Définition : qu’est-ce que l’anorexie mentale ?

L’anorexie mentale est un combat acharné et dangereux contre toute prise de poids. La personne atteinte est la victime de peurs irraisonnées en lien avec la nourriture, le fait de s’alimenter et de grossir. Elle conserve la plupart du temps un appétit normal, mais lutte de façon permanente contre la faim et le besoin de s’alimenter. Elle s’impose une perte de poids graduelle qui peut aller jusqu’à la maigreur extrême, mettant sa santé et sa vie en danger.

La recherche d’amaigrissement peut s’accompagner de troubles psychologiques comme l’anxiété ou la dépression. Le déni est aussi une composante importante de l’anorexie. La maladie est le plus souvent masquée par les malades qui disent manquer d’appétit ou éprouver des nausées.

Dans la littérature, deux types d’anorexie mentale sont décrits :

L’anorexie mentale de type restrictif

Elle est évoquée lorsque la personne n’a recours qu’à un régime ultra restrictif, accompagné parfois d’une activité physique intensive.

L’anorexie mentale avec crises de boulimie

Certaines personnes associent les symptômes de l’anorexie mentale avec ceux de la boulimie, en ayant des conduites compensatoires pour augmenter la perte de poids ou pour faire face à une prise de nourriture jugée trop importante. Il s’agit la plupart du temps de vomissements ou de prises de médicaments purgatifs. On ne parle alors pas de boulimie, mais bien d’anorexie avec crises de boulimie.

À noter : l’anorexie mentale ne doit pas être confondue avec l’anorexie. Si la première est une maladie, la seconde est un symptôme caractérisé par la perte d’appétit. On le retrouve dans diverses maladies comme la gastroentérite ou les cancers.

Chiffres : l’anorexie mentale est-elle fréquente ?

L’anorexie mentale touche majoritairement les adolescents, et surtout les filles de 12 à 20 ans. Son impact est évalué entre 0,9 % et 1,5 % des jeunes femmes, pour 10 fois moins de garçons.

Quels sont les symptômes de l’anorexie mentale ?

Le diagnostic de l’anorexie mentale repose sur des critères précis, issus des classifications psychiatriques internationales (CIM, DSM V). Ils font référence à :

Une façon inadéquate de s’alimenter

La personne anorexique s’impose des restrictions croissantes.

  • Une réduction des portions alimentaires ingérées.
  • Une préoccupation obsessionnelle de la teneur en calories des aliments et de leur mode de préparation.
  • La suppression de certains aliments rapidement considérés comme « tabous », comme les féculents, les sucres et les graisses.
  • De possibles phases boulimiques, caractérisées par une très importante et très rapide consommation des aliments « interdits ».
  • Des stratégies de vomissements provoqués ou de prises de laxatifs pour accélérer la perte de poids, ou pour compenser un épisode hyperphagique.

Une perte de poids

Elle doit alerter lorsqu’elle est constante et significative, en particulier lorsqu’un régime fonctionne « trop bien ». Chez la personne anorexique, la perte de poids s’accompagne d’une peur obsessionnelle de grossir, et de l’impossibilité de se maintenir à un poids stable.

La maigreur est aussi un symptôme : on considère qu’il existe un risque d’anorexie lorsque la personne a un Indice de Masse Corporel (IMC) inférieur à 17,5. L’IMC correspond au poids (en Kg) divisé par le carré de la taille (en cm). Il s’exprime en kg/m2.

Une perception de soi erronée

« L’anorexie mentale se caractérise par une distorsion de l’image du corps, explique Jean-Michel Huet. La personne anorexique se voit grosse et fait tout pour ne plus l’être. » On parle de dysmorphophobie.

Une faible estime de soi

L’anorexie mentale s’accompagne d’une image de soi dégradée et d’un manque de confiance.

L’absence de règles depuis au moins 3 mois

Une perte de poids rapide et excessive affecte l’organisme, et l’arrêt des règles en est l’un des premiers symptômes.

Quelles sont les causes de l’anorexie mentale ?

Les causes de l’anorexie sont complexes, controversées et, en définitive, encore mal identifiées. Il est impossible de trouver une cause unique et déterminante. Chaque cas est différent, et il s’agit plutôt d’un faisceau de facteurs psychologiques, peut-être génétiques, pour certains chercheurs, et en interaction étroite avec l’environnement et la famille. On peut cependant identifier des points de départ récurrents de l’anorexie mentale chez des personnes déjà fragilisées par ailleurs :

  • Un régime amaigrissant.
  • Un événement traumatisant, comme une agression, un divorce, un deuil, ou un bouleversement du quotidien.

