibles à des traitements susceptibles de freiner durablement la neurodégénérescence. J’ai la conviction, personnelle, que les années à venir vont le démontrer », résume le Dr Thibaud Lebouvier, professeur de neurologie et responsable du centre mémoire de ressources et de recherche du CHU de Lille.
L'immunothérapie, un espoir de taille pour les patients
L’actualité thérapeutique illustre ce dynamisme. Mi-avril, la Commission européenne a donné son feu vert au “Leqembi”, un médicament conçu pour ralentir le déclin cognitif chez certains patients. Suivant l’avis de l’Agence européenne des médicaments (EMA), elle a jugé que « les bénéfices de ce médicament étaient supérieurs aux risques ». Les essais cliniques montrent en effet une légère diminution du rythme de progression chez les malades au début de l’affection.
Cependant, l’autorisation européenne reste limitée : les indications sont restreintes aux personnes à un stade très débutant de la maladie d’Alzheimer. "Sous réserve de l’imagerie cérébrale et d’analyses génétiques qui permettent d’exclure les personnes à haut risque d’hémorragie cérébrale sous traitement", souligne Le Dr Lebouvier.
Élaboré conjointement par un laboratoire japonais et un fabricant américain, le traitement est déjà disponible aux États-Unis, au Japon, en Chine et depuis peu, en Allemagne et en Autriche.
En France, la Haute Autorité de santé a refusé début septembre une autorisation d'accès précoce, c’est-à-dire le droit à une prescription encadrée en attendant son AMM (autorisation de mise sur le marché) et son remboursement par l’assurance maladie. L’agence estime que les effets secondaires demeurent trop importants au regard d’un bénéfice jugé modéré. « Du point de vue du chercheur, ces nouvelles immunothérapies sont extraordinaires. En faisant disparaître les plaques amyloïdes, l’une des deux lésions de la maladie d’Alzheimer, on parvient à ralentir les symptômes. C'est un énorme espoir. Mais le bénéfice à long terme reste inconnu. Les immunothérapies font gagner 6 mois aux patients au bout de 18 mois de traitement, mais on ignore encore le bénéfice accumulé à 3, 4 ou 6 ans. Est-ce que le temps gagné sera suffisant pour pondérer le risque d’effets indésirables et le coût du traitement ? C'est une donnée cruciale qui nous manque encore », insiste le Dr Lebouvier.
L'importance du diagnostic précoce
En parallèle de ces avancées thérapeutiques, le neurologue rappelle l’importance d’un diagnostic précoce lorsque la mémoire devient problématique. « À partir du moment où il y a des symptômes cognitifs, il faut savoir consulter rapidement. Si tout le monde faisait ça, on améliorerait la prise en charge », souligne-t-il.
Le parcours s’articule en trois temps : une consultation dans un centre de mémoire, suivie d’une IRM pour écarter d’autres causes, puis d’une ponction lombaire destinée à analyser les biomarqueurs.
Les outils évoluent également. Au printemps dernier, l’agence américaine du médicament a validé un premier test sanguin pour les plus de 55 ans déjà sujets à des troubles cognitifs, ouvrant la voie à une détection plus simple et plus précoce.
La prévention
Le Dr Lebouvier appelle néanmoins à la prudence vis-à-vis des tests sanguins. “Ils ne sont utiles qu’après une consultation mémoire, en remplacement de la ponction lombaire, s’il existe des symptômes évocateurs de la maladie d’Alzheimer”, souligne-t-il. Le risque que redoute ce spécialiste : l’angoisse générée par les résultats. “Les tests sanguins peuvent être faussement positifs ou positifs des années avant les premiers symptômes, chez des personnes qui ne développeront jamais la maladie. Le risque est de saturer le réseau de consultations de mémoire sans nous permettre de voir les patients qui en ont le plus besoin.”
Même si aucun traitement ne guérit Alzheimer, les manifestations de la maladie peuvent être atténuées et la qualité de vie améliorée par des thérapies médicamenteuses et non médicamenteuses. Des gestes simples y contribuent : marcher 10 000 pas quotidiens, maintenir un sommeil régulier ou adopter un régime méditerranéen. Prêt à enfiler vos baskets ?
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Interview avec le Professeur Thibaud Lebouvier, neurologue et responsable du centre du centre mémoire de ressources et de recherche du CHU de Lille.
Fondation pour la recherche médicale : https://www.frm.org/fr