Une leucoplasie est une affection dermatologique qui se traduit par la formation d’épaisses plaques blanches plus ou moins étendues et légèrement granuleuses au niveau des muqueuses de la bouche (les leucoplasies génitales, qui touchent davantage les femmes, sont plus rares).

Les lésions se développent sur les commissures de la bouche, la face interne des joues, mais aussi sur la langue, les lèvres, les gencives ou encore le plancher buccal. Celles-ci généralement bénignes, sont systématiquement indolores. « Le critère diagnostique important ici est que ces lésions ne disparaissent pas au grattage » précise le Docteur Dinh-Qui, Chirurgien ORL.

Photo illustrant une leucoplasie à l'intérieur de la joue

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Crédit : photo prise par Michael Gaither. Il a accepté de publier cette image avec la licence suivante : © CC by-SA 3.0. Licence : https://commons.wikimedia.org/wiki/File:Leukoplakia02-04-06.jpg

Chiffres : quelle est la fréquence de la leucoplasie ?

La prévalence des leucoplasies est estimée entre 1 et 11% dans le monde.

Mais quels sont les chiffres en Europe ? "Elle est estimée entre 0.2 et 4%, et elle plus fréquente chez l’homme que chez la femme, notamment chez les sujets de plus de 50 ans" explique notre spécialiste.

Leucoplasie : quels sont les symptômes ?

La manifestation caractéristique de la leucoplasie est la survenue de tâches blanches au niveau des muqueuses buccales, qui ne disparaissent pas en grattant. Elles peuvent être isolées ou regroupées.

Lors de leur formation, elles peuvent se présenter sous la forme d’une macule, d’une papule, ou bien d’une excroissance. On peut distinguer deux catégories de leucoplasies selon leur apparence :

Les leucoplasies homogènes

Elles se traduisent par des plaques blanches et lisses, souples, sans aucune variation en termes de couleur et d’épaisseur. Indolores, elles sont découvertes fortuitement dans la plupart des cas. "Elles sont à faible risque de transformation maligne" ajoute le Docteur Nguyen.

Les leucoplasies dites inhomogènes

"Elles sont quant à elle à plus haut risque de transformation maligne et doivent faire l’objet d’une surveillance médicale accrue" précise le chirurgien ORL. Elles se manifestent par des plaques de surface irrégulière, parfois verruqueuse, avec des zones d’épaisseur différentes. Plaques rouges (érythroplasies), nodules et ulcérations y sont souvent associés. Ce type de leucoplasie est à risque élevé de cancérisation.

En tout état de cause, le ressenti d’une douleur, d’une adénopathie (gonflement d’un ganglion), ou d’une modification de l'apparence doit vous inciter à consulter rapidement, car cela suppose une transformation cancéreuse.

Leucoplasie : quelles sont ses causes ?

L’origine de la leucoplasie doit être recherchée dans l'intoxication tabagique.

Les lésions comportent parfois des levures du type Candida albicans. Seule l'évolution sous traitement antifongique révèle si elles sont dues au champignon (en cas de disparition complète des lésions après traitement) ou si celui-ci s'est installé sur une lésion préexistante.

Les principales causes permettant d’expliquer l’apparition de ce trouble bucco-dentaire sont la consommation de tabac et d’alcool. Plus elle est élevée, plus les risques sont importants. Il est également possible de voir apparaître une leucoplasie suite à la pose d’un appareil dentaire mal ajusté ou d’une mauvaise hygiène buccodentaire. Enfin, parfois l’origine est inconnue.

Si cette pathologie fait son apparition, il est primordial de stopper sa consommation d’alcool et de tabac afin d’éviter de la voir progresser ou d’en développer de nouvelles. Elles auront tendance à récidiver chez les personnes qui présentent des pathologies virales (virus d’Epstein-Barr) ou auto-immunes.

Quels sont les facteurs de risque ?

"Il est à noter que le seul facteur étiologique retenu est le tabac" nous informe le Docteur Nguyen.

En ce sens, on estime qu’un fumeur aurait environ six fois plus de risque de voir se développer une leucoplasie qu'un non-fumeur.

D’autres facteurs de risque secondaires ont toutefois été identifiés :

  • Usage du tabac à mâcher ou à chiquer.
  • Une mauvaise hygiène de vie.
  • Une carence vitaminique.
  • Une infection à VIH. "C’est surtout l’immunodéficience du HIV qui forme un facteur aggravant d’apparition de leucoplasies" souligne le praticien.
  • Une infection à Candida Albicans.
  • Une consommation excessive d’alcool associée au tabagisme.

Il faut noter que plus la durée d’exposition au tabac et à l’alcool est importante et plus le risque de leucoplasie augmente.

Quelles sont les personnes à risque ?

Cette affection dermatologique touche plus volontiers les hommes âgés de 50 ans et plus, ainsi que les grands fumeurs.

En ce qui concerne la leucoplasie orale chevelue, celle-ci survient presque exclusivement chez les personnes immunodéprimées. On estime notamment qu’elle touche 50% des sujets atteints par le VIH et n’ayant aucun traitement.

Quelle est la durée d'une ?