Anorexie mentale : quels sont les facteurs de risques

Il existe une multiplicité de facteurs de vulnérabilité à l’anorexie mentale.

Un mal-être

La personne anorexique peut rencontrer des problèmes dans la construction de soi et le passage à l’état adulte. Un mal-être peut se développer en rapport notamment avec les changements physiques qui interviennent à la puberté, au moment où la question du genre et de la sexualité se posent.

Des problèmes relationnels importants

Ils peuvent être liés à l’environnement, au milieu socio-culturel ou à la famille. La personne anorexique peut souffrir d’un manque de repères, de relations familiales difficiles marquées par des conflits, notamment lorsqu’il y a certaines formes de pressions.

Des gènes prédisposants

Des chercheurs se sont intéressés à l’aspect génétique de l’anorexie mentale. Ils ont découvert que certaines familles étaient davantage touchées par la maladie, notamment lorsqu’il s’agit de garçons. Cependant, ils manquent encore de preuves dans ce sens.

Quelles sont les personnes à risques d’anorexie mentale ?

Les personnes atteintes d’anorexie mentale sont majoritairement des adolescentes, mais d’autres profils sont également à risque.

Les adolescents au moment de la puberté

L’anorexie mentale touche le plus souvent des très jeunes femmes et débute statistiquement entre 14 et 17 ans, avec un pic à l’âge de 16 ans. Dans des cas rares, la maladie peut survenir plus tôt, vers 8 ans, ou plus tard, après 18 ans. « On observe néanmoins de plus en plus de cas vers la vingtaine, ou même plus tard, vers la trentaine ou la quarantaine », pointe notre spécialiste.

Les professions qui contraignent le corps

Parce qu’il nécessite généralement d’avoir une silhouette très fine, le mannequinat est bien sûr une profession qui présente un risque de basculer dans l’anorexie mentale. C’est aussi le cas des métiers qui exigent des performances physiques, et pour lesquels il est important d’avoir une certaine maîtrise de son poids et de son image corporelle, comme les danseurs, les athlètes, ou encore les acteurs.

Les personnes souffrant de certaines pathologies chroniques

Être atteint d’une maladie impliquant de suivre un régime alimentaire particulier, comme le diabète ou l’hypercholestérolémie, augmenterait les risques de développer une anorexie mentale.

Quelle est la durée de l’anorexie mentale ?

D’après les chercheurs de l’Inserm, la phase anorexique dure en moyenne 1 an et demi à 3 ans, mais cet état peut se prolonger jusqu’à 5 ans. Au-delà de la cinquième année, deux tiers des personnes seraient guéries. On parle d’anorexie mentale chronique pour les autres, avec une rémission possible plus tardivement.

« Il est important de rappeler que l’on guérit de l’anorexie lorsqu’elle est bien prise en charge », souligne Jean-Michel Huet.

L’anorexie mentale est-elle une maladie contagieuse ?

L’anorexie mentale n’est pas contagieuse.

Qui, quand consulter en cas d’anorexie mentale ?

Tout amaigrissement inhabituel et prolongé chez un adolescent doit faire suspecter un début d’anorexie et motiver une consultation médicale. Une fois le diagnostic posé, la prise en charge est pluridisciplinaire et le traitement doit être mis en œuvre le plus vite possible. Un médecin coordinateur assure l’organisation de l’ensemble des intervenants pour traiter à la fois les aspects nutritionnels, psychologiques et médicaux.

Le médecin traitant ou le pédiatre

Une simple consultation médicale doit permettre de mettre en évidence la perte de poids et de discuter avec la personne suspectée d’anorexie. Il s’agit principalement de poser le diagnostic et d’essayer de lui faire comprendre le problème, ainsi que de l’expliquer à ses proches. Le médecin adresse ensuite la personne anorexique à un psychiatre ou à un psychologue spécialiste des troubles alimentaires, ainsi qu’à un nutritionniste.

