Intoxications alimentaires : les aliments les plus à risqueIstock
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En France, les intoxications alimentaires causent 232 à 358 décès par an

La mortalité attribuable aux maladies infectieuses d’origine alimentaire reste élevée en France, selon une étude de Santé Publique France. Le nombre de cas est estimé entre 1,28 et 2,23 millions par an, dont 15 800 à 21 200 hospitalisations. Les intoxications alimentaires provoqueraient entre 232 et 358 décès par an dans l’hexagone.

Et ce sont les infections à norovirus, tels que les Campylobacter spp. et la Salmonella spp., qui sont les plus fréquentes. La moitié des décès sont, quant à eux, imputables à la Salmonella et à la Listeria.

François-Xavier Weill, médecin microbiologiste et responsable du Centre National de Référence des Escherichia coli, Shigella et Salmonella à l’Institut Pasteur, rappelle toutefois que les infections sévères et les décès concernent principalement les personnes les plus fragiles.

“En attaquant notre organisme, les agents pathogènes s’attaquent un peu à un château fort, dont l’acidité gastrique représenterait les douves et les défenses immunitaires, les remparts”, explique l’expert. “Les personnes les plus à risque sont donc les enfants, les personnes âgées, les femmes enceintes et les patients dont le système immunitaire est affaibli par une maladie. Prendre un anti-acide peut aussi vous rendre plus sensible”.

Le chercheur explique que “les pathogènes ont deux moyens de faire des dégâts”. Ces derniers peuvent pénétrer et se multiplier dans les cellules du tube digestif : on parle d’une invasion. Mais certains d’entre eux, comme les Escherichia coli entéro-hémorragiques, sécrètent une toxine qui va se diffuser dans l’organisme à partir du tube digestif. Ces dernières peuvent s’attaquer aux cellules des vaisseaux sanguins, et entraîner de graves conséquences suite à des lésions du rein voire du cerveau.

Découvrez les aliments les plus à risque d’être porteurs de bactéries, telles que la Listéria, la Salmonella ou encore Escherichia coli.

Les fromages au lait cru ou à croûte fleurie

Les fromages au lait cru ou à croûte fleurie© Fotolia

Le réservoir des pathogènes dépend du type de bactérie. Toutes ne vont pas, en effet, se retrouver au même endroit, ni entraîner les mêmes conséquences. Certaines d’entre elles, comme la Salmonella ou E. coli, se retrouvent fréquemment dans le tube digestif des animaux d'élevage, notamment les porcs, les bovins et la volaille.

On peut donc souffrir d’une intoxication alimentaire en consommant des produits issus de ces bêtes. Ce peut être le cas du lait de vache, contaminé suite à une infection des mamelles ou un incident lors de la traite. Si la plupart des préparations à base de lait ne représentent aucun danger, puisqu’elles sont pasteurisées, on peut toutefois s’intoxiquer en consommant du lait cru ou du fromage au lait cru.

Récemment, plusieurs enfants ont été contaminés par E. coli entéro-hémorragiques, après ingestion de St Marcellin et de St Félicien. Les autoritaires sanitaires ont donc rappelé les précautions à prendre. Elles recommandent aux populations fragiles, à savoir les enfants de moins de 5 ans, les femmes enceintes et les personnes immunodéprimées, de ne pas consommer de lait cru ni de fromages au lait cru, excepté les fromages à pâte pressée cuite, comme le Comté, le Beaufort ou le Gruyère.

La charcuterie et la viande mal cuite

La charcuterie et la viande mal cuite© Adobe Stock

La viande en elle-même peut aussi être contaminée. “Le risque est présent lorsqu’on la consomme crue, ou pas assez cuite”, précise le Dr. François-Xavier Weill. Le spécialiste recommande d’être particulièrement vigilant quant à la cuisson des steaks hachés chez les jeunes enfants. Ces derniers doivent être “cuits à cœur”, sans décongélation préalable dans le cas de produits surgelés.

En effet, lorsqu’ils sont fabriqués de manière industrielle, le processus de hachage favorise la prolifération des bactéries. “Il suffit d’une carcasse porteuse de l’agent pathogène pour contaminer tout le lot de viande hâchée”, souligne le médecin. “A l’inverse, manger une entrecôte présente moins de risque, d'autant que le consommateur est généralement d'un âge plus avancé”.

Les produits de charcuterie cuits ou crus consommés en l’état, tels que le jambon, les produits en gelée ou le pâté, peuvent, quant à eux, être porteurs de Listeria. Le Ministère de la Santé recommande de préférer les produits préemballés à ceux achetés à la découpe, et de bien respecter les dates limites et les conditions de stockage.

François-Xavier Weill conseille également de bien se laver les mains après avoir manipulé de la viande crue, et de nettoyer tous les ustensiles utilisés (couteau, planche à découper…), afin de ne pas contaminer d’autres aliments ultérieurement. Des recommandations qui rejoignent celles de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses).

Les œufs et préparations à base d’œufs

Les œufs et préparations à base d’œufs© Istock

En cas de contact des coquilles avec les déjections des poules, ou lorsque le sang de ces dernières est contaminé, les œufs peuvent devenir porteur de Salmonella. Ces bactéries prolifèrent plus particulièrement lorsqu’elles sont soumises à une température comprise entre 35 °C et 37°C, et en présence d’eau, selon l’Anses. Elles peuvent contaminer toutes vos préparations à base d’œuf cru, comme la mayonnaise, le tiramisu ou la mousse au chocolat.