L’évolution des leucoplasies buccales est imprévisible, et elle dépend de nombreux paramètres.

Ainsi, une leucoplasie idiopathique (d’origine inconnue) peut régresser spontanément, sans raison apparente. Tout comme elle peut également s’étendre ou se modifier.

Contagion : la leucoplasie est-elle contagieuse ?

La leucoplasie n’est pas un trouble contagieux.

Qui, quand consulter ?

En cas de survenue d’une leucoplasie, il est indispensable de consulter son médecin traitant dans un premier temps. Ce dernier pourra vous adresser à un spécialiste Oto-Rhino-Laryngologiste si besoin.

Quelles sont les complications de la leucoplasie ?

Le principal risque de complication de la leucoplasie est l’évolution maligne de la lésion. Celui-ci est davantage présent en cas de leucoplasies inhomogènes.

Mais pour autant, la leucoplasie traduit-elle nécessairement un cancer de la bouche ?

Réponse du Docteur Dinh-Qui Nguyen, Chirurgien ORL : "Bien sûr que non, la présence d’une leucoplasie ne traduit pas nécessairement un cancer de la bouche. Il est essentiel de rassurer le plus possible le patient sur ce point. En effet, le risque de cancer buccal dépend d’un ensemble de facteurs et notamment de la forme, de la taille ainsi que du degré de dysplasie retrouvé lors d’une biopsie (de l'apparence des cellules anormales éventuellement retrouvées). Toutefois, les leucoplasies buccales sont considérées comme étant des états précancéreux et, dans les 10 ans, environ entre 3 à 6% d’entre elles évolueront vers un carcinome épidermoïde. C’est en cas d’induration de cette plaque blanche qu’il faut commencer à s’inquiéter. En cas d’aggravation de la leucoplasie, on peut observer une ulcération ou un bourgeonnement (gonflement) doublé d’un saignement au contact et de difficultés à bouger la langue de façon normale".

Quels sont les examens et analyses nécessaires ?

L’apparition de zones blanches sur les muqueuses buccales peut révéler d’autres affections comme un muguet, une irritation chronique dans le cas d’un appareil dentaire mal adapté ou encore une brûlure. Ce n’est qu’après avoir éliminé toutes ces différentes hypothèses que le médecin pourra poser le diagnostic d’une leucoplasie. On parle ici de diagnostic clinique par élimination.

Outre le facteur étiologique (le tabac), l’absence de symptôme et l’ancienneté des lésions blanches, le médecin posera son diagnostic en se fondant sur divers paramètres :

  • la topographie des lésions ;
  • la morphologie des lésions ;
  • la distribution des lésions (isolées ou associées) ;
  • le caractère inhomogène des lésions. Ce critère est essentiel puisqu’il détermine le pronostic et le traitement à mettre en place ;
  • la présence d’une induration (durcissement de la muqueuse).

Enfin, si un doute persiste, une biopsie est effectuée. Elle est généralement indiquée en cas de :

  • Leucoplasie idiopathique.
  • Leucoplasie homogène d’origine tabagique avec des lésions qui ne régressent pas malgré le sevrage. "C’est également vrai en cas d’apparition d’une zone d’érythroplasies ou d’une lésion suspecte" ajoute notre spécialiste.
  • Leucoplasie inhomogène.
  • Constatation d’évolution des lésions entre deux consultations.

Quels sont les traitements de la leucoplasie ?

Le traitement de la leucoplasie repose tout d’abord sur la suppression des facteurs déclenchants (tabac, chique). Le sevrage tabagique doit être mis en place immédiatement pour maximiser les chances de réversibilité des lésions. Il en va de même pour la consommation d’alcool dont l’arrêt doit être sérieusement envisagé.

En cas de surinfection à Candida albicans, des bains alcalins de bicarbonate de soude et des antifongiques locaux sont prescrits.

Un suivi clinique régulier est mis en place. Ce dernier doit être très précis, le médecin prend note des caractéristiques de la lésion initiale afin de pouvoir détecter toute modification de la leucoplasie. Tout changement entre deux consultations justifie l’analyse d’un échantillon par biopsie.

Ce n’est qu’en cas de transformation en cancer avérée que le traitement sera celui d’un cancer de la bouche. Chirurgie, chimiothérapie et radiothérapie pourront être dans ce cas envisagés.

Prévention : peut-on éviter la leucoplasie ?

La prévention consiste à limiter au maximum les facteurs de risque de leucoplasies. Pour cela, un mode de vie sain est essentiel.

Mon conseil de chirurgien ORL :

En cas de leucoplasies, l’arrêt du tabac est primordial ! S’ajoutent à cela plusieurs mesures comme :

  • maintenir ou adopter une alimentation saine et équilibrée ;
  • éviter toutes carences vitaminiques (Vitamines C, B, A, zinc, fer…) ;
  • adopter une bonne hygiène dentaire est un facteur à ne surtout pas négliger ;
  • traiter une éventuelle mycose le cas échéant.

Sites d’informations et associations

Société Française de Chirurgie Orale

Sources

Larousse encyclopédie médicale sur la leucoplasie