Toxine botulique : quels risques santé ?
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Mauvais geste, mauvais résultat

Contrairement à sa réputation, l’injection de toxine botulique est une intervention complexe. Elle demande un geste très précis et une grande connaissance des muscles du visage. Par exemple, toutes les parties du visage ne peuvent pas être piquées. L’autorisation de mise sur le marché (AMM) des spécialités à base de toxine botulique n’indique que le traitement des rides verticales intersourcilières. Or, de nombreux médecins et chirurgiens l’utilisent également dans le bas du visage et le cou, ce qui n’est pas recommandé par l'AMM des produits. "Ce n’est pas interdit, et cela peut être utile mais la responsabilité du médecin est entièrement engagée" note Julien Eschermann, médecin esthétique.

"Le principal facteur de risque de la toxine botulique réside dans la façon de l’injecter. Si le geste est mauvais, le patient peut se retrouver avec un visage asymétrique durant trois mois", explique le Dr François Niforos, chirurgien plasticien lyonnais.

Des effets indésirables peuvent entrainer des troubles de la vue.

"L’effet indésirable le plus couramment rapporté est une paupière tombante. Ce désagrément est temporaire, mais il peut durer jusqu’à un mois", note le Dr Julien Eschermann. "Toutefois, la toxine botulique à visée esthétique n'a pas d’effet indésirable mettant en jeu le pronostic vital du patient."

Toxine botulique : jamais après 65 ans !

Comme toute substance médicamenteuse, la toxine botulique comprend des contre-indications. L’autorisation de mise sur le marché des trois spécialités à base de toxine botulique en précise en certain nombre, que les médecins doivent respecter. Son utilisation sur une personne de moins de 18 ans ou de plus de 65 ans relève d’une utilisation hors AMM (autorisation de mise sur le marché), car en dehors de cette tranche d’âge, trop peu d’études ont été réalisées pour prouver que le produit n’est pas dangereux. De même, son usage est déconseillé chez la femme enceinte ou qui allaite.

L'hypersensibilité à la neurotoxine botulinique de type A ou à l'un des excipients, les troubles généralisés de l'activité musculaire (ex: myasthénie grave, syndrome de Lambert-Eaton) ou l’existence d’une infection ou d'une inflammation sur la zone d'injection doivent conduire le médecin à refuser d’injecter.

Des précautions doivent aussi êtres prises si la personne souffre de troubles hémorragiques, ou musculaires et si elle est sous traitement anticoagulant.

Toxine botulique : attention à la qualité du produit !

Vous pensez qu'acheter ses médicaments en ligne est risqué ? Eh bien il en va de même pour le "Botox®" ! De nombreux produits sont vendus sur internet comme de la toxine botulique, sans que l’on sache réellement ce qu’ils contiennent. Contrairement à la toxine botulique achetée en pharmacie, ces produits ne sont pas contrôlés par les autorités françaises, c’est-à-dire par l’Afssaps qui délivre les autorisations de mise sur le marché (AMM) des médicaments.

Or "Il se peut que certains praticiens s'en procurent via des sites étrangers", alerte le Dr François Niforos, chirurgien plasticien. "L'Afssap autorise, selon leurs qualifications, un certain nombre de médecins à l'utiliser, cette liste figure dans l'AMM du produit. Les autres médecins ne peuvent pas se procurer la fameuse toxine auprès d’un pharmacien, ils sont donc parfois contraints d'en commander par Internet.", précise ce spécialiste de la toxine botulique, consultant pour un laboratoire fabricant.

Le Dr Julien Eschermann est médecin esthétique et médecin généraliste. Ses qualifications ne sont pas listées dans l'AMM des produits à base de toxine botulique. Comme de nombreux médecins esthétiques formés à l'injection de toxine, il pratique tout de même ce geste : "Tout médecin peut acheter de la toxine botulique auprès de sa pharmacie. Il reste que certains pharmaciens refusent et on voit bien que la situation n'est pas encore claire. Il faut préciser que l'AMM restreinte à certains spécialistes concerne l'usage et la prescription, les conditions d'approvisionnement ne sont pas prévues. Ainsi, un médecin généraliste ne peut pas prescrire de la toxine à un patient pour qu'il aille se fournir à la pharmacie, mais le médecin lui-même peut aller la chercher."

"Pour être sûr de la provenance du produit et pour se souvenir de sa 'marque', on peut demander à disposer de l’étiquette du produit utilisé", conseille le Dr Julien Eschermann, président du Syndicat national des médecins esthétiques.

A noter : Les trois spécialités à base de toxine botulique à visée esthétique qui sont autorisées sur le marché français par l'Afssaps sont Vistabel®, Azzalure® et Bocouture®. Le "Botox®" est un produit dont l'AMM précise des indications médicales, mais aucune indication esthétique. Certains médecins ou chirurgiens esthétiques peuvent toutefois décider de l'utiliser en mettant leur responsabilité en jeu en cas de problème.

