Définition : qu’est-ce que la pré-éclampsie ?

La pré‐éclampsie est une maladie de la grossesse caractérisée par une élévation de la pression artérielle, appelée hypertension artérielle gravidique, et par la présence de protéines ou d'albumine dans les urines (la protéinurie). Elle peut se manifester pendant la grossesse, ou peu de temps après.

Aussi appelée "toxémie gravidique", la pré-éclampsie tire son nom du fait qu’elle peut potentiellement conduire à une crise d’éclampsie, une complication grave qui se traduit par des convulsions, semblables à une crise d’épilepsie.

Après l’apparition des premiers symptômes, la pré-éclampsie peut s'aggraver rapidement. Elle nécessite une prise en charge immédiate qui peut aller jusqu’au déclenchement de l’accouchement.

Chiffres : la pré-éclampsie est-elle fréquente?

La pré-éclampsie est une maladie qui touche environ 5 % des grossesses. Cela correspond à 1 cas pour 20 grossesses, soit 40 000 femmes en France chaque année. La plupart du temps, un suivi permet d'éviter les complications graves. Seul 1 cas sur 10 développe une forme sévère qui nécessitera une hospitalisation prolongée.

Quels sont les symptômes de la pré-éclampsie ?

Il est important que tout signe inhabituel soit rapporté immédiatement au médecin qui suit la grossesse, surtout s’ils sont persistants ou qu’ils s’aggravent. Cependant, la pré-éclampsie ne provoque pas toujours de symptômes.

Les symptômes de la pré-éclampsie modérée

L'hypertension artérielle est l’un des premiers signes de la pré-éclampsie, lorsqu’elle dépasse 14/9 au repos. Elle produit notamment un œdème des mains, des pieds et du visage. Ces gonflements sont la cause d’une prise de poids brutale qui peut aller jusqu'à plusieurs kilos en quelques jours. La patiente peut aussi ressentir des douleurs abdominales, des vomissements et une diminution ou un arrêt des urines.

Les symptômes d'une pré-éclampsie sévère

Lorsque la pré-éclampsie est sévère, d'autres symptômes apparaissent tels que des troubles visuels, des maux de tête persistants, des bourdonnements d’oreilles, l’impression de voir des taches noires ou lumineuses, ou encore une douleur forte juste sous des côtes, en particulier du côté droit.

Les causes de la pré-éclampsie 

La pré-éclampsie se produit à la suite d’anomalies de la formation des vaisseaux sanguins du placenta, l’organe qui permet les échanges entre la mère et le fœtus. Le placenta défectueux ne parvient pas à fournir le débit sanguin nécessaire au bébé et rejette des débris placentaires et des cellules fœtales dans le sang maternel. Pour compenser, la pression artérielle de la mère augmente alors dangereusement, tandis que le fœtus ne reçoit toujours pas assez de nutriments.

Si l'on identifie le phénomène, on ignore toujours pourquoi il se produit. "La difficulté principale de cette maladie est que l’on n’en connait pas exactement les causes, nous n’avons que des hypothèses, confirme le Dr Mathias Boughanim, gynécologue obstétricien. L’une d’entre elles est l’incompatibilité génétique des parents. Elle conduirait à un phénomène immunologique provoquant une anomalie du placenta".

Le placenta est constitué pour moitié des gènes du père biologique. Si le sperme n'a pas été suffisamment exposé au corps de la mère, celui-ci pourrait rejeter le placenta comme un corps étranger. Ce rejet a été observé dans différents cas de figure, comme l’utilisation prolongée de préservatifs, un changement de partenaire, ou encore une procréation médicalement assistée avec un don de sperme.

Photo : micrographie d'une vascularite qui se produit dans la pré-éclampsie

Les causes de la pré-éclampsie © Creative Commons

Crédit : Nephron, 13 juillet 2010 - CC - Licence : https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/deed.en

Les facteurs de risque de la pré-éclampsie 

La pré-éclampsie est une maladie multifactorielle. Plusieurs facteurs de risque ont ainsi été identifiés :

  • L’âge de la mère : les risques de pré-éclampsie sont augmentés si elle a plus de 40 ans ou moins de 18 ans au moment de la grossesse.
  • L’obésité (IMC supérieur à 30) augmenterait aussi ce risque, selon certaines études.
  • L’hypertension et le diabète.
  • Des grossesses multiples.
  • Une insuffisance en vitamine D.