“Il ne faut surtout pas laisser traîner ce type d’aliments hors du frigo”, prévient le Dr. François-Xavier Weill. “Le mieux est de les préparer le moins longtemps possible avant leur consommation, et de les conserver au froid jusqu’au dernier moment”. Il faudrait ensuite les terminer dans les 24 h. En outre, il vaut mieux éviter de casser les œufs en bordure du récipient utilisé pour faire la préparation.

L’Anses recommande également de “ne pas laver les œufs avant de les stocker, car ce nettoyage fragilise la surface de la coquille, ce qui peut favoriser la pénétration des micro-organismes”. De même, il faudrait les conserver à une température stable, car les passages du chaud au froid (et inversement) entraînent le même problème.

Les graines germées crues (soja, luzerne, alfafa…)

Les graines germées crues (soja, luzerne, alfafa…)© Istock

“Les agents pathogènes présents dans les matières fécales des animaux peuvent contaminer les sols, et se répandre dans les nappes phréatiques”, rappelle le Dr. François-Xavier Weill. “Et pour pousser, les graines germées ont besoin d’eau et de chaleur. La première, qui arrive par irrigation, peut être contaminée. La seconde favorise la prolifération des bactéries”.

En 2011, une épidémie de contamination par E. coli entéro-hémorragique a frappé l’Europe. L’Allemagne était le pays le plus touché, avec plus de 50 décès et 800 hospitalisations. Une grande partie de ces patients ont dû être placés sous dialyse, en raison d’une atteinte rénale sévère. En cause : la présence de la bactérie sur des graines germées de fenugrec.

“Ce type de contamination reste très rare”, précise le médecin. Le Ministère de la Santé recommande toutefois de “laver soigneusement les légumes crus et les herbes aromatiques avant de les consommer”.

Le tarama, les poissons fumés et les coquillages

Le tarama, les poissons fumés et les coquillages© Adobe Stock

Les produits de la mer sont plus susceptibles d’être contaminés par la Listeria, et notamment le poisson cru ou fumé, les coquillages ou les œufs de poisson. Les femmes enceintes, les enfants ou les personnes immunodéprimées doivent éviter d’en consommer.

“Les coquillages peuvent aussi contenir des salmonelles”, précise le Dr. François-Xavier Weill. “Les eaux usées provenant d'habitations ou d'élevages agricoles peuvent se déverser dans les rivières, qui vont ensuite dans la mer. En filtrant l’eau, les coquillages vont concentrer ces bactéries”. Cela explique que l’on puisse facilement s’intoxiquer en mangeant des huîtres, puisqu’on les consomme crues.

“Le processus de cuisson tue la plupart des bactéries”, souligne le chercheur. “Seul l'agent du botulisme résiste à la pasteurisation classique”. Cette grave affection neurologique est provoquée par une puissante toxine, produite par la bactérie Clostridium botulinum. “Celle-ci se développe notamment dans les aliments mal conservés [dont certaines boîtes de conserve] et la maladie résulte en général d’une intoxication alimentaire”, précise l’Institut Pasteur.

Reconnaître et soigner une intoxication alimentaire

Reconnaître et soigner une intoxication alimentaire© Istock

“Les symptômes d’une intoxication alimentaire sont assez variés”, explique le Dr. François-Xavier Weill. Les personnes en bonne santé auront en général les signes classiques d’une gastro-entérite.

“Dans le cadre d’une contamination par une bactérie invasive, le premier signe est généralement une diarrhée, qui survient de 12h à 48h après ingestion de l’aliment infecté. Cette diarrhée est plutôt glaireuse, parfois sanglante, et s’accompagne de fièvre et de maux de ventre”, indique le spécialiste.

Chez les personnes fragiles, ces symptômes sont beaucoup plus forts, et entraînent donc une déshydratation rapide. Ils peuvent aussi persister et s’aggraver. “Si la bactérie se retrouve dans le sang, il y a un risque de septicémie. Cette dernière peut parfois provoquer une défaillance de tous les organes : c’est le choc septique”.

D’autre part, s’il s’agit d’une bactérie produisant une toxine, les symptômes ne sont pas les mêmes. “Le staphylocoque doré provoque des effets très rapides. Les signes sont d’énormes vomissements accompagnés d’une diarrhée, qui déshydratent très rapidement”.

Les Shiga-toxines, produites par les E. coli entéro-hémorragiques, entraînent une diarrhée sanglante. Mais elles peuvent aussi détruire la paroi des vaisseaux sanguins et causer des problèmes de coagulation et d’hypertension, indique l’Institut Pasteur. Dans 10 % des cas, elles provoquent un syndrome hémolytique et urémique qui peut être mortel, ou entraîner des complications neurologiques aboutissant parfois au coma.

Chez les adultes en bonne santé, les symptômes d’une intoxication alimentaire disparaissent en général d’eux-mêmes au bout de quelques jours. Le médecin recommande de bien se réhydrater, “fréquemment et à petites doses”. En revanche, “si l’infection est sévère, ou risque de le devenir car elle touche une personne fragile, des antibiotiques peuvent être prescrits”. Une réhydratation par intraveineuse peut aussi être préconisée pour ces personnes. En revanche, en cas de septicémie ou de contamination par une toxine, l’hospitalisation est nécessaire.

Sources

Estimation de la morbidité et de la mortalité liées aux infections d'origine alimentaire en France métropolitaine, 2008-2013, Santé Publique France, 9 janvier 2018.

Consommation de fromages à base de lait cru : rappel des précautions à prendre, Ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation, 30 avril 2019. 

Listériose, Ministère de la Santé et des Solidarités, 19 avril 2019. 

Salmonellose, Anses, 22 décembre 2017. 

Botulisme, Institut Pasteur, mai 2019. 

Escherichia coli entérohémorragiques (ECEH), Institut Pasteur, juillet 2018. 

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