J’ai survécu à un cancer du côlon… et celui-ci m’a marquée à jamaisIstock
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Habituée des problèmes digestifs, Elisabeth* n’aurait jamais imaginé qu’un jour, on lui annoncerait qu’elle souffrait d’un cancer. Mais en 2014, la vie de cette mère célibataire, employée de la fonction publique, bascule.

“J’étais très fatiguée, je souffrais de troubles intestinaux et d’infections urinaires à répétition”, se rappelle-t-elle. “Mais jamais je n’aurais pensé que c’était aussi grave, puisque je souffrais souvent de dérangement intestinal”.

Plusieurs mois s’écoulent avant le diagnostic

Pendant cette période, Elisabeth enchaîne les visites chez le médecin. Celui-ci pense d’abord à l’utérus ou aux ovaires, mais ces derniers semblent en bonne santé. De même, les résultats des prises de sang n’indiquent rien d’alarmant. “J’ai eu de la chance que le médecin m’écoute, malgré tout, et continue à chercher l’origine du problème”, confie-t-elle.

Au fil des examens, elle finit par découvrir l’origine de son mal. “On devait me faire une coloscopie. Mais l’endoscope n’a pas pu passer, car mes intestins étaient bouchés par une tumeur”. Si les médecins ignorent, à ce moment-là, le caractère cancéreux de celle-ci, pour Elisabeth, cela ne fait aucun doute : elle sait. Même si l’attente de la confirmation est difficile. Quelques jours plus tard, on lui annonce qu’elle souffre d’un cancer du côlon.

Entre les débuts des symptômes et le diagnostic, environ six mois se sont écoulés, retardant ainsi la prise en charge de la maladie. “On ne s’écoute pas bien, on est pris par le travail, la vie de famille…”, explique la quadragénaire. “La prise de rendez-vous, le délai entre chaque consultation prend également du temps”.

* Le prénom a été modifié.

Son entourage l’aide à surmonter cette épreuve

Pour Elisabeth, le diagnostic est un choc. “Le médecin m’a mis tout de suite sous calmants, cela m’a beaucoup aidée”, relate-t-elle. “Ensuite, tout va très vite, on n’a pas le temps de réfléchir”.

Du côté de ses proches, les réactions sont mitigées, mais la patiente a la chance d’être bien entourée. “Plusieurs personnes ont été très présentes pour moi, comme mes parents et mon frère. Tandis que d’autres ont été totalement dans le déni”.

Quant à son fils, qui avait 13 ans à l’époque, elle ignore encore la façon dont sa maladie a pu l’affecter. “A un moment, j’ai pensé qu’il avait besoin d’en parler, car il ne se confiait pas à moi. Je l’ai donc emmené, avec son accord, voir un psychothérapeute. A ce jour, il est toujours inquiet quand je vais à l’hôpital, il me demande tout de suite pourquoi. Mais d’après ce qu’il me dit, le seul souvenir qu’il a de cette période, c’est que j’étais tout le temps au lit”.

Elisabeth s’estime également chanceuse de n’avoir jamais été seule. “Mon père m’a accompagnée à chaque chimio”, précise-t-elle. Pendant le traitement, elle s’installe chez ses parents avec son fils. Cela lui permet de se reposer, et de récupérer entre chaque chimiothérapie. “Je n’avais pas de logistique à gérer, comme les courses, le ménage ou la cuisine”.

Un traitement épuisant… et des effets secondaires qui le sont tout autant

Peu après le diagnostic, Elisabeth se fait opérer, afin de se faire enlever la tumeur. On lui pose ensuite une chambre implantable percutanée (CIP), un petit boîtier relié à un cathéter. Celui-ci permet d’injecter les médicaments de la chimiothérapie par intraveineuse, et reste en place durant toute la durée du traitement. “Chaque fois que je me déshabillais et que je la voyais, j’avais la tête qui tournait”, confie-t-elle.

Un mois plus tard, la chimiothérapie commence, à raison de douze séances, à quinze jours d’intervalle chacune. “Cette étape a été très difficile. On espère que le traitement va servir à quelque chose, parce qu’on souffre vraiment. D’autant que les séances sont très rapprochées, et ne nous laissent que peu de répit. On a à peine le temps de digérer la chimio précédente qu’il faut déjà recommencer”.

Les effets secondaires sont aussi compliqués à gérer. “J’étais épuisée ; parfois, je ne pouvais pas sortir du lit pendant plusieurs jours”. Elisabeth souffre de nausées très intenses. “Les odeurs m’étaient insupportables, j’avais tout le temps le coeur au bord des lèvres”. Les traitements lui provoquent également des effets secondaires au niveau des extrémités et du dos (perte de sensibilité, douleurs).

Les médecines alternatives : un coup de pouce pour supporter le traitement

Habitant près de Saint-Etienne, Elisabeth peut bénéficier des médecines parallèles proposées au centre Hygée (Centre de prévention, d’éducation et de recherche sur les cancers), par la Ligue contre le cancer. Celles-ci lui permettent de diminuer un peu ses douleurs dorsales - ou au moins, de mieux les gérer au quotidien.

“J’ai eu la chance de rencontrer le docteur en charge de ce centre. Il m’a conseillé de pratiquer des activités physiques ainsi que dela méditation de pleine conscience”. Elisabeth bénéficie alors de 10 séances, financées par la Ligue contre le cancer.