Quelles sont les personnes à risque de pré-éclampsie ?

Les femmes enceintes ayant des antécédents de pré-éclampsie

Les personnes à risque sont les femmes qui vivent une grossesse pour la première fois, mais surtout celles qui ont déjà souffert de pré-éclampsie. La pré-éclampsie est une affection spécifique de la grossesse. Elle ne survient pas en dehors de cet état et guérit dans le post-partum, c’est-à-dire la période suivant l'accouchement jusqu'aux premières règles. 

Les femmes enceintes ayant une susceptibilité génétique

Des études scientifiques menées en 2005 montrent une susceptibilité génétique de la maladie qui semble contribuer à hauteur de 50% à la survenue de ce syndrome. Le gène de la pré-éclampsie a été identifié dans des familles où plusieurs femmes avaient été touchées. Il est présent dans les cellules de l’utérus et du placenta. Une quinzaine d'autres gènes seraient aussi impliqués.

Quelle est la durée de la pré-éclampsie ?

La durée de la pré-éclampsie est variable selon les cas de figure. Généralement, les premiers symptômes apparaissent durant la deuxième moitié de la grossesse, après 20 semaines de gestation, et se terminent au moment de l’accouchement, provoqué ou non. Cependant, la pré-éclampsie peut se développer après l'accouchement dans certains cas. Elle apparait le plus souvent après 4 jours, mais parfois les symptômes peuvent se développer jusqu'à 6 semaines post-partum.

La pré-éclampsie est-elle une maladie contagieuse ?

Cette maladie n'est pas due à un virus ou à une bactérie. Elle ne peut donc pas se transmettre à une autre personne, comme un rhume.

Qui, quand consulter pour une pré-éclampsie ?

Tout symptôme inhabituel doit être immédiatement rapporté au médecin qui suit la grossesse. Le risque de pré-éclampsie est aussi évalué au cours des 7 consultations obligatoires de suivi de la femme enceinte auprès d'un spécialiste. À partir du 5ème mois de grossesse, soit 20 semaines de gestation, l’un des principaux buts de ces consultations prénatales est précisément de détecter les signes d’une pré-éclampsie.

Les complications d'une pré-éclampsie 

Une pré-éclampsie peut évoluer rapidement, surtout au cours du troisième trimestre de la grossesse, et provoquer des complications graves mettant alors en jeu, à court terme, le pronostic vital de la mère et celui de son futur bébé. Il n’y a en revanche pas de risque majeur lorsque les symptômes apparaissent après l’accouchement.

La crise d'éclampsie

La crise d'éclampsie touche en premier lieu le cerveau. Bien que celle-ci soit rare (moins de 1% des cas de la maladie), la crise peut se manifester aussi bien en fin de grossesse qu’après l’accouchement. Les principaux symptômes sont des douleurs abdominales, des maux de tête violents, des problèmes de vision, et enfin une diminution de la vigilance. Dans les cas les plus sérieux, l’éclampsie se manifeste par la survenue de crises convulsives, qui ressemblent aux crises d’épilepsie, et peuvent conduire à une hémorragie cérébrale et au coma.

Le syndrome HELLP (Hemolysis, Elevated Liver enzymes, and Low Platelets) :

Le syndrome HELLP survient chez 10 à 20% des femmes souffrant de pré-éclampsie. Il se caractérise par la destruction des globules rouges dans le foie, d’une inflammation de celui-ci, et enfin d'une diminution du nombre de plaquettes sanguines. Le syndrome HELLP présente un risque important d'hémorragie. Cette complication est rare, mais grave. Lorsqu'elle survient, à la fin du troisième trimestre, une césarienne doit être pratiquée en urgence.