Le conseil de Jean-Michel Huet, psychothérapeute spécialiste des troubles alimentaires :

« Il est important que les parents restent attentifs à un éventuel amaigrissement chez leur enfant. Le diagnostic est souvent fait très tard, au moment où l’adolescent a déjà perdu beaucoup de poids, et à la faveur d’un incident comme un malaise à l’école ou dans la rue. La jeune fille ou le jeune garçon peut guérir très rapidement si le diagnostic est posé dès les prémices de la maladie. »

Un thérapeute spécialisé dans les troubles alimentaires

Il est important de consulter un psychologue, un psychiatre ou un psychothérapeute spécialisé dans la prise en charge des troubles du comportement alimentaire. « Le thérapeute s’attache d’abord à faire reconnaître et accepter sa maladie à la personne anorexique, explique notre psychothérapeute. Il s’agit ensuite de faire émerger les peurs profondes sur lesquelles on essayera de travailler. »

Le nutritionniste

Son rôle est de redonner à la personne anorexique des clés pour retrouver une alimentation équilibrée et suffisante. Il dresse un état des lieux et propose un programme individualisé.

Quelles sont les complications de l’anorexie mentale ?

Elles sont liées à la dénutrition et aux comportements associés, comme les vomissements, mais il peut s’agir aussi de complications psychiatriques majeures, comme la dépression.

Les complications à court terme de l’anorexie mentale

En phase aigüe, la maladie peut affecter plusieurs fonctions de l’organisme. Ces troubles sont le plus souvent réversibles et disparaissent à l’arrêt de la maladie.

  • Une atteinte cardio-vasculaire. Elle se manifeste par une baisse du rythme cardiaque, des troubles du rythme ou des chutes de tension.
  • Des manifestations hématologiques qui passent par une anémie, une leucopénie et une thrombopénie.
  • Des perturbations neurologiques.
  • Des troubles métaboliques du cholestérol et du glucose.
  • Des problèmes rénaux.
  • Une dépression nerveuse. Parfois déjà présente, elle risque de s’aggraver fortement.
  • Un appauvrissement de la vie sociale, sexuelle et affective.
  • Des difficultés scolaires ou professionnelles.

Les complications à long terme de l’anorexie mentale

Il s’agit surtout de troubles osseux, avec un risque d’ostéoporose lié à une moindre assimilation du calcium. L’anorexie mentale peut aussi être la cause de problèmes dentaires lorsqu’elle s’accompagne de vomissements. Quand ils sont fréquents, ceux-ci sont responsables d’une usure accélérée des dents.

Anorexie mentale : quels sont les examens et les analyses à réaliser ?

Dès les premiers signes d’amaigrissement, le médecin traitant peut réaliser un bilan médical. Le but est de repérer les symptômes de l’anorexie mentale, mais aussi les signes de gravité, comme l’absence de règles chez la jeune fille. Le psychiatre ou le psychologue, qui prend ensuite en charge la personne anorexique, réalisera un bilan de son état psychologique.

Quels sont les traitements de l’anorexie mentale ?

Le traitement de l’anorexie mentale est nécessairement pluridisciplinaire. L’équipe médicale prend en compte l’ensemble des aspects de la maladie et assure une prise en charge à la fois sur le plan somatique et sur le plan psychologique. Les soins ne se conçoivent que dans la durée et ils doivent être mis en place le plus précocement possible. Ils nécessitent l’adhésion du malade, parfois longue à obtenir, et celle de la famille.

La prise en charge nutritionnelle de la personne anorexique

Le nutritionniste fixe des objectifs, avec en premier lieu, celui de cesser de maigrir. Il établit ensuite un programme de renutrition adapté aux besoins individuels et visant une reprise de poids.

La thérapie nutritionnelle a pour but de réapprendre à manger à la personne anorexique. Elle insiste sur le caractère sociable et agréable de la prise des repas. La personne malade doit retrouver une alimentation équilibrée et régulière, en quantité raisonnable, et répartie sur 4 repas. Elle apprend à appréhender les aliments « tabous » qu’elle ne pouvait plus manger, comme le beurre ou le sucre, et introduit à nouveau des sucres lents dans ses menus.

Le nutritionniste travaille également sur les comportements compensatoires de purge que le patient a mis en place. Le but est de déshabituer la personne anorexique à se faire vomir ou à utiliser des médicaments laxatifs, notamment en lui apportant des éléments théoriques qui prouvent l’inefficacité de tels comportements.

