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La sensation de quitter son propre corps, d’apercevoir une lumière vive au bout d’un tunnel… Les récits de personnes ayant vécu ce qu’on appelle des "expériences de mort imminente" intriguent autant qu’elles fascinent. Elles nourrissent la fantasmagorie autour de la mort, et ce qu’il se passe dans le corps lorsque le cœur cesse de se battre. Une personne sur cinq ayant survécu à une réanimation cardio-pulmonaire après un arrêt cardiaque aurait vécu ces expériences de mort sibyllines et surnaturelles, selon la Grossman School of Medicine de l'Université de New York.

La mort demeure un processus nimbé de mystère qui intéresse au plus près les scientifiques. Mais des chercheurs de l’Institut du Cerveau viennent de résoudre certaines énigmes, en réussissant à décrypter ce qu’il se passe au niveau neuronal lorsque notre cerveau se trouve privé d’oxygène.

L’équipe de scientifiques, coordonnée par Catherine Mahon, a mis au jour un phénomène complexe autour de "l’onde de la mort". La compréhension de ce processus pourrait bien donner la clé aux scientifiques pour réussir, dans un futur plus ou moins proche, à améliorer les pratiques de réanimation en cas d’arrêt cardiorespiratoire.

Une "onde de la mort" réversible

Pour mieux comprendre la portée de ces travaux, parus dans la revue Neurobiology of Diseases, il convient de décrire ce qui se cache derrière cette énigmatique "onde de la mort".

Quand le cerveau n’est plus alimenté en oxygène, celui-ci voit ses réserves en ATP, le carburant énergétique de ses cellules, s’épuiser. Cet arrêt prolongé d’oxygénation cérébrale perturbe l’équilibre neuronal et l’activité électrique. Mais cela ne signe pas nécessairement le début de la fin… Les chercheurs de l’Institut du Cerveau ont découvert dans une expérience menée chez le rat, que l’extinction électrique des circuits neuronaux (marquée par un électroencéphalogramme plat) est suivie de la propagation d’une onde spécifique, cette fameuse onde de la mort, dans les profondeurs du cortex cérébral. Cette onde de grande amplitude se propage comme une vague dans cette région cérébrale jusqu’à extinction définitive de la conscience.

Des ondes qui pourraient liées aux expériences de mort imminente

"Les circuits neuronaux semblent d’abord s’éteindre… Puis on observe un sursaut d’activité cérébrale et notamment une augmentation des ondes de type gamma et bêta, explique au site de l’Institut du Cerveau Séverine Mahon, chercheuse en neurosciences à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). Ce sont des ondes habituellement associées à une expérience consciente. Dans ce contexte , il est possible qu’elles soient impliquées dans les expériences de mort imminente que rapportent certaines personnes ayant survécu à un arrêt cardio-respiratoire."

Mais contrairement à ce que l’on pourrait penser, ce silence neuronal n’annonce pas une mort certaine. Ce processus serait réversible : si le cerveau est réapprovisionné en oxygène, il s’en suit une "onde de la réanimation" annonciatrice d’une lente récupération des fonctions cérébrales.


Le trajet de "l’onde de la mort" suivi à la loupe

Jusqu’ici, on ignorait dans quelle mesure cette onde pouvait affecter le cortex et faire des dommages dans le cerveau. En enregistrant l’activité électrique chez les rats, les scientifiques ont pu répondre à la question clé de savoir quelles sont les zones du cerveau traversées et fragilisées par l’onde de la mort.

Ils ont pour cela suivi le trajet de l’onde de la mort. "Nous avons remarqué que l’activité des neurones était relativement homogène au début de l’anoxie cérébrale (la privation d’oxygène dans le cerveau). Puis, l’onde de la mort surgissait au niveau des neurones pyramidaux localisés dans la couche 5 du néocortex, et se propageait dans deux directions : vers le haut, soit la surface du cerveau, et vers le bas, soit la substance blanche, décrit Séverine Mahon. Nous avons observé cette même dynamique dans différentes conditions expérimentales, et pensons qu’elle pourrait exister chez l’Homme."

Vers des pratiques de réanimation ciblées pour mieux préserver les fonctions cérébrales

Les scientifiques ont mis en évidence que les couches profondes du cortex sont les plus vulnérables à la privation d’oxygène. En réoxygénant le cerveau des rongeurs, les cellules nerveuses ont pu reconstituer leurs réserves énergétiques (en ATP), "menant à la repolarisation des neurones et au rétablissement des activités synaptiques", expliquent les chercheurs dans un communiqué.

Ces résultats prometteurs pourraient à terme faire avancer la recherche sur les pratiques de réanimation en cas d’arrêt cardiorespiratoire, dans l’espoir de pouvoir préserver au maximum les fonctions cérébrales.

En attendant, il reste encore de nombreuses inconnues à résoudre, concède Séverine Mahon, dans un entretien au magazine Pour la science. Parmi les points d’interrogation : "Où situer le point de non-retour dans le cas d’une réanimation inefficace ? Pour l’instant, nous peinons à identifier un marqueur d’engagement dans un processus irréversible vers la mort".

Sources

https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/37926170/

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