L'hématome rétroplacentaire

L’hématome rétroplacentaire est un décollement prématuré du placenta provoquant un hématome, c’est-à-dire une poche de sang, entre le placenta et l’utérus. Ce décollement douloureux gêne, voire interrompt, les échanges sanguins entre la mère et le fœtus. Une césarienne doit être pratiquée en urgence.

Une dégradation des organes vitaux maternels

La pré-éclampsie grave peut affecter différents organes et provoquer:

  • Une insuffisance rénale aiguë.
  • Un accident vasculaire cérébral.
  • Un œdème aigu du poumon.
  • Des troubles de la coagulation.

Certaines études ont montré que les femmes qui avaient eu une pré-éclampsie présentaient des risques accrus de souffrir d’un problème cardio-vasculaire à long terme, parfois 10 ou 20 ans après avoir accouché.

Un retard de croissance du bébé

Le défaut de fonctionnement du placenta entraine une baisse du volume de liquide amniotique. Le fœtus reçoit moins de nutriments et d’oxygène qu’il ne devrait et l’épuration des toxines ne se fait plus correctement. En conséquence, le fœtus est en souffrance et sa croissance est ralentie. On parle alors de retard de croissance intra-utérin (RCIU).

Une naissance prématurée

La pré-éclampsie est responsable d’un tiers des naissances de grands prématurés en France, soit environ 13 000 par an.

Une interruption volontaire de grossesse

Cette solution doit être envisagée lorsque le pronostic vital de la mère est engagé, mais que le fœtus n’est pas assez développé pour un accouchement.

Quels sont les examens et analyses permettant de diagnostiquer une pré-éclampsie ?

Des tests et des mesures simples permettent de révéler l’existence d’une pré-éclampsie.

Un bilan médical

Il s’agit principalement d’une prise de tension qui permet de mesurer le niveau d'hypertension de la patiente, et d’une analyse d'urines pour vérifier le taux de protéines. Un taux supérieur à 0,3 g/24h signale une pré-éclampsie, alors qu’une personne en bonne santé ne doit pas avoir de protéines dans les urines.

Si la maladie est diagnostiquée, d'autres tests se révèleront nécessaires, comme une prise de sang, qui permettra de vérifier le bon fonctionnement du foie et des reins, ou de nouvelles analyses d'urines encore plus poussées. Ces dernières permettront de déterminer la sévérité de la maladie.

Enfin, une échographie pourra faire état d’un retard de croissance du fœtus, d’un volume de liquide amniotique insuffisant, ou encore d’une irrigation sanguine anormale des artères ombilicales ou cérébrales du fœtus.

Le test de pré-éclampsie : Elecsys

Les résultats d’une étude récente ont démontré l’efficacité du test sanguin Elecsys pour prédire l'absence de pré-éclampsie à très court terme, et son développement au cours des 4 semaines suivantes. En fonction des résultats du test, les médecins peuvent exclure ou prédire de manière fiable le développement de cette maladie, et cibler en toute confiance les femmes présentant un risque élevé de pré-éclampsie.

Commercialisé depuis 2010, le test Elecsys est actuellement disponible dans tous les pays d’Europe, d’Amérique Latine, du Moyen-Orient, d’Afrique et d’Asie excepté aux États-Unis et au Japon.

Quels sont les traitements de la pré-éclampsie ?

La prise en charge de la pré-éclampsie varie en fonction de la sévérité des symptômes. "Cependant, seul l’accouchement mettra réellement fin au problème", souligne le Dr Boughanim.

Le repos à domicile ou à l’hôpital

Pendant la grossesse, en cas de pré-éclampsie sans complication, la femme enceinte est contrainte d’observer un repos complet, mais elle peut rester à son domicile. Elle doit se placer en position couchée sur le côté gauche, afin de faciliter l’arrivée du sang au placenta.

En cas de pré-éclampsie sévère, l’hospitalisation est indispensable pour permettre un suivi étroit de la grossesse, et pour éviter les complications possibles de la pré-éclampsie. Ce suivi permet d’évaluer la gravité de la maladie, et d’en mesurer l’impact sur la mère et sur le fœtus pour décider des mesures à prendre. Celles-ci peuvent impliquer la mise en place d’un traitement, le déclenchement de l’accouchement ou une césarienn e. L’objectif étant de prolonger la grossesse au maximum afin que l’enfant se développe autant que possible in utéro.