Le soutien psychothérapeutique

Faire entrer la personne anorexique dans une démarche de psychothérapie est indispensable en parallèle de la prise en charge nutritionnelle. Cela conditionne la réussite du traitement. Les psychothérapies sont généralement proposées de manière individuelle, avec la possibilité d’une thérapie Cognitive et Comportementale (TCC), d’une psychanalyse, ou autres.

L’objectif est d’améliorer l’estime de soi de la personne anorexique et de travailler sur d’éventuels conflits psychiques. Le soutien peut aussi s’adresser à la famille du malade, touchée de plein fouet par l’anorexie. La psychothérapie aide la personne à :

  • Accepter les soins et la nécessité de prendre du poids.
  • Modifier ses comportements vis-à-vis de l’alimentation, en acceptant de se nourrir de manière équilibrée et en y reprenant du plaisir.
  • Renforcer son estime d’elle-même et lui permettre de se sentir en confiance.
  • Améliorer ses relations familiales et sociales.
  • Traiter des conflits ou des souffrances psychiques.

La thérapie familiale apporte également souvent des bénéfices. Elle se centre sur la famille et les interactions au sein de celle-ci, impliquant les parents et la fratrie. L’objectif est de renforcer les liens intra-familiaux pour replacer la famille au cœur d’une dynamique constructive. Elle représente aussi un soutien important pour la famille elle-même.

La prise en charge médicamenteuse de l’anorexie mentale

Des médicaments sont parfois prescrits par certains psychiatres, sans que ce soit obligatoire ni indiqué pour tous les cas d’anorexie mentale. Ils ne remplacent pas non plus le soutien psychothérapeutique. Il s’agit essentiellement des médicaments susceptibles de soulager la dépression et l’anxiété :

  • Les antidépresseurs. Certains, comme la fluoxétine, ont montré une certaine efficacité pour lutter contre la dépression qui peut être associée à l’anorexie. Ils pourraient aussi aider la personne anorexique à maintenir le poids normal obtenu après une hospitalisation.
  • Les anxiolytiques. Des benzodiazépines, en particulier, peuvent être prescrits sur une courte période pour réduire l’anxiété qui envahit les anorexiques avant les repas.

L’hospitalisation de la personne anorexique

La prise en charge en ambulatoire est toujours privilégiée. Il s’agit, pour la personne anorexique, de poursuivre des soins tout en continuant à vivre normalement dans sa famille. Mais une hospitalisation peut se révéler incontournable, quand elle ne modifie pas son comportement, n’adhère pas au projet thérapeutique et encourt un danger vital.

Plusieurs services hospitaliers ont développé une prise en charge spécifique et de qualité des troubles du comportement alimentaire. Ils proposent des programmes nutritionnels, des entretiens thérapeutiques quotidiens, l’intégration à des groupes de parole, ou encore la possibilité de pratiquer de l’art-thérapie, du sport et des activités culturelles et culinaires. La prise en charge peut se faire à temps plein, ou seulement en hôpital de jour, avec la possibilité de rentrer chez soi le soir.

Comment prévenir l’anorexie mentale ?

Les troubles du comportement alimentaires ont des origines complexes qui associent des facteurs personnels et collectifs. Bien qu’il n’y ait aucun moyen sûr d’empêcher l’anorexie mentale, la prévention se pratique dès l’enfance et auprès des adolescents, en favorisant la parole et en développant l’écoute. Il s’agit par exemple de :

  • Apprendre à l’enfant à développer des comportements sains vis-à-vis de sa santé et de la nourriture. Lui enseigner à se fier aux signaux de son corps pour reconnaître ses besoins.
  • Travailler avec lui sur l’image du corps et valoriser la diversité. Éviter toute blague ou remarque sur ce sujet, et éduquer l’enfant à prendre du recul par rapport aux images véhiculées dans les médias.
  • Réévaluer ses propres notions sur le « poids idéal » et les conduites alimentaires.
  • Proposer dès le plus jeune âge des activités physiques, de détente, sans survaloriser les performances sportives.
  • Mettre l’accent sur la convivialité des repas.
  • Valoriser et aider l’enfant à s’épanouir dans son environnement social et son milieu de vie (intégration à des groupes, participation à des activités collectives).

Sites d’informations et associations sur l’anorexie mentale

Sources

"Anorexie mentale, un trouble essentiellement féminin parfois mortel", Inserm.

"Anorexie mentale : prise en charge", HAS.

"Anorexie mentale", l'Assurance Maladie.