
Medisite : Pourquoi prendre soin de ses pieds, c'est aussi prendre soin de sa santé ?
Muriel Montenvert : On marche entre 6000 et 10 000 pas par jour pendant lesquels nos pieds nous portent. Cela suffit à comprendre à quel point leur rôle est crucial. Des douleurs au niveau des pieds ont des conséquences directes comme une capacité à se mouvoir altérée et une perte d’autonomie. Avec comme effets rebond possibles de la sédentarité, une prise de poids, des problèmes cardiovasculaires, des maladies métaboliques (surtout si l’alimentation n’est pas équilibrée)... Un simple ongle incarné par exemple ou des cors peuvent handicaper la marche et induire une démarche antalgique (façon de marcher quand on essaie de minimiser la douleur dans un membre, ndlr) et des douleurs chroniques au dos ou aux hanches. Sans parler des raideurs et problèmes articulaires liés au manque de mouvement.
Prendre soin de ses pieds, c’est prendre soin de sa santé, plus encore quand on avance en âge.
Qu'est-ce au juste que prendre soin de ses pieds ?
M.M. : Cela commence par consulter un pédicure-podologue une fois par an, même quand tout semble aller bien ; comme on le fait avec les dents quand on consulte son dentiste. Un bilan annuel permet de vérifier le bon état des pieds et des ongles ou le chaussage, de repérer une problématique qui aurait pu passer inaperçue, de faire les soins qui s’imposent. Un bilan podologique peut également être réalisé, il est indispensable pour établir le besoin ou non de port de semelles orthopédiques. Car une asymétrie peut être corrigée et soulagée à près de 80 % par des semelles selon les chiffres de l'Observatoire de la santé du pied 2024.
Ces consultations chez le podologue sont-elles prises en charge par l’Assurance maladie et donc remboursées ?
M.M. : Tout dépend. Le bilan n’est pas remboursé par la sécurité sociale, seules sont remboursées les semelles orthopédiques (comprenant le bilan podologique, la paire de semelles et le suivi). Pour les soins de pédicurie de nombreuses mutuelles proposent aujourd’hui un remboursement.
Tous les patients diabétiques ont droit à une séance par an et si leur risque podologique est au stade 2 ou 3, ils ont droit à cinq à huit séances par an.
Depuis 2024, l’Assurance maladie rembourse en outre les soins dans certaines situations :
- Les patients sous chimiothérapie reçoivent un soin de pédicurie par an, pendant toute la durée du traitement.
- Les personnes qui ont des verrues plantaires peuvent bénéficier de quatre traitements par an.
Quelles autres bonnes habitudes sont essentielles pour des pieds en bonne santé ?
M.M. : Au quotidien il convient d’avoir une attitude “d’observance”, c'est-à-dire repérer les douleurs à l’appui, observer ses ongles et sa peau, localiser de micro blessures, etc. Certains signes doivent amener à consulter un professionnel rapidement car plus tôt on intervient, mieux c’est, les soins sont alors plus efficaces, et la récupération plus rapide : le décollement d’un ongle, la présence de cors sur le dessus des orteils, des ongles impossibles à couper (avec l'âge les ongles ont tendance à épaissir et à durcir), une mycose…
Le chaussage est également un point essentiel. C’est souvent un vrai sujet à débattre avec les patients, car pour eux, la chaussure n’est jamais en cause !
Certaines chaussures comme les tongs doivent-elles être définitivement abandonnées ? Que conseillez-vous comme type de chaussure ?
M.M. : Non. La tong en soi n’est pas une mauvaise chaussure, c’est une chaussure de plage, qui doit être réservée à cet usage. Il n’y a pas de “mauvais types” de chaussures. Ce qui compte c’est d’utiliser une chaussure adaptée à l’usage que l’on va en avoir : pour une randonnée on prend des chaussures de marche par exemple. Et à la bonne pointure ! Les gens l’ignorent pour la plupart mais entre la fin de la croissance et la fin de vie on prend une à deux pointures, parce que le pied s'affaisse naturellement. Les hommes sont souvent avec des chaussures trop grandes et les femmes trop petites. Dans les deux cas, ce n’est pas bon. Il faut surtout une chaussure qui vous corresponde et qui vous aille bien.
Comment être sûr de sa pointure ?
M.M. : Il faut penser à la contrôler, tout simplement. Chez le podologue ou dans un magasin de chaussures. Retenez qu’il doit toujours y avoir un travers de doigt entre le bout de l’orteil et le bout de la chaussure et plus encore, elles doivent être à la bonne largeur. Si vos pieds gonflent, privilégiez les essayages de fin de journée. Mais surtout, le confort doit être le critère d’achat numéro un, la chaussure doit bien aller de suite, elle ne va pas “se faire”. Si elle tient bien au pied et qu’il n’y a pas de frottement, ce sont deux bons points.
Interview de Muriel Montenvert, présidente de l’UFSP.