Les traitements médicamenteux de la pré-éclampsie

La femme enceinte atteinte de pré-éclampsie reçoit principalement un traitement contre l’hypertension artérielle. Dans les cas graves, elle peut aussi se voir prescrire un médicament dont le but est de prévenir les convulsions. Jusqu’à la 34e semaine d’aménorrhée, elle reçoit également des corticoïdes afin de favoriser la maturation des poumons du fœtus, ce qui est préférable en cas de naissance prématurée. En cas d'hypertension artérielle incontrôlable, le seul traitement est l'accouchement, par voie basse naturelle ou par césarienne, et la délivrance du placenta.

Les traitements de la crise d'éclampsie

La crise d'éclampsie peut être traitée en amont, de manière préventive, en administrant à la femme enceinte du sulfate de magnésium en perfusion. Le traitement d’une crise d’éclampsie consiste à dégager les voies respiratoires pour éviter l’asphyxie, à administrer un médicament contre les convulsions, et à programmer un accouchement par césarienne en urgence, dès la fin des convulsions.

La prise en charge après l'accouchement

Une consultation médicale 6 semaines après la pré-éclampsie est indispensable pour s’assurer de l’évolution de la maladie et, si besoin, d’adapter le traitement qui contrôle la pression artérielle. Après l’accouchement, les symptômes disparaissent le plus souvent sans laisser de séquelles.

Peut-on prévenir la pré-éclampsie?

Aucun moyen ne permet à l’heure actuelle de détecter précocement le risque de pré-éclampsie d’une femme enceinte. Les médecins ne disposent de marqueurs capables de détecter la maladie avant l’apparition des symptômes qu’à partir de 20 semaines de grossesse.

Des protocoles visant à surveiller de près la femme enceinte sont très rapidement mis en place lorsqu’il existe des antécédents génétiques, ou des facteurs physiques induisant un risque élevé de développer une pré-éclampsie.

Le repos et une surveillance étroite

La mise au repos est systématique pour les femmes enceintes qui présentent un risque de pré-éclampsie. Une surveillance mensuelle étroite est aussi mise en place. Les médecins vérifient la tension artérielle et pratiquent des analyses régulières pour repérer le plus vite possible les signes d’aggravation et mettre en œuvre un traitement adapté. Le gynécologue recherche aussi d’éventuelles anomalies dans le liquide amniotique et vérifie le rythme cardiaque pour s’assurer que le fœtus se porte bien.

Les effets préventifs de l'aspirine

Des travaux récents ont porté sur l’effet préventif de l’aspirine qui réduirait d’un facteur de 2 à 4 le risque de pré-éclampsie. Son efficacité est maximale quand la dose administrée est supérieure à 75 mg et quand elle est introduite avant 16 semaines d’aménorrhée. L’introduction précoce de l’aspirine permettrait surtout de prévenir les pré-éclampsies sévères et avant terme. Elle s'adresse aux femmes qui ont déjà souffert de pré-éclampsie. Cependant, toute prise d’aspirine au cours de la grossesse doit être effectuée sous contrôle médical, et jamais avant la douzième semaine d’aménorrhée.

L'aspirine peut-elle prévenir le risque à coup sûr ?

L’avis du docteur Mathias Boughanim, gynécologue obstétricien :

"Les effets préventifs de l’aspirine ne sont pas établis à 100%. Cependant, dans la pratique, il permet de fluidifier le sang et donc d’améliorer l’apport en nutriments du fœtus chez des femmes qui ont déjà eu plusieurs pré-éclampsies. On offre au fœtus une chance supplémentaire d’accroitre son développement in utéro".

Sites d'informations et associations

Sites d'informations:

Associations:

Sources

"Qu'est-ce que la pré-éclampsie ?", Hôpitaux Universitaires de Genève.

"Pré-éclampsie et éclampsie", MSD Manuals.