Enthousiasmée par cette pratique, Elisabeth veut continuer à l’issue de ces séances. En accord avec deux autres membres, une association est créée : Méditons Zen’Semble. Celle-ci propose des séances de méditation ouvertes à tous, à Saint-Etienne et à Villars.

Elisabeth va également voir un magnétiseur, pour l’aider à gérer le traitement se son cancer du côlon. “Lorsqu’on est malade, il ne faut pas hésiter à s’ouvrir”, précise-t-elle. S’ouvrir aux autres, mais aussi faire preuve d’ouverture d’esprit - notamment face aux éventuelles médecines parallèles qui peuvent vous être proposées, et aux structures qui existent. “Elles peuvent nous embellir un moment de la journée, nous donner un peu d’espoir”.

D’autant qu’on peut parfois se sentir isolé.e. “La maladie nous rend seule, même si on est entouré par les médecins ou la famille. On est seule dans cette situation, on ne peut pas forcément tout dire, et les autres ne peuvent pas s’imaginer ce que l’on traverse, même s’ils nous soutiennent”, explique-t-elle.

“Mais il ne faut surtout pas se refermer sur soi. Discuter avec d’autres patients, comme j’ai pu le faire dans mon groupe de méditation, peut aider. On voit qu’ils sont confrontés aux mêmes problèmes que nous”. Selon elle, il faut faire la démarche d’aller vers les autres, car ces derniers ne viendront peut-être pas d’eux-mêmes.

C’est pour son fils et sa famille qu’elle trouve la force de se battre

Si Elisabeth n’a jamais baissé les bras, dans son combat contre le cancer, c’est en grande partie pour son fils et sa famille. “Je devais me battre pour lui, je ne pouvais pas le laisser”. C’est aussi parce que les médecins ont toujours été très positifs à son égard.

Elle dit aussi avoir eu la chance de ne pas perdre la totalité de ses cheveux, un effet secondaire fréquent de la chimio, souvent difficile à accepter pour une femme. Celui-ci a une résonance psychologique, dans la mesure où il impacte la féminité dans son essence même.

Malgré sa force, Elisabeth connaît des hauts et des bas durant sa maladie. “J’ai souffert de douleurs au foie et au pancréas pendant la chimio. Les médecins ont cru que la tumeur s’était propagée à ces organes”. Finalement, ils finissent par découvrir que ces douleurs sont des effets secondaires de la chimiothérapie, et non une recrudescence du cancer.

“Même si on s’habitue au fait d’attendre, l’attente des résultats est toujours difficile”, souligne la patiente. On lui fait également des prises de sang régulières pour savoir comment elle réagit à la chimio, qui peuvent amener à des traitements supplémentaires - “comme des piqûres pour booster les globules blanc, par exemple”.

“Parfois, on veut baisser les bras. Mais les médecins sont toujours là pour nous rappeler les rendez-vous. Notre vie devient très rythmée pendant le traitement, et c’est parfois sortir de ce rythme qui est dur”.

L’après cancer peut être aussi difficile que la maladie

Le retour à la vie normale est parfois aussi difficile que le combat contre le cancer. Pour Elisabeth, la reprise du travail, à temps partiel thérapeutique dans un premiers temps, a été compliquée. “J’en avais besoin, pour reprendre une vie normale, mais il y a la fatigue à gérer, ainsi que les collègues”. Le manque d’empathie de ses collègues l’a d’ailleurs marquée. “On m’a carrément dit ‘c’est bon, c’est fini, il faut que tu passes à autre chose’. Mes supérieurs ont aussi refusé de m’accorder des jours de congé ; il fallait toujours que je me justifie”.

La motivation lui fait aussi défaut, car elle ne trouve plus de sens dans son travail. “Après un cancer, on a envie de profiter de la vie différemment. Ces deux dernières années m’ont permis de me (re)trouver, de savoir ce que je voulais vraiment”. Ce qui la rendrait heureuse ? “Ne plus travailler dans mon domaine d’activité, et apporter du bien-être aux gens”. Une satisfaction qu’elle trouve déjà, en partie, dans son association.

Sur le plan personnel également, son cancer du côlon a eu un impact. “Avec mon fils, on s’est rapprochés, mais on a quand même vécu des moments difficiles”.

Cette épreuve aura permis à la quadragénaire de faire du tri dans ses amis. “Bien sûr, tout le monde perçoit la maladie à sa façon. On peut être mal à l’aise face au cancer, et je le respecte totalement. C’était le cas de certains de mes amis, et je les côtoie encore, évidemment. En revanche, d’autres personnes ont été méchantes, ont eu des attitudes désagréables”... Sur ces dernières, elle a tiré un trait.

Aujourd’hui, Elisabeth est en rémission. Mais elle gardera toujours une trace de ce cancer du côlon. “On pense qu’on est guéri, car on l’est physiquement. Mais psychologiquement, pas du tout. Le cancer fait partie de nous”.

Certains effets secondaires sont d’ailleurs toujours présents. “Je suis fatiguée, j’ai très mal au dos et les nerfs de mes extrémités sont atteints. Je fais donc souvent tomber des choses et je n’ai plus de sensibilité au niveau des orteils”, explique-t-elle. “Il faut donc continuer de se battre”.

Sources

Merci à Elisabeth de nous avoir confié son histoire.

Vidéo : Cancer du côlon : les symptômes qui ne trompent pas

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