Anesthésie générale : notre cerveau dort-il vraiment ? IllustrationIstock
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L’infirmière et le médecin anesthésiste se rapproche du visage, masque à la main. Quelques secondes plus tard, le patient dort. Mais son cerveau, ne se repose pas pour autant. Une étude américaine publiée dans The journal of neuroscience explique ce qu’il se passe réellement lors de cet acte médical. Les médicaments utilisés n’affecteraient qu’une seule partie du cerveau.

Plus de 5,6 millions d’actes chirurgicaux requièrent une anesthésie en 2020 indique la Drees, direction de la recherche des études de l’évaluation et des statistiques. Cet acte médical met le patient dans un état comparable au sommeil. Cet effet est produit par l’injection de médicament dans une perfusion ou à l’aide d’un gaz inhalé lors de la respiration. L’anesthésie générale permet de perdre totalement conscience durant l’acte chirurgical et ainsi de ne plus réagir à la douleur.

" Les anesthésiques généraux perturbent la dynamique des réseaux cérébraux par de multiples voies "

Mais le cerveau ne s’éteint pas complètement lors d’une anesthésie générale et continue à avoir une activité significative. Comme d’autres scientifiques spécialisés en neurosciences, les chercheurs américains ont explorer ce qu’il se passe vraiment lorsque le patient dort artificiellement. Dans l’étude publiée le 15 mai 2024, ils expliquent que les traitements mettent uniquement en veille la partie du cerveau censé nous mettre en alerte.

" Les anesthésiques généraux perturbent la dynamique des réseaux cérébraux par de multiples voies ", indique un des auteurs de l’étude. Ils ont démontré que deux types d’anesthésiants, le sevoflurane et le propofol, couramment utilisé au bloc opératoire interagissent et interfèrent avec les neurotransmetteurs ce qui empêche le réveil.

Le cerveau est composé de 100 milliards de cellules nerveuses appelés neurones qui constituent un réseau très précis. Ils communiquent entre eux par réseaux électriques appelés influx nerveux. C’est à ce moment-là que sont produits les neurotransmetteurs qui permettent de faire passer une information. Il en existe deux types : les excitateurs et les inhibiteurs.

" Cet effet empêche les neurones de communiquer entre eux "

Les neurotransmetteurs excitateurs nous tiennent éveillés et nous permettent d’être vigilants, quand les inhibiteurs régulent les premières lorsque nous souhaitons trouver le sommeil. Dans la vie quotidienne, ce processus se produit progressivement, ce qui explique pourquoi la fatigue arrive progressivement durant la journée.

Selon les chercheurs, l’anesthésie générale accélère ce processus en faisant taire les neurotransmetteurs excitateurs sans agir sur les inhibiteurs. Cet effet empêche donc les neurones de communiquer entre eux.

Mais alors qu’est-ce qui empêche le réveil lors d’un endormissement artificiel ? À ce jour, il n'existe pas de consensus solide dans le domaine quant aux raisons pour lesquelles l'anesthésie générale entraîne une perte de conscience pendant l'intervention chirurgicale. De nombreux chercheurs se sont posé la question. Une équipe de scientifiques de l’Inserm, du CEA, centre essai atomique et de l’université Paris Saclay a publié une théorie intéressante en 2018.

"L ’effet d’une anesthésie générale sur le cerveau correspond à une rigidification"

L’équipe a observé le cerveau d’un primate non humain en état de conscience et endormi par l’anesthésie. Pour observer ce qu’il se passe dans le cerveau ils analysent un électroencéphalogramme : un examen qui analyse l’activité électrique du cerveau.

" À l’état conscient, différentes aires du cerveau, même non connectées anatomiquement, peuvent fonctionner en phase, grâce au phénomène de réverbération de l’information dans le cerveau. C’est cette propriété qui est bloquée sous anesthésie générale. Quel que soit le type de médicament employé, l’effet d’une anesthésie générale sur le cerveau correspond à une rigidification du cheminement de l’information au sein du cerveau : l’activité cérébrale est maintenue, mais reste cantonnée aux connexions anatomiques, lui retirant la possibilité de générer d’autres flux d’informations plus flexibles. C’est ce phénomène qui explique la perte de conscience induite par l’anesthésie générale chez un patient ", indiquent les auteurs de l’étude.

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