Un remède du Moyen-âge pourrait remplacer les antibiotiques !Adobe Stock
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La résistance aux antibiotiques devient un véritable problème. Selon Santé Publique France, nous risquons d’être dans une impasse thérapeutique d’ici 2050 car les traitements ne parviendront plus à lutter contre les bactéries. Mais un remède moyenâgeux serait la solution contre l’antibiorésistance selon des chercheurs britanniques.

Antibiotique : un remède millénaire à base d’oignon et d’ail

L’équipe de la School of Life Sciences de l’université de Warwick s’est penché sur un remède naturel en vieil anglais, présent dans un livre médical appelé “Leechbook de Bald” compilé vers la fin du IXe siècle ou le début du Xe siècle. En analysant cette recette à base d’oignon, d’ail, de vin et de bile d’estomac de vache, elle a découvert que le traitement a le potentiel de lutter contre les infections associées aux biofilms - des communautés de bactéries résistantes aux antibiotiques et difficiles à traiter.

La microbiologiste Freya Harrison, auteure principale de l’étude, a expliqué à CNN comment elle avait eu l’idée de tester le remède oublié : "quand vous le lisez en tant que microbiologiste, vous pensez qu'il doit faire quelque chose parce que chaque ingrédient qu'il contient a une activité antibactérienne lorsque vous le testez dans un tube à essai. Cela semble raisonnable à assembler". Son équipe a alors été tout simplement au supermarché pour acheter les ingrédients inscrits dans le vieux manuscrit.

Après leurs essais, les chercheurs sont parvenus à la conclusion le traitement appelé collyre de Bald tire sa “puissante activité anti-biofilm” du mélange de produits naturels dans son ensemble plutôt que d'un seul composé. Par ailleurs, les premières analyses semblent indiquer que la substance ne présente pas de danger pour l’organisme. La prochaine étape est d’effectuer des tests sur la peau humaine, mais elle a été retardée par la pandémie du COVID-19.

Un antibiotique du moyen-age utile contre les infections aux pieds

Si leurs travaux ont pris un peu de retard, les scientifiques britanniques pensent que cette concoction peut traiter les infections diabétiques du pied et des jambes. "Nous pensons qu'il est particulièrement prometteur pour le traitement des infections diabétique du pied. Il s'agit de l’ultime et ultra-résistante infection par biofilms. Elles représentent un énorme fardeau sanitaire et économique. Elles peuvent vraiment devenir incurable s", assure l’experte. "Il y a un risque élevé que ces ulcères diabétiques du pied soient complètement résistants à tout traitement antibiotique. Ensuite, il y a un risque qu'une personne développe une septicémie ... et les gens finissent par être amputés du pied ou de la jambe", rappelle-t-elle.

Ce remède moyenâgeux avait déjà été étudié

Ce n’est pas la première fois que le Dr Freya Harrison et son équipe étudient ce remède à base d’oignon, d’ail, de vin et de bile d’estomac de vache. En 2015, elles avaient découvert via des tests in vitro qu’il pouvait aider à lutter contre les “super-virus” comme le Staphylococcus aureus résistant à la méticilline responsable dont les infections entraînent des séjours hospitaliers plus longs et un risque plus élevé de sepsis (anciennement désigné par le terme de septicémie).

Santé : d’autres médicaments tirés de l’Histoire

Santé : d’autres médicaments tirés de l’Histoire© Adobe Stock

Trouver des traitements pour soigner les maladies dans des connaissances ancestrales n’est pas nouveau. En 1972, la chercheuse en pharmacie chinoise, Tu Youyou, a découvert l'artémisinine médicament antipaludique, dérivé de l’absinthe chinoise, après avoir parcouru des textes chinois anciens.

Les propriétés de la plante était connue en Chine depuis plus de 2000 ans, mais majoritairement ignorées par le monde médical jusqu’aux travaux de la scientifique. Et cette substance n’a pas révélé encore tous ses secrets thérapeutiques. Ses potentiels actions contre le cancer sont au cœur de plusieurs recherches.

Pendant ses propres travaux, la microbiologiste Freya Harrison a remarqué que le “Leechbook de Bald” proposait aussi un remède contre le paludisme à base d’absinthe. “Pendant tout ce temps, essentiellement le même remède se trouvait dans un texte médiéval anglais, mais personne ne l'avait pris au sérieux”, a-t-elle confié à CNN.

Le livre dont la compilation remonterait au règne d’Alfred Le Grand (871-899) cache peut être d ’autres soins potentiellement efficaces. Il contient en effet de nombreuses recettes par exemple contre les engelures (mélange d'œufs, de vin et de racine de fenouil), les douleurs aux pieds, le zona ou les troubles de la virilité.

Une page du livre Leechbook de Bald

Une page du livre Leechbook de Bald© Creative Commons

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Résistance aux antibiotiques : les risques à craindre

Résistance aux antibiotiques : les risques à craindre© Adobe Stock

On parle de résistance aux antibiotiques lorsque les antibiotiques ne parviennent pas à enrayer une infection bactérienne. Elle s’est progressivement développée au cours des dernières décennies à cause d’un usage important de ces traitements au sein de la population humaine mais également animale (élevage). La résistance à ces soins concerne désormais l’ensemble des bactéries pathogènes.

Ces nouvelles difficultés dans le traitement des infections n’est pas sans conséquence. La résistance aux antibiotiques conduit à une hausse des dépenses médicales, une prolongation des hospitalisations et une augmentation de la mortalité.

Le ministère de la Santé indique sur son site “en France, l’antibiorésistance est la cause de 5 543 décès par an chez des patients atteints d’infections à Bactéries Résistantes et 124 806 patients développent une infection liée à une bactérie résistante, selon une étude du centre européen de prévention et contrôle des maladies. À l’échelle mondiale, les résistances microbiennes seraient responsables de 700 000 morts par an”.

Les experts pensent que l’antibiorésistance poursuit sa progression, elle pourrait être une des premières causes de mortalité dans le monde, en provoquant jusqu’à 10 millions de décès, en 2050.

Des études estiment que le coût financier des soins atteindrait alors plus de 1,5 milliard d’euros en Europe et plus de 55 milliards de dollars aux USA.

Sources

L’antibiorésistance : pourquoi est-ce si grave ?, Ministère des solidarités de la santé, 12 septembre 2019

Résistance aux antibiotiques, Santé Publique France, 18 novembre 2019

Anti-biofilm efficacy of a medieval treatment for bacterial infection requires the combination of multiple ingredients, Scientific Reports, 28 juillet 2020

1,000-year-old medieval remedy could be potential antibiotic, scientists say, CNN, 28 juillet 2020

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