Des médecins rarement formés à l'injection de toxine botulique

Pour obtenir un bon résultat après une injection de toxine botulique et limiter les risques de complications, le geste du médecin est primordial. Mais tous les médecins ne sont pas formés.

Les médecins dont la responsabilité est couverte par l’autorisation de mise sur le marché (AMM) des produits contenant de la toxine botulique sont : les dermatologues, les ophtalmologues, les chirurgiens de la face et du cou, les chirurgiens spécialisés en chirurgie maxillo-faciale et les chirurgiens spécialisés en chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique.

"On considère que les médecins listés par l’AMM ont les compétences de base pour effectuer ce geste mais une formation complémentaire est indispensable", explique le Dr François Niforos, chirurgien plasticien spécialisé en injections de toxine botulique.

En effet, même diplômé en chirurgie, aucun médecin n’est formé à l’injection de toxine botulique durant son cursus universitaire initial. La formation post universitaire n’est pas obligatoire. "L’AMM sert uniquement à couvrir le praticien ou le laboratoire fabricant en cas de litige. Mais un médecin généraliste peut très bien injecter de la toxine botulique sans être inquiété. Un cadre légal à la pratique de la toxine botulique manque encore", reconnaît le Dr Julien Eschermann, médecin esthétique et généraliste.

Comment trouver un médecin correctement formé ? Il est aujourd’hui malheureusement impossible pour un patient de vérifier cette information auprès du conseil de l’Ordre des médecins. Le spécialiste peut afficher ses diplômes et ses spécialisations dans sa salle d’attente ou les présenter au patient mais rien ne l’y oblige.

"Le moyen le plus efficace pour les patients de trouver un bon praticien reste le bouche-à-oreille", recommande le Dr François Niforos, chirurgien plasticien.
“Le patient peut cependant vérifier auprès de son praticien sa formation post universitaire en médecine esthétique”, ajoute le Dr Julien Eschermann.

Encore trop peu d'études disponibles

La toxine botulique est utilisée à des fins esthétiques depuis le milieu des années 1980. En France, on s'en sert depuis le début des années 1990, même si la première autorisation de mise sur le marché d’une spécialité en contenant et à visée esthétique ne date que de 2003.

Pour le Dr Julien Eschermann, médecin esthétique, "le produit manque d’études réalisées sur le long terme, même si aucun événement rapporté n’est pour l’instant préoccupant."

Le Dr François Niforos, chirurgien plasticien, se veut aussi rassurant : "Les vingt-cinq années d’expérience d’utilisation de la toxine botulique, et le fait qu’aucun pays n’ait à ce jour signalé le moindre accident, prouvent que ses effets à long terme sont connus et sûrs."

Injections à domicile : attention, danger !

Au fil des reportages sur le sujet, les médias ont peu à peu donné une image d’intervention légère, banale, voire conviviale de l’injection de toxine botulique. Or les injections à domicile ou les "réunions botox" entre amies sont illégales.

"En médecine, il n’y a pas de petites infractions et les médecins qui acceptent de pratiquer des injections de toxine botulique chez leurs patientes le font de façon commerciale", dénonce le Dr François Niforos, chirurgien plasticien spécialisé en injection de toxine botulique.

"Ces injections à domicile ne sont pas sans danger pour les patients. Les conditions d’asepsie d’un cabinet ne peuvent être réunies dans un logement, ce qui entraîne un risque d’infections ou de complications", avertit le Dr Julien Eschermann, médecin esthétique, président du Syndicat national des médecins esthétiques.

La toxine botulique : un poison à l’origine

La toxine botulique est une toxine sécrétée par une bactérie (Clostridium botulinum) qui provoque le botulisme. Cette bactérie est l’un des poisons les plus puissants connus à ce jour. Le botulisme a été remarqué pour la première fois au XIXe siècle. Cette intoxication alimentaire, aujourd’hui très rare en France, peut être mortelle. Elle est contractée lors de la consommation de conserves mal stérilisées.

L’injection de toxine botulique à visée esthétique ne présente pas de risque de transmission de cette toxi-infection, étant donnée la faiblesse des doses employées et le mode d’administration différent (elle n’est pas donnée par voie orale).

Comment la toxine agit-elle?

La toxine botulinique (ou botulique) de type A, que l’on appelle couramment Botox®, est une substance utilisée sur les rides d’origine musculaires du front.

La substance injectée dans un muscle bloque la libération du neuromédiateur responsable de la contraction du muscle (l’acétylcholine), provoquant un relâchement temporaire. Celui-ci étant détendu, les rides ne sont plus marquées.

L’effet est réversible et disparaît totalement généralement au bout de 9 à 12 mois.

Sources

- Muriel Gaudin, Médecine esthétique, rajeunir sans bistouri et sans risques !, Leduc.S Editions, 2006.

- Dr Guy Haddad, La chirurgie esthétique, Ed. Josette Lyon, 2002.

- Afssaps

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